La jeune fille semblait un peu perdue au beau milieu du centre-ville, car elle ne cessait de regarder, tantôt à droite, tantôt à gauche, hésitante, ne sachant apparemment pas où aller. Il lui arrivait même de parcourir une dizaine ou une vingtaine de mètres, avant de rebrousser chemin et revenir au point de départ, encore plus indécise, perplexe. Il était en tout cas clair qu'elle ne connaissait vraisemblablement pas la capitale et ses nombreux dédales, ainsi que ses tenants et aboutissants. Comble de malheur pour elle, ces trois voyous qui n'ont pas cessé de l'importuner depuis un certain moment, lui emboîtant le pas à chacun de ses mouvements, tout en débitant quelques vulgarités, qu'ils ont appris à longueur de journée, en déambulant sans but précis à travers les artères de la grande cité. La pauvre jeune fille était certes au bord de l'explosion, mais elle parvenait tout de même, non sans peine, à se contenir, à garder un certain calme, ne tenant sûrement pas à se faire tourner en dérision. Les trois jeunes individus semblaient toutefois ne pas vouloir la lâcher, la suivant partout où elle allait et continuant à déverser un torrent de gros mots, tirés d'on ne sait quel vocabulaire, mais lancés cependant en douce, de manière à n'être entendus que par la jeune fille. C'en était fini dès lors du calme olympien dont elle faisait preuve jusque-là, elle s'apprêtait à piquer une crise, lorsqu'un jeune homme fit son apparition pour apostropher les trois énergumènes, les menaçant même de les arrêter sur le champ s'ils ne mettaient pas un terme à ce manège. Son autorité et son air sérieux ont fini en tout cas par convaincre les trois types de se retirer, puisque ne tenant absolument pas à se frotter...à un policier ! Parce qu'il en avait l'air, le bonhomme. Pour la fille, ce fut une véritable manne du ciel, un vrai miracle que de rencontrer, enfin, quelqu'un disposé à vous tendre la main. Elle en fut soulagée, au point de ne pouvoir refuser l'invitation du jeune homme, son sauveur, à prendre le café. Il est vrai aussi qu'elle en avait grand besoin, la pauvre, tant elle avait les nerfs en compote. Installés dans une cafétéria des environs de la place de la République (le passage pour le commun des mortels), les deux jeunes gens n'ont pas manqué de parler de choses et d'autres, le compagnon de la fille cherchant manifestement à la mettre en confiance. Il y parvint sans la moindre difficulté, arrivant ainsi à connaître pratiquement tout d'elle, sa compagne lui racontant toute son histoire. L'histoire d'une jeune étudiante un peu perdue, cherchant expressément où se caser, puis, pourquoi pas dégoter dans la foulée un petit boulot pour arrondir ses fins de mois, d'autant que sa famille ne pouvait supporter les charges des dépenses que nécessiteront ses études. Son compagnon en profita pour lui promettre de l'aider, lui assurant qu'il connaissait quelqu'un qui pourrait lui procurer du travail. Il l'invita, d'ailleurs, à l'accompagner justement chez cet ami pour battre le fer tant qu'il est chaud et se mettre d'accord. Lui faisant désormais aveuglément confiance, elle n'a pas du tout hésité afin de l'accompagner là où il voulait et le suivre sans la moindre appréhension à bord d'un taxi, jusqu'à la banlieue Nord. Ce n'est qu'une fois devant le perron de la demeure, qu'elle eut subitement l'impression de s'être fourrée sans le savoir dans la gueule du loup. Elle a bien, alors, tenté de se rétracter, mais c'était déjà trop tard, le bonhomme se sentait en position de force désormais, d'autant qu'il s'est empressé d'exhiber un couteau qu'il lui a flanqué à la gorge, la menaçant des pires exactions si elle osait esquisser le moindre geste de défense, ou encore s'aviser d'appeler au secours. Prise au piège, elle a dû le suivre docilement pour subir ses lubies bestiales pour un bon bout de temps. Une fois repu, il s'est montré "correct" en la ramenant à son port d'attache, autrement dit au centre-ville, là où il l'a rencontrée quelques heures plus tôt ! Se retrouvant encore une fois seule, elle est allée déposer plainte au poste le plus proche à l'encontre du "policier" qui a abusé de son innocence naïve. Le "policier" en question n'a pas tardé à tomber entre les mains des agents de la Police judiciaire de La Marsa...