Depuis le week-end dernier, le cours des événements en Tunisie a pris une autre tournure où le souci sécuritaire semble prévaloir sur les autres considérations. Si d'aucuns souhaitent voir le pays avancer sur la voie des réformes politiques afin de réussir l'objectif de la transition démocratique, l'opinion publique paraît désorientée face à la recrudescence de la violence et des actes de pillage et de vandalisme. On est devant une situation où les cartes se brouillent et l'ordre des priorités devient confus. Si la sécurité est un droit que tout citoyen revendique, il n'en demeure pas moins que l'exercice des libertés publiques doit aussi être préservé. Or, cet équilibre est difficile à trouver aujourd'hui tant que chaque manifestation publique est menacée de déraper vers la violence du fait des casseurs et autres « intrus » qui « mettent à profit » ces occasions pour commettre vols et pillages des biens d'autrui. Est-ce que les mesures sécuritaires prises dernièrement vont permettre de dépasser cette situation ? Quelle que sera la réponse, jamais la solution sécuritaire n'a permis à elle seule de résoudre un problème socio-politique. Il est urgent d'avancer sur d'autres dossiers pour calmer le front social et répondre à ses attentes par des « mesures chocs » à même de créer une accalmie, aujourd'hui, vitale pour l'avenir du pays. Parmi les mesures, à l'effet sans aucun doute positif et impatiemment attendues par les Tunisiens, il y a l'intensification des efforts pour la traque des fonds transférés illicitement à l'étranger et également l'accélération des poursuites contre les « symboles de la corruption » sous le régime déchu. D'ailleurs, l'une des principales causes, sinon la plus importante de la chute de la dictature, était cette « rancœur populaire » contre les clans mafieux de l'avant 14 janvier. Inconsciemment, on est en train peut-être de raviver cette « rancœur », par la diffusion de programmes sur le pillage systématique dont notre pays a gravement souffert tout en cherchant à calmer les esprits. Ceci émane de la culture socio-politique du Tunisien, à l'instar des peuples arabo-musulmans, qui considèrent la corruption et la perversion morale comme péchés impardonnables. Dans ce cadre, le gouvernement provisoire semble prendre la mesure du problème en créant de nouvelles chambres d'instruction au niveau du tribunal de première instance de Tunis. En somme, notre pays ne peut se permettre, dans cette étape cruciale de son histoire, de tergiverser sur de tels problèmes.