Un accident tragique de la circulation est survenu dans la nuit de jeudi dernier sur la route reliant Kairouan à Bouhajla et plus particulièrement au niveau de la localité de Bir Msikine à quelques encablures de la ville de Bouhajla causant la mort d'un jeune citoyen tôlier de profession marié l'été dernier et dont l'épouse est enceinte à son huitième mois. Selon sa carte d'identité nationale la victime de cet accident s'appelait Rael mais ses proches l'appelaient Kaies. Agé de 26 ans ce dernier s'est dirigé la nuit de sa mort (aux environs de 20h00) vers le café du coin en vue de charger son téléphone portable puis il s'est dirigé comme d'habitude vers la mosquée du village pour faire la prière d'el Icha. Un camion poids lourd le heurta de plein fouet avant de continuer sa route sans même oser le transporter à l'hôpital. C'était à environ 22h00 quand un jeune citoyen de la région de retour à la maison découvrit Rael cloué au sol tout baignant de son sang et se tordant de douleur. Rael fut alors transporté vers l'hôpital de Bouhajla avant qu'il soit évacué vers l'hôpital de Kairouan où il succomba à ses blessures. La nouvelle de sa mort s'est ébruitée par la suite. Cette nuit là les jeunes de cette localité suivaient les péripéties d'un mach de football à travers un écran géant placé en plein air sur la terrasse du café (Une façon utilisée par les cafetiers pour attirer le plus grand nombre de clients). Selon certains témoins présents sur les lieux de l'accident ; le chauffeur dudit camion aurait ralenti en s'approchant dudit café pour voir quelques séquences de ce match. C'est-à-dire il avait le regard fixé sur l'écran géant et non sur la route pour finalement heurter le pauvre Nael qui se dirigeait tranquillement vers la mosquée le blessant grièvement au niveau de la tête tout en continuant sa route laissant sa victime dans un piteux état. Cette dernière ; assommée par la douleur et l'impuissance ; fut incapable d'appeler au secours des gens qui se trouvaient sur ladite terrasse. Le chauffeur du camion qui fut accompagné par son convoyeur s'était arrêté quelques kilomètres plus loin pour constater que le pare- chocs et l'une des veilleuses de son véhicule furent touchés. Il les aurait vite réparés à son arrivée à Kairouan pour camoufler son crime odieux. Aidés par les renseignements fournis par des témoins ; les agents de la garde nationale arrêtèrent trois jours plus tard le conducteur fugitif. Ce dernier fit croire aux enquêteurs qu'il avait heurté une grosse pierre et non un être humain !! . Son convoyeur confirma ses dires. Les enquêteurs de la garde nationale découvrirent par la suite que l'intérieur de la veilleuse du camion et le pare -chocs furent sérieusement touchés. La bicyclette sous l'effet du choc s'est jetée dans une haie proche du lieu de l'accident. Autant de preuves accablantes qui activèrent l'arrestation du chauffeur du camion pour avoir été à l'origine de ce meurtre alors que son convoyeur se trouve actuellement en liberté étant endormi au moment du choc qui a causé cet accident dit-on!! Nous nous sommes rendus à Bir Msikine une localité relevant de la délégation de Bouhajla où l'accident tragique a eu lieu. Pour se rendre à la demeure de la famille endeuillée où un silence de mort régnait sur les lieux. Oum Touffaha ( la Pomme) la grande mère du disparu fut la première à nous accueillir du regard. A 85 ans elle avait toutes ses qualités physiques et mentales mais le chagrin l'a empêché de se tenir debout pour nous accueillir. Souriant d'un pale sourire en se caressant le menton de haut en bas d'un geste machinal. De temps en temps, elle remet de l'ordre dans son mélia et son foulard. Son visage coloré d'émotion et de fatigue elle nous a fait entrer dans une pièce modestement meublée pour nous parler de son petit fils adoré dont elle était fière et qui venait d'être fauché par un camion au moment où il se rendait à la mosquée à bord de sa bicyclette pour faire la prière d'El Icha " Après la mort de leur mère et le remariage de leur père qui vivait depuis des années loin d'eux avec sa seconde épouse et ses dix enfants je me suis occupée de toute la famille .Mon petit fils Nael était plein d'espoir il aimait la vie. Sa disparition tragique a laissé une douleur qui me bride le jour et me harcèle la nuit. C'était lui qui s'occupait de nous " disait-elle en ravalant ses larmes. Puis elle me fixa du regard pendant quelques minutes le temps de se rappeler d'une vie pleine de difficultés et de sacrifices et du vide difficile à combler laissé à la suite de la disparition tragique de son petit fils " Cette nouvelle situation m'a rendue insomniaque et me provoque des maux de tête. Nael était malgré son jeune âge celui qui nous offre nourriture vêtements et médicaments. Il a laissé deux frères encore fragiles à la recherche du travail et une jeune épouse enceinte à son huitième mois. Je continuerai à vivre avec ce terrible mal au cœur et seule la mort apaisait mon chagrin " ajouta t-elle en cachant son visage larmoyant. Naieb son frère junior n'a pas trouvé assez de mots pour exprimer son deuil. " Un conducteur au volant de son camion sans cœur ayant le regard fixé sur l'écran géant d'une télévision c'est impensable. Pire encore il heurte un être humain dont le seul tort était de se diriger vers la mosquée pour faire la prière sans lui venir au secours. C'est inadmissible. Mon frère qui était le père et l'ami et qui s'occupait de notre famille nombreuse nous a quitté pour toujours laissant un grand vide " rétorqua -t-il. Mohamed ,25 ans le petit frère de Nael n'avait qu'un jour quand sa mère quitté ce monde est apprenti dans un garage. Il touchait 5 Dinars par semaine. L'air égaré. Il flottait sur un petit nuage. Il n'a pas sifflé un mot. La jeune épouse. A peine la vingtaine et encore sous le choc se trouve actuellement chez ses parents à Kairouan.