Par Malek SLIM - Pour une majorité croissante de Turcs, l'Occident n'offre rien ou presque à leur pays en contrepartie de tout ce qu'il lui prend. Membre fondateur de l'O.T.A.N, la Turquie - a pour longtemps – constitué un bouclier face au communisme venant de l'Est. Tout le monde se souvient de la crise qui avait opposé, Américains et Soviétiques à cause des missiles déployés par Moscou au début des années 1960 à Cuba, et des risques réels à cette époque d'une confrontation nucléaire, mais on avait peu parlé de l'implication indirecte d'Ankara dans ce conflit. Le marché conclu entre les deux superpuissances pour désamorcer la crise comprenait le démantèlement des bases soviétiques de Cuba, mais aussi celles des fusées nucléaires de l'OTAN – exclusivement américaines – implantées en Turquie. L'engagement occidental de cette dernière était total et sans faille, et elle aurait été la première victime si la crise de Cuba aurait dégénéré en conflit entre les deux blocs ennemis dont celui de Varsovie qui a disparu avec la fin de l'URSS et avec lui l'état de guerre froide qui a plané sur les relations Est-Ouest. Cette nouvelle donne stratégique n'était pas pour ne pas avoir de conséquences sur le futur statut de la Turquie au sein du traité de l'Atlantique Nord. En rapport avec ce changement, la Turquie n'est ce qu'elle était pour les Occidentaux en dépit de la coopération militaire demeurée intacte et de l'accord stratégique signé avec Israël allié et protégé de l'Occident. L'avènement du Parti de la Justice d'Erdogan au pouvoir, n'était pas pour plaire aux Européens et aux Américains, d'autant que ses dirigeants font prévaloir et afficher leurs orientations franchement islamiques. Et ce n'est pas leur discours modéré qui va leur épargner leur suspicion dont ils font l'objet, surtout depuis que Ankara a choisi l'ouverture sur un Orient qu'elle a complètement ignorée depuis qu'Istanbul a cessé d'être la capitale de cet empire Ottoman que la première guerre mondiale a signé l'arrêt de mort. Cette ouverture turque sur l'Orient inquiète beaucoup les chancelleries occidentales, qui y décèlent un virage stratégique d'autant que les dirigeants turcs n'y font rien pour apaiser ces craintes. Leur indulgence quant au programme nucléaire iranien, la nouvelle page dans les relations avec Damas, le soutien a peine voilé pour le Hamas, ne plaident pas pour des rapports de confiance entre Ankara et ses alliés qui, après lui avoir entrouvert les portes de l'U.E, se montrent de plus en plus hostiles à son adhésion. Même le référendum du 12 septembre qui amenda en grande partie la constitution rédigée par les militaires, n'a rien changé de cette attitude suspecte envers une Turquie, qui de son côté voit s'éloigner le jour de son adhésion à une Europe qui ne veut pas d'elle. En échange, aussi bien les dirigeants turcs qu'une grande frange de la population, se montrent de moins en moins enthousiastes à ce projet. Un récent sondage effectué par le Germane Marshall Fond of the United State,publié récemment confirme cette tendance : 38% des sondés estiment, aujourd'hui,que l'adhésion à l'UE est une bonne chose, alors qu'ils étaient 73% en 2004. De plus en plus de Turcs sont pour des rapports encore plus étroits avec les pays du Moyen-Orient. Quant à l'Alliance atlantique, la désaffection est encore plus affichée avec seulement 30% qui sont pour. Des chiffres qui suffisent de tout commentaire sur la foi nouvelle qui anime les Turcs !