Durant la matinée du mercredi dernier, j'ai parcouru tous les kiosques de journaux, les vendeurs ambulants, des journaux situés à Lafayette, à la recherche des deux quotidiens Assabah et le Temps. Aucune trace et réponse cinglante et unanime. « Nous ne vendons pas ces journaux parce qu'ils appartiennent à Sakher El Materi ». J'ai beau rétorquer que l'intéressé a déjà quitté le pays et qu'il n'en n'est plus en conséquence le propriétaire et que même son nom n'existe plus sur le générique des deux journaux. Mais en vain, rien n'y fut. Obstination aveugle – raisonnement absurde et argument et prétexte futiles. Entre temps, des manifestants protestent et réclament avec véhémence la dissolution du RCD et le départ sans attendre de certains nouveaux membres du gouvernement transitoire et appartenant au parti de l'ancien pouvoir Reste alors qu'il faudrait faire la part des choses : A ce que je sache. L'institution de Dar Assabah a ses racines nationales et patriotiques, son fondateur feu Habib Cheikhrouhou appartenait à la classe laborieuse du peuple et a bâti cet édifice à la force de se bras. Comme il a aussi participé en ce qui le concerne à la lutte du mouvement national en ouvrant largement les colonnes de son journal aux écrits du leader feu Habib Bourguiba et ses compagnons pour faire parvenir haut et fort les appels à la résistance populaire et organiser la lutte nationale pour la libération du pays alors que le peuple entier croupissait sous le joug du colonialisme. Pour ce qui est du journal – Le Temps – les mémoires me semble-t-il deviennent courtes et très courtes même où alors les gens sont victimes d'une myopie partisane ou alors, frappés d'une ingratitude latente et inguérissable. Le journal « Le Temps » a eu le mérite de faire véhiculer les premiers balbutiements d'une démocratie jeune et audacieuse emmurée dans un silence assassin et asphyxiant et là j'en suis témoin, un témoignage d'un contemporain, ayant vu la naissance de ce journal, salué en cette époque comme un évènement exceptionnel. Comme il nous a permis à nous autres jeunes au cours des années 70 et 80 (années d'or), appartenant à la classe laborieuse des travailleurs aussi bien qu'à celle de l'élite estudiantine et universitaire de faire entendre nos voix et nos revendications haut et fort. A Dar Assabah et au journal Le Temps existent des gens, vos semblables et qui sont aussi des Tunisiens comme vous « ni gros ni gras », ils sont vos concitoyens et qui s'attellent de jour comme de nuit à faire parvenir la bonne nouvelle qui, par la plume, qui à travers les services techniques jusqu'à des heures tardives, durant des nuits érosives et érodontes. Ils subviennent à leur quotidien, et ils ont des charges sociales et familiales, ils ne sont que des salariés qui ont des engagements à honorer à chaque fin de mois, des bouches à nourrir, ils souffrent autant que vous. Ne pas vendre ces journaux, signifie fermer la boîte et mettre à la porte des centaines de personnes. Quant aux manifestations, il est temps de quitter la rue, de laisser les gens vaquer sereinement à leurs occupations, l'heure devrait être à l'apaisement. Donner le temps au nouveau gouvernement d'accomplir sa besogne. Tout un chantier est là, que chacun regagne sa place (écoles, facultés…). Nous savons que votre acte a été salutaire, à trop vous embobiner et vous porter aux nues ne pourrait être que néfaste pour la suite des événements. Occuper la rue éternellement ne pourrait mener qu'au chaos et à l'anarchie.