Vous les voyez souvent dans la rue ou dans le bus et le métro, des écouteurs collés aux oreilles, l'air absent, absorbés qu'ils sont par la musique qu'ils écoutent sur leur baladeur numérique. Ce sont les jeunes d'aujourd'hui, qui utilisent ces appareils pour écouter la musique qu'ils aiment, ce qui leur permet d'écourter la distance qui les sépare du lycée ou de la fac. Le drame, c'est que ces jeunes ne sont pas conscients des dégâts que ces appareils peuvent occasionner à leur audition, en plus des dangers auxquels ils s'exposent en traversant la rue sans entendre les klaxons, tant le niveau d'écoute est fort. Constat et conseils pour éviter de graves problèmes… Le problème n'est pas nouveau : depuis les vieux baladeurs à cassettes utilisés par les parents de ces jeunes, de nombreux médecins avaient évoqué des problèmes de perte d'audition. Ce qui est nouveau et bien plus grave, c'est que les nouveaux appareils bénéficient des technologies les plus performantes, permettant de les pousser jusqu'à des limites insondables. Déficit de l'audition On estime ainsi qu'un adolescent sur cinq présente un déficit de l'audition et c'est la musique qui est responsable de la majorité des traumatismes auditifs chez les jeunes, notamment à cause du mauvais usage des baladeurs numériques et accessoirement des discothèques. Et si les méfaits potentiels du bruit dans les discothèques sont connus depuis longtemps, la généralisation des baladeurs numériques inquiète les spécialistes. Selon un médecin ORL, « la proportion d'adolescents souffrant d'une perte auditive a augmenté, selon mon observation et celle d'un certain nombre de mes confrères, de près de 20 % depuis quelques années. Et ce sont les moins de vingt cinq ans qui sont les plus exposés, avec de grands risques de surdité partielle ou définitive à long terme… » Et le spécialiste nous donne des précisions sur l'anatomie de l'oreille : « nous disposons d'un capital auditif à la naissance de 15 000 cellules auditives par oreille. Le problème c'est qu'une fois que ces cellules sont touchées, elles meurent et ne se régénèrent plus. Les dommages causés par une exposition sonore trop élevée et prolongée sont donc irréversibles, d'où l'importance de la prévention... » Plusieurs jeunes utilisateurs de baladeurs nous ont affirmé « avoir déjà ressenti des bourdonnements d'oreilles », ce qui constitue l'un des symptômes révélateurs de la fatigue auditive. Et si l'on considère, à juste titre, que les troubles auditifs touchent surtout les personnes âgées, les jeunes semblent de plus en plus nombreux à subir de dégâts, essentiellement à cause des expositions sonores trop élevées dont ils sont les victimes consentantes. Notre médecin ORL estime que « cette perte auditive est le résultat à la fois du niveau sonore auquel les jeunes écoutent leur musique, mais aussi de la durée d'exposition ». Une inquiétude dont les causes principales sont les nouveaux baladeurs numériques dont les capacités de stockage sont de plusieurs heures, invitant à une écoute de longue durée. Les troubles La plupart des jeunes reconnaissent écouter quotidiennement la musique sur leur baladeur numérique pendant deux heures en moyenne. Les plus jeunes, entre 16 et18 ans sont les plus accros, avec une écoute moyenne de plus de deux heures. Or selon le médecin, « l'écoute de la musique en continu fatigue l'oreille, en plus du fait que les jeunes qui ont recours aux baladeurs numériques sont souvent ceux qui l'écoutent le plus fort, causant des dommages irréversibles. Ce que je crains, c'est une augmentation des troubles auditifs à long terme. » Les dommages causés par les boîtes de nuit ou par les concerts sont le plus souvent aigus, mais ils ne persistent pas, alors que l'usure auditive provoquée par les baladeurs numériques se fait de façon lente et insidieuse. Ainsi, les effets sont souvent faibles sur le moment mais s'additionnent dans le temps, avec des conséquences qui surviennent plusieurs années plus tard. Or trop d'idées reçues persistent chez nos jeunes qui pensent que les troubles auditifs sont temporaires et qu'on peut les traiter facilement. Pourtant un traumatisme sonore intense peut provoquer instantanément un déficit auditif à vie : explosion, bruit violents répétés... « Des lésions et même la mort des cellules auditives, précise le spécialiste, se manifestent alors de trois façons : une surdité, des bourdonnements d'oreille, ou acouphènes, et parfois une hyperacousie, c'est-à-dire une hypersensibilité au bruit. Les atteintes auditives peuvent ainsi se traduire par une surdité temporaire ou permanente. Dans ce cas, on parle de perte auditive, avec différents niveaux de perte : léger, moyen, sévère... » Inconscience Il y a aussi un problème auquel on pense peu, mais qui est visible dans nos rues : la plupart de ceux qui utilisent les baladeurs numériques ne sont plus conscients de ce qui se passe autour d'eux. On a souvent vu des jeunes traverser la route, alors qu'une voiture klaxonnait, ou qu'un métro passait en actionnant ses clochettes. D'ailleurs même lorsqu'on parle à ces jeunes, ils n'entendent rien et ils sont obligés d'enlever les écouteurs avant de vous répondre… Les autorités sanitaires devraient s'attaquer à cette question, notamment en demandant aux importateurs d'imposer aux fabricants des appareils bridés, avec un niveau sonore maximal ne dépassant pas les 80 décibels. Les médias, les parents et les enseignants devraient également inciter les jeunes adolescents à changer de comportement et à réduire le volume sonore de leurs appareils.