Voie vers la démocratie ou course pour le pouvoir ? • M. Sadok Belaïd : Le peuple est le vrai détenteur du pouvoir • M.Abedeljelil Dhahri : Pour une démocratie participative Depuis l'aube de l'indépendance nous n'avons fait que subir, avec le système du parti unique, les affres du pouvoir absolu, où les libertés étaient étouffées et les droits de l'Homme n'avaient pas voix au chapitre. Désormais la voie est grande ouverte au multipartisme. Il y a actuellement près d'une centaine de partis qui ont été autorisés. Est-ce vraiment un bon signe pour une vraie démocratie permettant à toutes les composantes sociales d'exprimer leurs opinions et de participer à la scène politique ? D'aucuns parmi les juristes et représentants des partis politiques émettent des réserves et ce pour plusieurs raisons. D'abord la plupart de ces nouveaux partis ne sont pas connus par les citoyens. Or c'est au peuple de se prononcer et de choisir ses représentants, afin d'avoir des gouvernants qui répondent à ses aspirations, afin que tous ses droits soient préservés des abus et des spoliations dont il peut être l'objet. D'autres affirment cependant que les partis s'intéressent en premier à la course pour le pouvoir. Nous avons rencontré deux personnalités bien versées dans le domaine politique qui ont bien voulu nous donner leur avis sur ce point. Pour l'éminent juriste Sadok Belaid qui est favorable à ce que le peuple s'exprime directement sans qu'il y ait besoin de passer les partis Le Temps : Mr le professeur vous avez déclaré au cours de la conférence organisée par le réseau des droits de l'Homme , des Libertés et de la Dignité que vous n'aimez pas les partis, or certains rétorquent que les partis c'est un signe de démocratie, même s'il constitue, selon le modèle occidental une course pour le pouvoir. S.B. : La situation actuelle que vit la Tunisie, nécessite que le peuple s'exprime librement sans l'intervention des partis qui sont des facteurs de confrontation et de division, et ce pour une élaboration d'une constitution faite pour unir la population. Une fois la constitution installée la construction d'un système de partis politiques se fait en plusieurs étapes, de maturation, d'affrontements, entre les différentes tendances et sur la base de la réaction du peuple à ces tendances ;ce n'est pas aussi simple. Il faut surpasser et transcender les egos des chefs de partis et il faut que ces partis servent l'intérêt général. Celui-ci ne peut être préserver que par une sommation de toutes ces tendances dans deux ou trois partis. -Comment voyez-vous l'avenir de la Tunisie après la Révolution ? La Tunisie peut s'assurer d'un avenir radieux , en se libérant du régime tutellaire vers une démocratie participative. Le peuple doit être le détenteur de la souveraineté et seul maître du pouvoir. Pour le professeur Abdeljelil Dhahri, président du réseau des droits de l'Homme, des Libertés et de la Dignité : Le multipartisme est un signe de démocratie ; encore faut-il que les citoyens puissent faire un choix en connaissance de cause. Or avec le grand nombre des partis existant actuellement sur la scène politique, les citoyens ne sont même au courant de certains partis qui viennent de recevoir le visa, et encore moins de leurs programmes politiques. -Le Temps : Croyez-vous que tous les partis ont des programmes fixés à l'avance ? -A.Dhahri : Je ne pense pas. