Voilà donc que l'Equipe nationale est sommée de s'immoler sur l'autel du ridicule. Il y a quelque temps, chacun en revendiquait l'appartenance exclusive. Maintenant, que les déboires ne se comptent plus, l'impression qu'on donne autour d'elle est celle d'un médecin qui se dérobe parce que la famille du patient a découvert que le diagnostic était faux. La fédération – et pas Ali Hafsi, tout seul - donne exactement cette impression. Incapable de remonter jusqu'aux origines du mal. Manquant de courage pour reconnaître l'impardonnable tort de cécité face à une dégradation pourtant « bruyante » de la situation, jour après jour. Assez culottée, enfin, pour nous sortir l'éternelle berceuse, à savoir que la non-qualification à la CAN ne serait pas la fin du monde. Au nom de qui parlait Ali Hafsi sur le plateau de Moëz Ben Gharbia ? En tous les cas, pas au nom de dix millions de Tunisiens, frustrés parce que viscéralement attachés à leurs couleurs nationales. Car, cette désaffection, perceptible au stade, ne signifie pas indifférence. Elle distille un message de rage. Sur ce plan, les intervenants à l'émission se sont quelque part plantés. Sans doute, Marchand n'est-il toujours que l'homme-fusible par prédestination. Et apparemment, M. Hafsi, l'a confirmé ouvertement. Pire : il en appelait à un professionnel – qui n'a pas d'état d'âme par définition et qui n'est pas obligé d'être forcément un gentleman - certain, qu'il rendrait lui-même le tablier à la prochaine défaite ! Voit-on Marchand renoncer à un contrat de deux ans ? N'en a-t-on pas bavé avec Lemerre quand il était indésirable et encombrant ? Et, finalement, M. Ali Hafsi ne se leurre-t-il pas lui-même, espérant en un altruisme (qui serait surprenant), de la part d'un entraîneur dont on connaît l'habilité contractuelle à ficeler ses employeurs ? Les dérapages verbaux chez Moëz Ben Gharbia donnaient réellement le tournis. D'abord, cette affirmation : « et alors, quel problème y a-t-il à rater une CAN »… Puis, un revirement à 180 degrés : « Ce serait une catastrophe si on ne se qualifiait pas pour la CAN ! ». Dans son petit coin, tranquille, Marchand observait correctement mais aussi avec un zeste d'ironie : « En 2005, le niveau du championnat était correct. A mon retour en Tunisie, il a baissé »… Et il ajoute : « On ne peut pas prétendre à une bonne équipe nationale si elle n'est pas composée de joueurs évoluant en Europe». Cela s'appelle : noyer le poisson. Et par une habileté froide, cynique même, M. Marchand faisait chavirer le plateau de Ben Gharbia. Il jetait, en l'occurrence un sérieux pavé. Du coup, il renverse la situation en sa faveur. En termes simples, il voulait nous dire ceci : « Vous avez l'équipe nationale que vous méritez ». Soit. Limitons-nous à répondre ici, à notre tour, que nous avons le Marchand que nous méritons. Ce n'est pas de sa faute. Cela dit, il a été question de patriotisme. Le maillot national (l'a-t-on oublié?) est un honneur pour celui qui le porte. Pas besoin, néanmoins, de mêler primes et sens du devoir. Et puis, l'équipe nationale, formée d'expatriés, est un vecteur raffermissant la fibre nationale. Evitons, donc, les mauvais procès sur le patriotisme R.K [email protected]