• Un repère : l'expérience britannique - Le système bancaire et financier tunisien a le vent en poupe. Les mesures de restructuration et de refonte de l'architecture bancaire et financière caracolent tout haut. Le processus de redéploiement avance lentement mais à pas sûrs, comme l'affirment les observateurs et les professionnels du métier. Toutefois, l'objectif de faire de la Tunisie un pôle régional financier mixé à la rivalité avec les pays voisins nécessite indubitablement une accélération des efforts de restructuration. Quels sont les clés de succès du secteur bancaire et financier tunisien ? Quand la Tunisie pourra-t-elle devenir un hub ou un pôle financier régional ? Quels exemples à transposer de la Cité financière de Londres et quelles axes de coopération possibles avec la « City » ? Telles sont les principales questions débattues hier par les éminents participants à la conférence organisée à l'initiative de la Chambre tuniso-britannique du Commerce et de la Banque Centrale de Tunisie. La convertibilité du dinar, l'amélioration du cadre réglementaire, la restructuration structurelle, l'augmentation de la taille du marché bancaire et l'accès à de nouvelles niches de services bancaires dont la Finance islamique sont les maîtres-mots. Les hauts cadres de la Finance réunis en marge de la conférence ont affirmé à l'unanimité la dynamique que connaît actuellement le marché financier tunisien comme en témoigne l'accélération du rythme des réformes entreprises en la matière. La convergence vers la convertibilité totale du dinar et les perspectives de création d'un holding spécialisé pour les PME baptisé « Moubadara » outre la création d'un pôle tuniso-libyen et le projet de fusion entre la Banque de l'Habitat et la Société Tunisienne de Banque, sont autant de mesures militant pour un système bancaire et financier habilité à être au diapason des standards internationaux et capable de séduire des bailleurs de fonds hétérogènes. M.Taoufik Baccar, Gouverneur de la BCT a passé en revue les grandes lignes de la démarche progressive et pragmatique poursuivie par l'autorité de contrôle et d'émission sur la voie de la libéralisation financière, tout en mettant l'accent sur les performances réalisées dans le secteur notamment en ce qui concerne l'émergence d'un marché bancaire plus étoffé, la capacité de résilience du secteur face aux chocs exogènes, l'accroissement du taux de bancarisation de l'économie et l'amélioration des indicateurs de base du secteur. Le Gouverneur de la BCT a par ailleurs salué la louable initiative conduite par la Chambre tunsio-britannique de Commerce en vue de renforcer les liens de coopération avec « La City ». Dans ce même ordre d'idées, la représentante de l'Ambassade de la Grande-Bretagne en Tunisie a salué la revitalisation du marché financier tunisien en espérant un renforcement de la coopération bilatérale dans le secteur financier. Trois postulants Actuellement, Tunis, Casa et le Caire sont les trois postulants pour devenir un Hub régional ou une place financière régionale. La concurrence bat son plein et aux acteurs du secteur financier d'agir vite et bien. M. Robert Tashima, Rédacteur en Chef à Oxford Business Group, a apporté quelques plans d'actions indispensables dont : l'amélioration du cadre réglementaire, la stabilité du secteur financier, la poursuite de la démarche de privatisation tout en ciblant des services spécifiques tels que les banques islamiques et les banques off shore. La problématique ne réside pas dans l'aptitude de la Tunisie à devenir une place financière régionale, mais il est plutôt question de temps. « Mis à part le problème de taille du marché qui reste l'un des tares majeures du secteur, la Tunisie a la capacité de servir de Hub régional », affirme M.Tashima. La taille de marché et la concentration des institutions bancaires financières bancaires et non bancaires au sein d'un même pôle ou centre est un facteur déterminant de l'essor du secteur financier. M.Phillipe Gautier, expert anglais a parlé de l' « effet du groupe » qui caractérise la place londonienne. Selon lui : « c'est la polarisation du marché financier qui a fait la force de la City of London ». Et c'est cette