Qui pointe son joli museau parmi la faune des prétendants au sacre des Arts Plastiques tunisiens ? Pratiquement personne ! Du moins on n'en voit aucun et ceci parce que faute de chemin précis et fonctionnel à suivre, les autorités de tutelle ont laissé le champ libre à n'importe qui pour faire n'importe quoi. Nous ne voulons signifier aucunement par là qu'il n'y a pas de jeunes espoirs capables d'ancrer le mouvement des arts dans le tumulte moderne et universel. Bien au contraire, beaucoup de ressortissants des grandes écoles méritent largement de lever haut le flambeau de ce secteur. Malheureusement, sortis des écoles, ces derniers sont encadrés par n'importe qui, mêlés à des tas de pseudo-groupuscules naissants et vacillants de jour en jour. Le phénomène des autodidactes est devenu monnaie-courante et certaines têtes de mules convaincues qu'il suffit d'ignorer tout du domaine de l'art pour réussir, là où ceux qui ont poussé leurs études dans cette mer infinie ne peuvent qu'échouer, seront installés fièrement sous les projecteurs virtuels de la reconnaissance en attendant que l'on leur pose délicatement autour de leur grosse tête, leur couronne de lauriers. Le monde de la peinture est sens dessus-dessous et les rencontres inter-professionnelles tournent si souvent aux crêpages de chignons et aux insultes et braquages virils que ceux qui sont éduqués pour aimer l'art, préfèrent se replier sur eux-mêmes laissant ce bazar de bas étage à la meute des coyotes enragés. On a même entendu une ancienne femme de ménage… (avec tout notre sincère respect pour cette profession) dire à un professeur universitaire lors d'une rencontre syndicale : Monsieur, vous êtes professeur. Vous n'avez donc rien à faire ici avec les artistes. Moi je suis autodidacte. Et il y en a certains- qui lui ressemblent- qui l'ont applaudie de toutes leurs forces. Pour elle, et pour eux, ignorer tout du domaine est la seule carte capable de les mener à ses cimes. Drôle d'époque ! Drôle d'époque où tous les éclopés du pinceau, tous les tordus de la ciboulette, toute la racaille racleuse de fonds d'assiettes se réveillent avec le pouvoir en main parce que ceux qui sont censés le détenir le leur ont jeté à la figure, comme un os vulgaire et sans valeur. Allez-y, meutes de coyotes, battez-vous ! Nous nous contenterons de regarder le match. Malheureusement, une fois les provocateurs et les verseurs de fausses ou vraies nouvelles dans les oreilles de ceux qui n'ont même pas besoin de les écouter, puisque ce sont eux qui cousent et décousent toutes les hypothèses et toutes les stratégies bénignes, une fois ceux-là mis à nu et ramenés à leur petite place de moins que rien, il ne reste que l'amertume qu'on ressent chaque fois qu'une discipline artistique est condamnée au chaos, dans ce pays où l'on n'arrête pas de clamer, haut et fort, que l'essor de la société ne peut se réaliser sans celui des arts et de la culture. Qu'on se contente de développer « l'agro-culture » et qu'on se taise. Cela est la moindre des politesses. Car il n'est pas interdit d'échouer, mais il est gravement défendu de tuer ce qu'on ne peut atteindre. Et l'arbre des arts semble trop grand pour les nains de jardin que nous sommes.