• Hors de prix ou trop cher durant toute l'année, pour 85% des foyers tunisiens et, au delà des considérations religieuses, l'Aïd El Idha fait monter l'adrénaline gargantuesque - Après une fugace amorce de relâchement, accueillie, alors, favorablement par certains ultra– modernistes, la tradition de sacrifier un mouton vivant à l'occasion de l'Aïd el Idha (fête du sacrifice) connaît, en Tunisie, un retour en force, au détriment de l'achat symbolique de peu de viande prête à la consommation pour la circonstance. Selon une récente enquête officielle, 85% des familles tunisiennes déclarent être attachées aux coutumes liées à l'Aïd Al Idha, en particulier celle relative à l'achat et au sacrifice d'un mouton vivant ou quelques bêtes du genre, veau, chevreau, camélidés. Mais, l'enquête ne spécifie pas les raisons de ce « rétablissement », ses auteurs l'attribuant tacitement et exclusivement, à tort, semble-t-il, à des considérations d'ordre religieux Or, comme nous l'ont dit certains citoyens informés, au-delà de l'idée religieuse, beaucoup de familles, en Tunisie, sacrifient, aujourd'hui, délibérément, des moutons et autres bêtes du genre, pendant l'Aïd Al Idha, tout simplement, pour manger de la viande rouge, devenue inaccessible aux bourses moyennes à cause de la cherté de ses prix. Le kilo de viande bovine et ovine se négocie à plus de 14 et 15 dinars et atteint davantage pour certaines parties. Le foie d'agneau est vendu à 24 dinars le kilo, contre 16 et 18 dinars pour le kilo de foie de veau. « Franchement, le mouton de l'Aïd nous offre, annuellement, une heureuse occasion pour reposer nos pauvres ventres de la viande de poulet, la seule viande restée à la portée des familles moyennes, et pour nous rassasier, au passage, l'espace de quelques jours, de viande rouge fraîche, sans oublier le foie, les rognons et autres abats dont les gens raffolent, nous a déclaré un citoyen. « Comme vous le savez, les prix de viande bovine et ovine sont devenus, ces derniers temps, inabordables, pour les bourses moyennes, tandis que le poisson est, depuis longtemps, inaccessible », a-t-il ajouté. Et d'enchaîner, « puis, la viande des moutons et des bêtes sacrifiés pendant l'Aïd Al Idha est une viande fraîche, introuvable partout ailleurs ». A cet égard, un commentateur a dit soutenir solidement cette attitude. « De tout temps, a-t-il affirmé, et contrairement à des fausses interprétations du rite, Les moutons et autres bêtes du genre sont sacrifiés durant l'Aïd Al Idha pour être mangés et permettre aux gens de changer leurs menus ordinaires, autrefois composés, généralement et à longueur d'année, de plats frugaux, à base de légumes et de feuilles vertes. Ces grandes occasions leur permettent de se rassasier de viande et d'en prendre leur dose, pour ainsi dire ». « Mais, apparemment, a-t-il relevé, à l'ère de la surconsommation et sous le coup des caprices du marché, nous retournons à ces anciennes situations où la prise de viande était ritualisée, c'est-à-dire, limitée à certaines grandes occasions ponctuant la vie des gens, sous forme de festins collectifs, rassemblant tous les membres du groupe. D'ailleurs, les événements importants et décisifs de la vie individuelle et collective sont marqués par l'organisation de pareils festins.'' Dans ces conditions, on comprend mieux que très peu de gens soient enclinés à suivre les conseils des médecins, pour une modération dans la consommation de viande pendant l'Aïd Al Idha. Il s'agit, pour eux, d'un besoin physiologique longtemps insatisfait et subitement réveillé, par la première bouchée de viande rouge.