En s'inspirant d'une expérience menée dans les années 60, par l'américain Stanley Milgram à l'Université de Yale, qui consiste à placer les candidats d'un jeu télévisé, dans une posture les poussant à électrocuter, selon un rythme allant crescendo, la victime du jeu, en réalité un acteur, et partant du fait que la dernière étape est affichée clairement : « attention, choc très dangereux », et que 80% des candidats n'hésitent pourtant pas à pousser ce levier, en obéissant à des injonctions du genre « L'expérience exige que vous continuez », un journaliste français, quelque trente ans après, a eu l'idée de reconduire l'expérience. A travers un film documentaire: « Le jeu de la mort », basé sur le même principe, et portant également sur l'obéissance des sujets. Diffusé sur la TSR, le film passera le 17 mars sur France 2. Et démontrera au cas où on pourrait en douter, qu'une personne normalement constituée, face au pouvoir télévisuel qui est loin d'être négligeable, pouvait infliger à un inconnu, une décharge de 460V, sans mesurer en aucune façon, les conséquences autrement néfastes de son acte. Comme s'il était placé sous hypnose. A l'origine, l'initiative de Milgram, visait à percer le mystère de l'inhumanité des Hommes, dans l'atroce logique de la Shoah, et la spirale infernale du mal, dans laquelle tout le monde –sauf exception- pouvait tomber. En ce sens, le film de Christophe Nick, qui s'appuie donc sur l'expérience de Milgram, tire une sorte de sonnette d'alarme, face aux dérives de la télé-réalité dans un premier temps, et sur les implications de ce qui constitue un conditionnement qui peut entraîner n'importe qui à commettre le pire. Sans avoir ce « sursaut » salvateur susceptible de faire fonction de garde-fou, ou de ligne rouge à ne pas franchir, sous peine de basculer dans l'inhumanité. En appelant ainsi d'une certaine manière, à ce « devoir d'insoumission » dont parlait Wiesenthal. C'est cette incapacité à se rebeller contre l'horreur planifiée, qui a précipité un jour le monde à sa perte. Et visiblement, l'équilibre instauré tient toujours à un cheveu. Pour réaliser ce documentaire, l'auteur aurait fait appel à neuf scientifiques, mais aussi à Jean-Léon Beauvois qui avait collaboré avec le chercheur américain. Avec son équipe, il a pu installer un décor impressionnant de jeu TV, avec 80 techniciens, et Tania Young, en guise d'animatrice, face à des candidats, sélectionnés au préalable par une agence spécialisée. Quatre-vingt candidats qui se prêteront à ce jeu féroce, et qui pour la plupart, demeureront insensibles aux cris de la victime (cris de souffrance cela s'entend car ils ignorent qu'ils ont affaire à un comédien), avouant après coup que le pouvoir de la télé était plus fort que tout, et qu'ils n'avaient plus eu de volonté propre, à partir du moment où ils avaient été sous l'œil de la caméra. A partir de là aussi, les injonctions de Tania Young, les incitant à continuer le jeu, ont sonné comme des ordres pour eux. Par delà le bien et le mal. Le film « Le jeu de la mort » a bénéficié d'un budget de 2,5 millions d'euros. A découvrir absolument !