Danser, s'évader sur les ailes du plaisir, c'est la devise du spectacle Douar présenté par la compagnie Accrorap selon une belle chorégraphie de Kader Attou qui a essayé de créer l'échange et le dialogue. Dialogue entre les formes chorégraphiques, hip-hop et danses traditionnelles notamment, dialogue entre les origines, danseurs français et algériens. Formé aux arts du cirque et du hip-hop, Kader Attou franchit les frontières et fait œuvre de métissage, comme on a pu le voir dans ce spectacle « Douar » La danse en sera le véhicule juste et sensible pour cette œuvre en trois temps, empreinte des tourments du siècle, entre souffrance et émotion. Le hip hop est apparu comme une de ces tentatives de réponse. C'est un moyen d'exprimer les préoccupations de ses contemporains, de confronter les rêves et les imaginaires qui travaillent la jeunesse de chaque côté de la Méditerranée. Des jeunes qui veulent se libérer, qui expriment à travers leur propre langage, une idée, une sensation, une revendication sociale, ... Pour Kader Attou, chorégraphe de la troupe Accroap, il s'agit de mettre en espace la notion d'ennui, d'enfermement et le rêve de liberté qu'ont beaucoup de jeunes assoiffés d'évasion dont le désir ardent est de partir ailleurs., Douar retrace en musique et danse, le parcours existentiel de nombreux jeunes désemparés, pris entre la tourmente du temps qui passe et le désir de respirer, d'avancer, d'exister. La danse d' Accrorap est généreuse, elle cherche à briser les barrières, à traverser les frontières. C'est une danse qui revendique le dialogue entre les cultures comme alternative à la guerre... Kader a voulu donner à la danse contemporaine un autre vocabulaire, un sens nouveau, une fonction nouvelle. Dans « Douar » il évoque le drame de l'émigration, la difficulté de traverser cette méditerranée et s'intégrer dans la nouvelle société européenne. Un premier tableau : de part et d'autre de la Méditerranée, les jeunes s'ennuient. Les mains dans les poches, ils rêvent, se projettent de l'autre côté de la mer. Ils veulent partir, voyager. Le bateau est là. Le départ est certes difficile. Les jeunes expriment l'aspiration à la liberté, la lutte pour la survie. Mains enfoncées dans les poches, bourrés de gros sacs, ces jeunes trouvent des difficultés à traverser la mer, les uns en quête de racines, les autres pour fuir l'ennui qui les enferme. Finalement, le temps passe. L'avenir est incertain. Bref, Douar se veut avant tout un spectacle de danse et d'interrogation sur l'avenir de ces jeunes à la recherche d'un monde meilleur. Des jeunes canalisent leur rage dans cet art qui deviendra pour eux non seulement leur passion première mais aussi par la suite, une alternative à la vie dans la rue et à la misère, aussi bien financière que mentale, en donnant libre cours aux mouvements de leurs corps. S'entremêlant, le langage musical et gestuel passe par l'expression du corps. Tout est exprimé à travers le moindre geste et le moindre pas. Un spectacle vivant, d'une grande liberté créatrice. Un à un, les danseurs avancent sur scène : une rotation, un léger déhanchement et toute la scène, se met en évidence. Chaque danseur se distingue de l'autre aussi bien par son physique que par sa manière de s'exprimer et d'esquisser ses mouvements. Le spectacle est séduisant. Une musique très riche et des mouvements gracieux de ces corps qui tournent et qui expriment la liberté, l'évasion, le rêve. La troupe Accrorap a conservé l'essentiel. La force et la grâce. Elle l'a traduit d'une manière différente certes mais alléchante, propre à ce groupe qui nous a donné un autre goût à la danse hip hop acrobatique. Douar est un spectacle poétique et bouleversant mêlé d'humour et de gravité qui a réussi à exprimer l'étendue des préoccupations des jeunes et leur désir d'exister