Le vieux principe de droit énonçant que le pénal tient le civil en l'état était à l'origine dans le but d'une bonne concordance entre la décision du juge pénal et celle du juge civil. En effet, il n'est pas sensé que quelqu'un soit condamné à des dommages intérêts au civil pour des fautes alors qu'il pouvait être relaxé au pénal. Cette prééminence de l'action publique sur l'action civile, est dans le but de mieux préserver le principe de l'égalité de tous devant la loi. Peut-il être dérogé à cette règle ? Dans les cas de délits involontaires le juge civil saisi d'une demande d'indemnisation, statue sans attendre qu'il soit statué sur le plan pénal. A plus forte raison quand la procédure pénale est jugée dilatoire, et ce dans le cas où l'intéressé fait appel à un jugement le déclarant coupable. En est-il de même pour les décisions contentieuses privées, telles que celles prononcées par une commission arbitrale ou par un conseil de discipline ? Si selon une certaine jurisprudence française (cassation du 25 octobre 2005) ce principe ne s'impose pas aux arbitres, il n'en est pas de même quant aux décisions émanant du conseil de discipline. Ce dernier siège en commission paritaire composée entre autres de délégués syndicaux assurant la défense du travailleur, objet de poursuites disciplinaires. Aux termes de l'article 38 du code du travail, ladite commission propose des sanctions disciplinaires pour l'ensemble des travailleurs. Cependant et selon le même article son intervention ne fait pas obstacle pour que les parties portent le litige devant les tribunaux. Dans le cas d'espèce, le travailleur accusé d'abus de confiance par son employeur, a été licencié, suivant proposition de la commission disciplinaire, siégeant toutefois avant que le tribunal correctionnel n'ait statué sur son cas. Le travailleur en question peut d'ores et déjà intenter une procédure pour licenciement abusif. En effet, l'accusation dont il a fait l'objet, et qui a été, selon l'employeur la cause du licenciement pour faute lourde, n'a pas encore été établie, puisque le tribunal correctionnel, n'a pas encore statué. La décision de licenciement est intervenue préalablement à celle du tribunal correctionnel, où le travailleur a été poursuivi pour abus de confiance. Entre-temps le juge des prud'hommes, doit-il surseoir à statuer jusqu'à décision du tribunal correctionnel ? La réponse serait plutôt par la négative, quand bien même le travailleur serait déclaré coupable, l'employeur ayant pris la décision de le licencier, sans se soucier de prouver qu'il était l'auteur du délit présumé.