Hier a eu lieu la deuxième des quatre séances quotidiennes décidées la veille par le Conseil de l'Instance supérieure pour la réalisation des objectifs de la Révolution, de la réforme politique et de la transition démocratique, elle était très agitée. Au début, on a distribué aux membres le texte définitif du projet de loi relatif à la constitution du Conseil Supérieur Indépendant des Elections. Il a été remanié suite aux suggestions avancées lors de la première séance. Demain, il fera l'objet de vote. Ensuite, le Président du Conseil, Monsieur Yadh Ben Achour, a voulu passer à la discussion de la deuxième loi, concernant l'Assemblée Constituante. Là, il était confronté au véto de tous les membres: ils ont exigé que la question du limogeage du Ministre de l'Intérieur et la nomination d'un rcédiste à sa place soit traitée de nouveau. On n'a pas tari de critiques sur la décision du Premier ministre et sa manière d'agir. Pour calmer les esprits, le président du Conseil a rassuré tout le monde que le Premier ministre serait là lundi à 14 heures pour s'expliquer sur la question, initialement sa présence était prévue pour le vendredi, mais comme il avait des occupations, il a reporté cela à plus tard. A 17 heures et après un débat assez chaud, on a observé une pause. Puis, on s'est penché, le temps qui restait, sur le deuxième projet de loi concernant l'Assemblée Constituante.
L'indignation
Cette vive riposte des membres du Conseil relativement à la décision inexpliquée du limogeage s'était déjà animée depuis hier. Au cours de cette réunion qui a duré près de quatre heures, plusieurs questions ont été débattues. La première était bien sûr celle relative à la révocation du Ministre de l'Intérieur, Farhat Rajhi, la seule figure populaire au sein du gouvernement, d'après certains. L'indignation était générale, tous les membres du Conseil ont dénoncé cette mesure dans laquelle ils ont vu une violation du décret présidentiel relatif à l'accord conclu entre cette instance et le gouvernement concernant l'activité gouvernementale et les consultations entre les deux parties à propos de la politique suivie.
La convocation du Premier ministre
Le remaniement qui a touché un ministère de souveraineté nous fait revenir à la case départ ont estimé certains, puisque le nouveau patron de l'intérieur a déjà exercé sous le régime de Ben Ali et dans la même institution en tant que chef de cabinet. On y voit le spectre du premier gouvernement Ghannouchi qui était d'ailleurs le contexte dans lequel on a fait venir Rajhi pour suppléer à Friâa qui était contesté pour son appartenance au RCD. Cette manière d'agir du gouvernement a estomaqué les membres du Conseil, selon certains intervenants, elle va susciter la colère de l'opinion publique nationale. Ils ont également exprimé leur étonnement concernant la coïncidence entre le limogeage et la décision de justice relative à la dissolution de RCD. Une décision à l'unanimité a été prise pour convoquer le Premier Ministre et lui demander des explications sur la question au cours d'une séance du Conseil d'ici la fin de la semaine.
L'organisation de l'information
Les débats ont ensuite porté sur le projet de loi du Conseil Supérieur Indépendant des Elections. La plupart des interventions ont mis l'accent sur l'importance de la souveraineté du pacte national démocratique et son adoption par vote parallèlement aux lois du conseil Supérieur des Elections et de l'Assemblée Constituante. D'autre part, certains intervenants ont souligné la nécessité d'organiser les campagnes électorales sur une base égalitaire en donnant les mêmes chances à tous les candidats surtout au niveau de l'information, puisqu'on en voit certains devenir de vraies vedettes en raison de leur médiatisation, ce qui est un début de campagne, alors que d'autres restent encore dans l'anonymat. Le secteur de l'information doit être révisé, d'après eux, son organisation devient une urgence. Dans ce contexte, on a exprimé la détermination d'interdire l'exploitation des espaces administratifs, ceux de culte et autres pour la propagande politique et la campagne électorale.
Non à la discrimination !
Concernant les conditions d'éligibilité, un bon nombre d'intervenants ont fait savoir leur refus catégorique de tout rétrécissement relatif à la nationalité tunisienne visant les citoyens ayant une double nationalité. Une telle mesure, estiment-ils, nous rappelle la méthode de Ben Ali qui ôtait la nationalité à tous ceux qui étaient condamnés pour crime de haute trahison qui n'étaient autres que les opposants à son régime comme tout le monde sait. Le nombre de nos compatriotes résidant à l'étranger est estimé à 1 500 000, ce qui représente 12% de la population. Ils s'intéressent à la question nationale et sont disposés à participer à l'opération politique malgré les distances qui nous séparent et la différence des occupations, ils méritent toute notre considération, ont ajouté les intervenants dont certains ont proposé avec humour de leur accorder des bonus pour leur bonne volonté et les sacrifices qu'ils consentent.
Le rôle des observateurs
En ce qui concerne le contrôle de l'opération électorale et les réserves formulées par quelques membres à propos des observateurs internationaux, le président de conseil, Monsieur Yadh Ben Achour, a affirmé que ces derniers n'interviennent ni de près ni de loin dans l'opération électorale, leur mission se limite à l'observation pas plus, ce qui est de nature à donner une image transparente et donc crédible à l'opération électorale, ce procédé est mis en application dans toutes celles qui se déroulent dans un climat serein, conformément aux règles démocratiques.
Le financement
L'autre grande question à l'ordre du jour était celle du financement direct du Conseil Supérieur des Elections. Là aussi, il y avait des réserves de la part de quelques intervenants qui ont exprimé leur vive crainte que ce dernier n'altère l'intégrité des élections et son indépendance. Ils ont considéré que l'investissement étranger provenant des organisations internationales telles que l'ONU peut se faire d'une manière indirecte, c'est-à-dire par l'intermédiaire de l'Etat. La composition du Conseil de l'Instance supérieure des objectifs de la révolution, qui comprend actuellement 140 membres, sera tranchée d'ici la fin de la semaine, son élargissement reste très probable. Enfin, on s'est mis d'accord pour organiser des réunions quotidiennes jusqu'à vendredi.