Le divorce est un phénomène social dont la fréquence, la manifestation et l'intensité varient d'une société à l'autre en fonction de la spécificité culturelle, de la situation économique et de la législation mise en vigueur. Aujourd'hui il constitue l'un des problèmes majeurs de la société tunisienne qui porte un grand intérêt à la stabilité des ménages et l'unité de la famille. Les mutations sociales qu'a connues la Tunisie au lendemain de l'indépendance et qui sont accélérées sous l'effet de l'évolution massive des populations, ont bouleversé les modes de vie et changé les rapports sociaux. Cette évolution n'a pas épargné la structure familiale qui constitue le noyau de la société en agissant sur l'un de ses fondements les plus profonds : le mariage. En effet, le divorce ne cesse de gagner du terrain. C'est un phénomène qui touche de plus en plus de nombreuses familles tunisiennes, et pour bien des couples, le divorce reste une épreuve difficile dont les époux et particulièrement les enfants ne sortent jamais indemnes. En se référant aux chiffres relatifs au divorce, il semble que les Tunisiens trouvent du mal à réussir leur ménage et encore moins leur divorce. Ils ont tendance à « mal se marier », à « mal divorcer », et à mal vivre la période « post-divorce » qui n'est jamais bien gérée par le couple quel que soit son niveau social. La proportion véritablement alarmante des divorces signifie qu'il y a un problème de fond dans la manière dont beaucoup de gens abordent le mariage, ainsi que les relations humaines, de manière générale. Ce phénomène touche malheureusement beaucoup d'enfants, trop souvent pris dans la tourmente des conflits de couples en crise. Et ce sont ces enfants-là qu'il faut absolument sauver et éviter au maximum de les exposer face à des difficultés émotionnelles. En effet, c'est avec ses deux parents que l'enfant trouve un juste équilibre nécessaire au développement de sa personnalité. Mais lors d'une séparation ou d'un divorce, l'enfant va devoir vivre contre son gré avec un seul de ses parents. Il se voit aussi imposer un nouveau système de résidence alternée. Et c'est là que le divorce apparaît comme un facteur à risque capable d'engendrer d'éventuels troubles psychologiques qui touchent à sa personnalité, à son comportement et qui à long ou à court terme peuvent se transformer en véritables pathologies mentales. Préserver l'image du père ou de la mère après le divorce, rester attentifs aux besoins de l'enfant, devient une mission importante et l'une des clés de la réussite de l'épanouissement de l'enfant et pour son bon développement psychomoteur. Quelle que soit la situation, l'enfant aura toujours besoin de la présence et de l'amour de ses deux parents, même s'ils sont séparés. Il est donc essentiel de maintenir des relations fortes avec l'enfant et de rester toujours à son écoute. Parfois, même avec les gens les meilleurs, animés de meilleures intentions, le ménage ne réussit pas. Mais le couple parvient à bien réussir le divorce. L'enfant doit se sentir aimé, encouragé et respecté dans son identité et ses capacités. Ainsi il réussira non seulement mieux dans sa scolarité, mais aussi dans toute sa vie. C'est pourquoi, nombre de filles de divorcés, dont les propres parents se sont montrés aimants et attentifs, ont développé plus de capacités d'adaptation, de débrouillardise et de combativité que des enfants de familles unies, parce qu'elles avaient dû mobiliser leurs ressources et passer ce cap, accompagnées par leurs parents qui ont su assumer leur rôle et établir une parenté acceptable afin d'épargner de nombreux conflits. HAGER DALY ----------------------------- Chiffres préoccupants Selon le sociologue tunisien Pr Belaid Ouled Abdallah, la Tunisie est classée 4ème au rang mondial du taux de divorce. Entre violence conjugale, incompatibilité d'humeur, libération des mœurs et problème matériels, c'est un mariage sur six qui se termine par un divorce. Alors qu'en Europe le taux du divorce varie entre 40 à 60 % selon les études et les pays. Actuellement en Suisse et en Suède, le divorce touche un couple sur deux. En Angleterre c'est un mariage sur trois qui échoue, alors qu'au Canada 25 % des couples divorcent au cours des quatre premières années de mariage. Selon le sociologue tunisien Pr. Slaheddine B Fradj 48,30 % des causes du divorce sont liées aux problèmes sociaux. 22,70 % aux problèmes d'incapacité physique dont l'inaptitude à la procréation. 15,80 % liées aux problèmes sexuels dont l'adultère et la jalousie et 13,20 % dues aux problèmes matériels dont la pauvreté. Selon la même source plus de la moitié des divorces sont demandés par les femmes (qui étaient à peine 6 % à demander le divorce en 1961) Les zones rurales sont moins touchées par ce fléau. Mais le taux le plus élevé a été enregistré dans les gouvernorats du Grand Tunis (2145), Sfax (1007), Sousse (958). Ce sont là des chiffres alarmants, pour un pays comme le nôtre qui compte 10 millions d'habitants et ayant un taux de croissance démographique de 1,21 % (un taux plus bas que dans certains pays européens).