Les dernières augmentations des prix du tabac dissuaderont-elles les accros à la nicotine de cesser de fumer? Car, à chaque augmentation, les mêmes mots reviennent : il est temps d'arrêter ; ça devient trop cher ! Mais ce ne sont que de mots vains, l'accoutumance prend généralement le dessus. Contrairement aux autres augmentations, essentiellement qui touchent le couffin de la ménagère, celles des prix du tabac ne suscitent pas de réaction négative. Elles seraient plutôt "bien accueillies" dans l'espoir de voir le conjoint, le père, le fils ou le frère se débarrasser d'une mauvaise habitude qui mène pour la plupart des cas à la mort et qui grève le budget familial. Les statistiques sont là et elles sont têtues : le Tunisien consacre le 1/5ème de son salaire au tabac et le nombre de décès que cause ce fléau s'élève à 5580 chez les hommes et 850 chez les femmes (voir le Temps du 12 juillet 2009). Ceci sans occulter les énormes sacrifices consentis par la communauté nationale dans les soins des maladies liées au tabagisme. D'ailleurs ces dépenses dépassent de loin, les recettes engendrées par la vente du tabac. Mais au delà de toutes ces considérations, le fait d'arrêter de fumer met fin à un casse-tête qui tracasse le fumeur invétéré depuis quelque temps déjà.
Les pénuries A peine habitué à une certaine marque de cigarettes, ce fumeur s'aperçoit de sa disparition subite des débits de tabac. D'où la ruée vers les marchands de fruits secs et autres revendeurs moyennant bien sûr un prix plus élevé. Mais généralement ce manège ne dure que quelques jours avant la disparition de cette marque du marché. Là les spéculations et les rumeurs vont bon train. Pour beaucoup, il s'agit d'une astuce de la Régie nationale du tabac et des allumettes (RNTA). Elle stoppe la distribution de cette marque pour faire écouler une autre en mal de clients ou produite en grandes quantités. L'opération se répète plusieurs fois durant l'année avec une marque qui supplante l'autre au grand dam.
Deux variétés Mais là où le bât blesse, c'est cette trouvaille (purement tunisienne d'ailleurs) qui consiste à offrir au consommateur deux variétés d'une même marque. L'une supérieure, l'autre inférieure bien sûr mais au même prix. Seulement, la qualité supérieure est toujours introuvable dans les débits de tabac. Les mauvaises langues disent que cette qualité supérieure n'est disponible que pour ceux qui avancent des "royalties" aux agents de la régie. A leur tour les propriétaires de débits de tabac détenteurs de cette qualité supérieure ne la présentent pas à leurs clients ordinaires mais aux autres revendeurs du marché parallèle. Le prix est bien sûr plus fort et c'est le consommateur vrai dindon de la farce, qui paie la différence. Il y en a même qui disposent de deux ou plusieurs échoppes : un débit de tabac (fermé pour la plupart du temps) et un café ou autre pour faire écouler leur marchandise à un prix plus fort.
Contrebande Face à cet imbroglio beaucoup de fumeurs trouvent l'alternative dans le marché parallèle de la contrebande où est disponible une marchandise que certains prétendent de bonne qualité et à un prix nettement inférieur. Cette marchandise provient essentiellement d'Algérie et de Libye. Mais faute de contrôle, il n'est pas certain qu'elle est conforme aux normes réglementaires. Outre les préjudices qu'elle engendre pour l'économie et le manque à gagner pour les recettes de finances.