Dimanche dernier, les spectateurs fidèles de Nessma TV se faisaient une joie de suivre un entretien avec notre ministre des Affaires étrangères, M. Ahmed Ounaïes. La personnalité du chef de notre diplomatie, sa probité, sa compétence, son sens de l'écoute, son objectivité et surtout, sa riche expérience en la matière laissaient prévoir une joute oratoire du meilleur aloi et un savoureux débat d'idées dont l'importance, en ces temps tumultueux, n'est pas à démontrer. Or, quelle fut leur surprise quand, une fois la présentation de l'homme terminée, le trio de journalistes qui animait l'émission s'est mué petit à petit en une meute de chasseurs lancés aux trousses d'une victime promise à quelque rite expiratoire, sonnant, en fin de programme, le hallali pour participer à la curée. Bref, on nous a convié au spectacle d'un safari africain au terme duquel le prédateur ramenait la crinière d'un lion, le museau d'un ours ou la défense d'un pachyderme, pour s'en vanter à la maison. En cette Tunisie qui se cherche, après une sombre période de barbarie, de féroce criminalité, d'infamie qui donne froid au dos, il faut, tout en sauvant nos valeurs traditionnelles, réécrire notre mode d'être, de vivre, de penser et de s'exprimer, plus conforme aux exigences du civisme, de la civilité et de la civilisation. Effectuer sur une personnalité aussi éminente un tir croisé de flèches perfides, d'allusions sournoises et de propos vexants, ne fait pas réellement honneur au courageux combat mené, en ces temps-ci, par notre pays… D'autant que tout cela a été proféré avec des procédés dignes d'une «dar maâllama» avec clins d'oeil obliques, sourires sournois et même, pour l'un des journalistes, une mine qui se voulait patibulaire à fore de se tourner vers le mur. Le ministre était censé avoir, ce jour-là, à sa disposition, une tribune où il pouvait exposer ses idées et en discuter calmement avec ses interlocuteurs. Or c'est à un véritable tribunal qu'il a eu affaire. Une juridiction dont chaque membre se croyait dépositaire de la Vérité, celle qui n'admet aucune contestation comme le montrent les SMS de soutien qui n'ont pas eu l'heur de plaire à ce corps de «magistrats». Au fait, que reprochaient-ils ces derniers, à M. Ahmed Ounaïes? Tout simplement d'avoir une vision de la diplomatie qui transcende le côté anecdotique, les calculs d'épicier, pour atteindre la crête où se meut le véritable concept de liberté, consubstantiel à celui de démocratie. Peut-être aurait-il fallu que «l'accusé» se montre moins docte dans ses réponses! Mais cela ne porte nullement à conséquence. A moins que tout ce spectacle ne cache quelque sombre dessein à l'endroit d'un homme dont la hauteur de vue commence à gêner. A. Chorfi