Pourquoi la chaise ? « C'était le pendant plastique de mon livre où l'élément siège est très présent. J'aime les objets de manière générale. La chaise peut aussi symboliser plusieurs types de pouvoir. Je l'utilise pour cet aspect là. J'interviens sur l'objet existant. » Le thème de la chaise de Nadia Jelassi ne date pas d'hier, en effet, elle y travaille depuis un long moment avec la rédaction d'un ouvrage de recherche, intitulé « Etats de sièges » dans lequel, elle se préoccupe des sièges représentés dans le répertoire international de l'art moderne et contemporain. Le dossier de la chaise devient alors cadre dans lequel l'image est intégrée. La plupart des chaises n'ont plus d'assises et peuvent nous faire penser à cette citation : Et pour le prix de sa peine au grand vent dispersée / Vont ses papiers servir à la chaise percée. Régnier « Satires » 1608. Les chaises deviennent après l'intervention de l'artiste tour à tour sensuelles, sexuelles, suggestives, blessées, insultées, heureuses, riches, pauvres, décoratives, anecdotiques, chacun peut y voir ce qu'il veut. La chaise est peinte, photographiée, filmée, habillée. Toutes les matières et toutes les formes sont alors présentes dans les chaises. Chaque chaise devient ainsi unique, elle prend des allures de « portrait », elle se personnalise, prend vie et se positionne au devant de la scène. Les images que Nadia Jelassi capte, mêlent la chaise à la quête de souvenirs intimes associées à un regard empreint d'onirisme. On peut y voir une interprétation du voile et du corps de la femme puis du couple. Cette ambiguïté nous interroge, concernant notamment la manière dont on perçoit la vie et fait appel à la relativité des émotions. L'œuvre ou l'installation devient alors à la fois l'espace et l'instrument où le sujet se met en scène, se regarde à distance en train de dévoiler ses zones cachées : sa souffrance, ses angoisses, mais aussi son intarissable instinct de vie et son étonnante détermination. Cette poésie surréaliste du mystère et du désenchantement est nourrie par une vision souvent ironique de la réalité sociale et culturelle du monde contemporain. Khalil Ben Abdallah en artiste invité, intervient au sein de l'exposition de Nadia Jelassi, en parallèle de ses travaux personnels. La série présentée à la galerie est l'aboutissement de 3 ans de travail. « J'avais cette idée de tourner autour de la chaise » Sa dernière exposition se déroulait à El Teatro en 2007 sur le thème de : « Chaise & football ». La vidéo avec laquelle il intervient lui permet d'affirmer que l'on peut davantage développer le concept de la chaise. Avec la 3D on peut réaliser des choses qu'on ne pourrait pas faire en réalité : mettre la chaise en lévitation par exemple. Son œuvre qui s'articule autour de la chaise et des phénomènes de l'intimité psychique, nous conduit avec celles de Nadia Jelassi à des mondes mystérieux liés à la tradition picturale. La propre série de Khalil Ben Abdallah devrait s'exposer en janvier, à Kanvas même, aux côtés de Mehdi Bouanani. Enfin, « Chacun était assis sur un fauteuil, une chaise, un banc, un tabouret, selon son rang ou sa dignité. » Erckmann-Chatrian 1870. L'exposition se prolongera jusqu'au 13 novembre 2010.