Ils étaient plusieurs à manifester un certain 14 janvier. Ce n'était pas la révolte du pain de 1984, c'était une révolte politique où des milliers de Tunisiens ont battu le pavé pour revendiquer leur droit à une vie digne. Depuis, les doléances des uns et des autres ont rempli les colonnes des journaux et animé les débats télévisés les plus houleux. Les boulangers n'étaient pas en reste, puisqu'ils ont exprimé leur mécontentement en s'organisant le samedi 12 février, dans le cadre d'une manifestation ayant sillonné les rues et les ruelles de la capitale, menaçant d'une grève sauvage dans les jours qui viennent. Il n'en fut aucunement le cas. Pour en savoir plus, nous avons contacté M. Brahim Salmi, le Secrétaire général des employés des boulangeries qui nous a parlé de la situation désolante des employés. " Nous demandons à ce que la loi soit appliquée " nous dit notre interlocuteur qui continue " Je suis contre la grève des boulangers parce que c'est un secteur stratégique. Mais encore faut-il que les instances publiques nous prêtent oreille et qu'ils regardent avec beaucoup plus de considération la situation des employés. Il est des boulangers qui travaillent sans couverture sociale, d'autres sont payés le 10 et jamais le début du mois. Les employeurs ne respectent pas, à quelque exception près le jour de repos hebdomadaire pour leurs employés, lesquels sont obligés de travailler des heures supplémentaires sans pour autant être payés en conséquence. Certains travaillent 14 heures par jour. " M. Mohamed Bouannani, le Président du syndicat des employeurs a donné un autre son de cloche en s'exprimant sur la radio nationale, suite à la manifestation des boulangers, en niant en bloc que les employés sont sous la coupe de leurs employeurs, ajoutant que les boulangers sont traités d'une manière correcte comme l'exige le code du travail. Cette déclaration radiophonique a suscité la colère de certains boulangers qui ont choisi de s'adresser aux journaux de la place pour exprimer ce qui pèse sur leurs corps et leurs esprits. Etant dans le besoin, Abdessalem Azzouni, une maîtrise en sciences techniques et physiques appliquées, (ESTT de Tunis) a fini par travailler dans une boulangerie. Notre interlocuteur qui ne voit aucun inconvénient à vivre de la sueur de son front nous confie que la question revient aujourd'hui à regarder ces gens qui ont toujours été au bas de l'échelle " Les laissés-pour-compte du temps de Ben Ali continuent à en baver du gouvernement de transition. Les responsables qui n'écoutent pas, les agents de contrôle corrompus et le cortège des dépassements persistent et on a l'impression que rien n'a changé. " fait-il remarquer avant de conclure, " Les jeunes tunisiens ont opéré une révolution avec des slogans portant sur le pain et l'eau. Le pain est vital pour nous. Les boulangers ont travaillé pendant les jours de la Révolution pour assurer le pain des Tunisiens. Moi-même j'ai travaillé en tant que bénévole dans la boulangerie de mon quartier pendant ces temps. Mais personne ne nous prend au sérieux, car les employeurs nous surexploitent au vu et au su de tout le monde et personne ne réagit. " Les conditions d'hygiène dans les boulangeries et la nécessité d'observer des normes précises de travail, sont parmi les autres urgences à assurer. Il y a du pain sur la planche.