Par Khaled Guezmir - Les temps modernes constituent-ils les derniers soupirs des combattants de la lutte armée et celle-ci peut-elle encore mobiliser les défenseurs de la liberté ? Difficile à trouver une réponse ! En d'autres termes, y a-t-il un avenir pour ces « héros » qui offrent leur vie pour un rêve, pour des causes justes comme un Guevara, un Mandela ou un Arafat ! Il fut un temps où ces combats pour la libération des nations et des peuples soumis, soit à la colonisation, soit à la dictature donnaient un sens aux sacrifices suprêmes de ces personnalités hors du commun qui s'apparenteraient aujourd'hui plus à la fiction qu'à la réalité ! Le monde, a-t-il évolué de façon irréversible vers plus de justice et de liberté pour décourager les nouveaux porteurs des rêves anciens ? Certainement pas ! La colonisation a, certes, régressé mais elle persiste soit matériellement et physiquement, comme en Palestine, soit sous des formes plus pernicieuses avec la domination et la séquestration de la plupart des ressources vitales de la planète par une combinaison subtile entre les multinationales et les systèmes qui les protègent. La liberté, elle aussi a, certes, progressé mais le despotisme persiste. Il est tout de même vrai que l'étape de construction nationale, des Etats centralisés post-coloniaux s'achemine vers l'établissement de systèmes mixtes et de transitions qui annoncent une évolution vers une plus grande institutionnalisation, où les structures de l'Etat trouvent une plus grande souplesse fonctionnelle et deviennent plus autonomes. A titre d'exemple, la séparation des pouvoirs, l'indépendance de la justice, les mécanismes de contrôle de l'exécutif et la diversité médiatique, gagnent du terrain malgré certaines critiques qui reprochent au phénomène sa lenteur. Il est évident qu'en politique l'évolution a toujours été relativement lente parce qu'il s'agit de réformer ou de changer des comportements collectifs, et des héritages culturels souvent réfractaires à cette évolution. En fait, ce qui a vraiment changé dans le monde c'est une certaine aspiration au bien être et au confort qui tend à se généraliser et à toucher les catégories les plus démunies des populations. Celles-là même, qui étaient les véritables « réservoirs des révoltés » de la liberté et de la justice. On a l'impression que l'idéologie « révolutionnaire » ne mobilise plus les nouvelles générations pas plus que l'action « militante ». Il y a quelque part une « paresse » vaporeuse, telle un brouillard humide, qui enveloppe les jeunes d'aujourd'hui et limite en eux l'expression et l'adhésion à la violence politique. Ce cheminement peut être certainement favorable, malgré son aspect démissionnaire au développement de la démocratie qui ne peut pas fleurir dans l'anarchie ou la guerre civile. Il reste à déchiffrer, quand même, les raisons de l'exception arabo-musulmane à cette évolution planétaire dont la Chine, l'Asie du Sud-Est, et surtout l'Amérique latine, constituent la meilleure expression! A notre avis, le monde arabo-musulman est encore l'espace le plus exposé aux tensions internationales et aux appétits de la nouvelle domination coloniale des principales grandes puissances et pas seulement de l'Occident ! Par ailleurs, une bonne partie des pays qui en forment l'espace, vivent encore une sorte « d'adolescence tardive et prolongée » dans la construction nationale des Etats et surtout de l'évolution institutionnelle des sociétés. Ces retards chroniques combinés avec le déficit immunitaire de ces pays et leur perméabilité excessive à l'intervention des forces étrangères, seront à la base des crises graves qui s'annoncent et qui peuvent aboutir à leur démembrement ! La sagesse même dans ces cas, c'est de prévenir plutôt que guérir !