réussite de l'expérience britannique à laquelle M.Gautier a appelé à méditer. Pour ce qui est des perspectives de coopération tuniso-britannique notamment dans le secteur financier, le spécialiste financier a assuré que la coopération en matière de formation entre les deux pays est déjà opérationnelle. Pour les autres axes de coopération, M.Gautier a mis en exergue la coopération historique entre la Tunisie et les pays de l'Europe Continentale. Une coopération qui délimite le champ de partenariat avec les pays anglo-saxons. « Pour ce qui est de la coopération financière, ça va prendre du temps, mais ça va arriver un jour », avance l'expert financier. Pour séduire la place londonienne et les investisseurs londoniens, des facteurs doivent êtres réunis dont l'existence de fonds de pension importants et de la liquidité. Beaucoup de choses à revoir M.Jamel Larbi, directeur du département « Afrique du Nord » de la banque d'investissement Bank of America /Merril Lynch-London, a appelé à considérer les banques d'investissement comme des front-office, à consolider davantage les assises financières des institutions de crédits, à améliorer les facteurs de transparence financière et de réglementation juridique et à étudier les possibilités de coopération dans les domaines de télécom, de transport et de biens. En effet, et pour finaliser le processus de restructuration du système bancaire et financier tunisien dans la voie de faire de la Tunisie une place financière régionale, il y a encore du pain sur la planche. Malgré les progrès et les performances réalisées par le secteur financier, « il reste beaucoup de chose à revoir », comme l'a affirmé M.Mohammed Rkik, Directeur de la Supervision bancaire au sein de la Banque Centrale de Tunisie. « Il faut apporter une certaine rationalité dans l'intervention de l'Etat et mettre un peu de l'ordre ». Parmi les axes à revoir on notera : les problèmes de ressources bancaires, de taille réduite, d'exigence de rentabilité, la présence de l'Etat dans les Banques mixtes qui reste à méditer, la conformité aux règles de Bâle II, la convertibilité du dinar et la relation conflictuelle entre les PME et les banques. Yosr GUERFEL AKKARI ----------------------------- Robert Tashima, Rédacteur en Chef à Oxford Business Group « L'off shore et la finance islamique : de sérieuses niches à exploiter » La Tunisie a pu développer un système financier sophistiqué. Mais pour devenir un hub régional et dépasser la concurrence, elle doit se focaliser sur la recherche de niches spécifiques et jouer sur ses avantages compétitifs. L'off shore et la finance islamique pourraient êtres de sérieuses niches à prospecter. Par ailleurs et pour ce qui est du projet colossal de construction du pôle financier, la concentration physique des banques et des institutions financières au sein d'un même centre ou pôle ne peut que renforcer l'engagement des investisseurs étrangers et des bailleurs de fonds étrangers. S'agissant des autres axes de coopération, il y a plusieurs potentialités. La Tunisie est forte d'une économie diversifiée. Entre industrie, finance et transport, il y a d'autres secteurs de coopération à fructifier entre la Tunisie et la Grande Bretagne outre l'énergie. Il est question de promouvoir la Tunisie en tant que pays d'accueil des investissements étrangers » Y.G.A ----------------------------- Jamel Larbi, directeur du département « Afrique du Nord » de la banque d'investissement Bank of America /Merril Lynch-London : « Penser à la création d'une bourse off shore » «La Banque Centrale de Tunisie est très proactive. Les mesures engagées par l'institut d'émission ont des mesures progressives mais qui vont dans le bon sens. Entre autres, la loi sur la sécurité financière, l'anticipation des règles de Bâle II, hormis la fusion prévue entre la STB et la BH et l'amélioration des indicateurs bancaires de base tels que l'amélioration du taux de couverture, la baisse du ratio des crédits non performants ou encore des créances accrochées. Mais pour devenir un hub régional, il faut attaquer le front office, assurer une flexibilité du taux de change, améliorer le cadre réglementaire et pourquoi pas penser à créer une bourse off shore »