Mohamed Arkoun, philosophe et historien de l'Islam, vient de décéder le 14 septembre 2010 à Paris. Cet enfant de Taourit – Mimoun, petit village de Kabylie, né en 1928 nous lègue une trentaine d'ouvrages majoritairement consacrés à l'islamologie appliquée » discipline qu'il a développée dans diverses universités européennes et américaines. Parmi ses sujets de prédilection l'on remarqua l'impensé dans l'islam classique et contemporain. Se posant comme critique du réformisme musulman, il prône le modernisme et l'humanisme islamique. En 1969 il acquiert une certaine renommée dans les milieux universitaires avec ses travaux sur l'œuvre de l'historien et philosophe perse Ibn Miskawayh. Directeur scientifique de la revue Arabica, il a joué un grand rôle dans l'érudition du langage occidental sur l'islam. Ses travaux sont traduits en plusieurs langues, il a entretenu un dialogue étroit avec le christianisme et le judaïsme et a coécrit des ouvrages avec des intellectuels de deux confessions. Fervent défenseur de la laïcité, il n'est pas dépourvu d'une critique envers celle-ci du fait des contradictions qu'elle a engendrées à cause de son incompréhension de l'autre culture. Mais cela ne l'empêche pas de penser que pour sauver le monde musulman de ses démons, il est essentiel que l'islam accède à la modernité politique et culturelle. Il affirme, par ailleurs, que la plupart des musulmans refusent aujourd'hui de prendre véritablement en compte l'histoire de l'Islam et de la reconnaître telle qu'elle est, y compris en remontant assez loin dans le temps pour avoir une vision d'ampleur qui intègre le passé lointain et permettre un recul éclairant pour l'esprit. Le XIII siècle marque une interruption dans le développement de l'Islam alors qu'au X ème siècle, il exista une vie intellectuelle brillante et très riche au sein du monde musulman. La perspective de Arkoun consiste à soutenir que l'écriture de l'histoire et la vision portée sur le passé dans son lien avec la religion d'une part et d'autre part, une lecture critique de l'islam à la fois comme religion et comme tradition de pensée, se trouvent nouées à la notion d'identité nationale. Pour tous les pays musulmans. Car c'est le refus des hommes politiques de prendre en compte l'histoire de l'Islam et de la culture arabe, ainsi que les particularités culturelles, sociales et anthropologiques des pays du Maghreb qui est à l'origine des contradictions de cette histoire ainsi que des différences entre le monde musulman et le monde occidental et les différents discours qui les expriment. Arkoun avait mal dans son époque. Il lui a bien rendu sa monnaie. H.G. Source Wikipédia, l'encyclopédie libre. Les distinctions Mohamed Arkoun a enseigné comme professeur à la faculté des lettres et sciences humaines de Strasbourg (1956-1959), au lycée Voltaire de Paris (1959-1961), comme maître-assistant à la Sorbonne (1961-1969) professeur associé à l'Université de Lyon II (1969-1972), puis comme professeur à l'université Paris VIII et à Paris III – Sorbonne Nouvelle (1972-1992). Il a été membre de Wissenschftskolleg de Berlin (1986-1987 et 1990) et de l'Institute for Advanced Studies de Princeton, dans l'Etat du New Jersey aux Etats-Unis (1992-1993), professeur affilié de l'université de Californie à Los Angeles (1969), du Temple University, de l'université de Louvain la Neuve (UCL) en Belgique (1977-1979), de l'université Princeton (1985), du Pontifical Institute of Arabic Studies à Rome et à l'Université d'Amsterdam (1991-1993). Il à également dispensé de nombreux cours et conférences à travers le monde. Mohamed Arkoun a été membre du Comité directeur puis du Jury du Prix Aga Khan d'architecture (1989-1998), du Jury international du Prix UNESCO de l'éducation pour la paix (2002), et du Conseil scientifique du Centre international des sciences de l'homme de Byblos (Liban, UNESCO). Il est fait, en juillet 1996, officier de la Légion d'honneur, puis officier des Palmes académiques. L'université d'Exeter (Royaume-Uni) lui attribue ensuite le titre de docteur honoris causa. En 2001, Mohamed Arkoun est invité à donner les « conférences de Gifford » (Gifford Lectures) à l'université d'Edimbourg (Ecosse), qu'il intitule « Inauguration d'une critique de la raison islamique » (Inaugurating a Critique of Islamic Reason), un des honneurs les plus prestigieux dans le milieu universitaire, permettant à un chercheur de grande renommée de contribuer à « l'avancement de la pensée théologique et philosophique ». Il reçoit en 2002 le 17ème « Giorgio Levi Della Vida Award » pour l'ensemble de ses contributions dans le domaine de l'étude islamique. Il est également en 2003 lauréat du Prix Ibn-Rushd. Mohamed Arkoun est professeur émérite à Paris III – Sorbonne Nouvelle, associé senior à la recherche à l'Institut d'étude ismaéliennes (The Institute of Ismaili Studies, IIS) et membre du Conseil supérieur de l'administration de l'IIS.