Les versions sont jusque là contradictoires : l'Iranien Shahran Amiri espionnait-il pour l'Iran ou pour les Etats Unis ? Dans un débat biaisé, Téhéran et Washington tiraient, chacun de son côté, la couverture à soi. L'embrouille tenait plutôt du mauvais polar, d'autant que l'intéressé se trouve être un chercheur et que, par les temps qui courent, un chercheur non américain est quelque part suspect. De là à faire le lien avec les entourloupes associées au business des bombes qui font froid dans le dos, le suspense est assuré. Et comme dans un polar qui se laisse lire, il a bien fallu assaisonner l'intrigue. Pour l'histoire de S. Amiri, on a eu droit aux récits contradictoires d'une espèce de vadrouille entre pèlerinage à La Mecque, séjour dont on dit qu'il fut forcé aux Etats Unis et retour à Téhéran par mauvais temps lié aux conflits entre chancelleries au sujet de la fabrication de la Bombe par l'Iran. On a donc dit, et fait circuler l'information, que ce chercheur avait fait défection pour aller raconter aux Américains les petits secrets bien gardés de son pays. On aurait pu s'en tenir là, conformément aux lois du genre. Sauf que le polar moderne exige du théâtre deux en un, comme pour le shampoing. Le vaudeville vient à la rescousse du drame pour le rendre encore plus spectaculaire. Du coup, on retrouva notre chercheur pas tout à fait espion entouré de sa famille et en train d'arpenter allégrement les rues de Téhéran. Les services respectifs d'espionnage devaient apparemment trouver autre chose à se mettre sous la dent. Ca occupe et ça entretient l'illusion. Il faut bien nourrir le roman feuilleton du nucléaire dans le sens moral qui prévaut dans les calculs des membres du club fermé, et qui veut le rester, fermé aux autres. On ne va tout de même pas partager le droit de faire peur aux autres et de les menacer de toutes les foudres en cas de conflit commercial par exemple. Le théâtre des Nations est ainsi fait : il habille les comparses des costumes sombres qui permettaient de distinguer les héros. Le chercheur iranien a beau dire qu'il ne touche guère au nucléaire. Il fait vraiment preuve d'indélicatesse à l'égard des décideurs de la manière de penser. Il faut dire que dans cette affaire de nucléaire, on continue à prendre les enfants du bon Dieu pour des canards sauvages.