Pilier de la République et pouvoir incontestable dans tout régime démocratique, la Justice joue le rôle de catalyseur entre les pouvoirs exécutif et législatif. Mais, la justice dépend dans son fonctionnement, du moins par son côté « matériel », des autres pouvoirs. C'est une sorte de « dépendance » représentée par le pouvoir qu'a la chancellerie sur le déroulement effectif de la justice. Longtemps soumis à cette autorité, les juges n'ont pu, depuis l'indépendance, accéder à leur place naturelle de troisième pouvoir bien que la Constitution de 1959 ait reconnu leur « indépendance ». Aujourd'hui, la donne politique a complètement changé et nos juges ne sont pas en reste. Ils se « repositionnent » et sont en train de regagner leur statut, à travers une action, qui va crescendo mais qui touche à la « frontière » du politique. C'est là où le questionnement se pose quant au rôle du pouvoir judiciaire. Les magistrats sont aujourd'hui, l'autorité suprême de contrôle des prochaines élections. Un rôle de la plus haute importance quant à l'avenir même du pays. Ils sont également le dernier refuge pour l'assainissement de l'héritage politico-mafieux du régime déchu. Le contexte politique actuel en Tunisie et les évolutions prévisibles vont donner plus de marge de manœuvre au corps de la magistrature qui va certainement « peser » sur les événements. D'ailleurs, l'expérience de certains pays démontre que les juges retrouvent la plénitude de leur pouvoir dans un contexte de liberté. Pour autant ce rôle n'a pas toujours été du goût de tous les hommes politiques. Berlusconi n'a-t-il pas dénoncé le « gouvernement des juges » parce qu'ils n'ont pas hésité à le « traîner » devant les tribunaux ? Il faut, donc, s'attendre à des scenarii semblables en Tunisie, car l'indépendance des juges ne pourrait laisser les politiques indifférents. Dans ce cadre, le rendez-vous du 24 juillet sera un véritable test pour les magistrats membres de la Haute Commission des élections. Il appartient aux juges de saisir l'opportunité pour faire preuve de fermeté quant à l'application des lois, de dépasser leurs divergences et faire valoir leur indépendance de la plus belle des manières.