Raouf KHALSI - « Liberté », « dignité » : deux mots diaboliques, subversifs dans la « culture » des dictatures arabes. Hichem Alaoui (cousin de Mohamed VI), un prince libéral et démocrate, déclarait sur le plateau de « Mots croisés » - juste après la chute de Ben Ali puis celle de Moubarak – que, « désormais on ne parlera plus, il n'y aura plus d'exception arabe ». Exception arabe ? Oui dans le sens où le monde arabe n'a jamais intégré les valeurs universelles de droits de l'homme et de démocratie. La décolonisation aura servi, partout, de prétexte à un verrouillage systématique de la vie publique, parfois travestie en pluralisme de façade comme c'était le cas chez nous, ou alors au nom d'une idéologie taillée sur mesure pour l'Etat Leviathan, centralisateur et oppresseur. Juste après la chute de Ben Ali et aux derniers jours de Moubarak, Bachar Al Assad a eu une déclaration dédaigneuse : « La Syrie est prémunie contre la contagion tunisienne et égyptienne ». Au nom de quoi ? Du Baath, le parti –Etat, ou l'Etat-parti ? Au nom d'une constitution qui a été remodelée en une nuit pour qu'il succède à son père, dont l'Histoire n'oubliera pas qu'il avait rasé son village natal Hama, pour mater une « rébellion » chiite » ? Le problème – récurrent – et endémique au monde arabe c'est que ses dictateurs croient pouvoir tout régler avec des augmentations de salaires et des promesses d'emploi. Ils ne se disent jamais qu'il y a autre chose : la démocratie, la dignité humaine, l'égalité, les élections libres, la voix du peuple en somme. Cela, ils ne sauraient le donner, car ce n'est pas dans leur culture. N'est-ce pas malheureux qu'un Etat-voyou comme Israël se targue d'être « la seule démocratie dans ce Moyen Orient où la liberté reste une incantation fantasmée, réduite au silence, sinon réprimée dans le sang. Et si le régime baâthiste d'Al Assad, ami de l'Iran chiite – tout en se proclamant sunnite – n'était finalement qu'un tigre en papier ? En tous les cas quelque chose résonne. Comme un glas qui sonne…