Habiba Meriah et Afef Mansouri font partie de ces nouveaux créateurs. Après leurs études à l'Ecole supérieure de sciences et de technologies du design, ces deux jeunes femmes ont décidé de se lancer dans la fabrication d'objets en céramique. Une technique artisanale des plus classiques, mais avec une touche très « 2007. » Les verres, les tasses, les pots de fleurs ou les bougeoirs qu'elles créent sont très modernes et comme on dit dans le jargon, très tendances. Rien à voir avec les céramiques de nos grands-mères. « On cherche à créer des objets de décoration avec des formes, des textures et des couleurs. On aime beaucoup les lignes pures pour garder un côté naturel et authentique à nos créations », explique Habiba. « On essaie aussi de mettre en valeur le patrimoine tunisien en utilisant, par exemple, les graphiques berbères », ajoute Afef.
Cette recherche artistique est frappante lorsque l'on observe de près la variété de produits de ces jeunes « designers. » Il y a vraiment de tout pour tous les goûts. On retrouve des mains de fatmas modernisées, des verres à thé stylisés ou encore des bols à dessert en rouge, mauve, jaune ou bleu. Leurs clients ont vraiment l'embarras du choix. « On a remarqué qu'il y avait deux types de clients. Il y a ceux qui achètent des objets avec les symboles du pays pour les touristes et les Tunisiens qui cherchent des produits de luxe », indique Habiba. « Les Tunisiens qui aiment les produits haut de gamme sont quand même en minorité pour le moment. Mais on en voit de plus en plus qui veulent des objets de décoration plus modernes pour créer une ambiance à la maison », poursuit Afef. Il suffit d'y mettre le prix.
Comme toutes les formes d'art, les créations artisanales ne sont pas accessibles à tous les portefeuilles. Un objet décoratif authentique coûte toujours un peu plus cher que ceux fabriqués en quantité industrielle. Mais pour les artistes, le prix n'est presque rien du tout. Ils réussissent à peine à payer leur matériel. « Ce n'est pas donné de faire de la céramique. Dans notre cas, on fabrique nos pièces à Tunis et après, on va les faire cuire à Nabeul. C'est l'émail, le four et la cuisson qui coûtent trop cher », raconte Afef. Heureusement, nos deux jeunes céramistes et les autres jeunes créateurs ont pu bénéficier d'un coup de pouce pour exposer au Salon de la Création. L'Office national de l'artisanat leur a permis de présenter leurs créations gratuitement. « C'est une chance parce que les artisans doivent payer au moins 450 dinars pour un tout petit stand s'ils veulent exposer au salon », souligne Habiba.
Le Salon de la Création Artisanale est pourtant une belle occasion pour tous les artisans de se faire connaître. Chaque année, des milliers de visiteurs franchissent le portillon du Parc des expositions du KRAM. Là-bas, on y retrouve environ 200 exposants qui offrent uniquement des produits « made in Tunisia. » Tout y est. Des habits, des tapis, des poteries, des bijoux, des parfums...Les futurs mariés trouveront certainement de quoi meubler leurs villas, les mamans auront probablement quelques idées-cadeaux et les hommes pourront peut-être dénicher la perle rare pour leur bien-aimée.
« Ici, c'est vraiment l'idéal pour rencontrer des gens et présenter notre collection », lance Amel Maalej. Cette jeune designer de bijoux expose pour la première fois ses colliers fantaisistes d'inspiration tunisienne. « L'artisanat purement traditionnel commence à être démodé. Les femmes ne portent plus vraiment les gros bijoux en argent. Moi, j'ai quand même décidé de garder la « rayhana » traditionnelle, mais j'y ajoute des perles ou je fais des formes différentes pour les pendentifs », mentionne-t-elle. Et il n'y a pas deux bijoux pareils.
Tous ces jeunes créateurs veulent ainsi créer leur propre marque de commerce. Ils n'ont qu'une idée en tête : être original. « Mon seul but est de réussir à me faire connaître par l'originalité de mes produits », tient à dire Youssef Assoudi qui a gagné le 1er Prix de la Décoration intérieure pour son ensemble de luminaires. « En fabriquant mes lampes, j'ai cherché à trouver une connivence entre les matériaux c'est-à-dire d'utiliser à la fois du verre soufflé, de la céramique et du cuivre », précise-t-il.
Youssef Assoudi espère maintenant réussir à vivre de son métier. Dans son petit atelier qu'il a nommé « Le RELIEF » au Village d'artisanat de Den-Den, il crée tous les jours de nouveaux objets de décoration. Son rêve est d'arriver à exporter un jour ses produits à l'étranger. Et il n'est pas le seul. Tous les jeunes créateurs souhaitent se faire connaître ici comme ailleurs. « On compte conquérir la France », s'esclaffent de rire Habiba et Afef. « Rêver, c'est gratuit. Il faut voir grand ! »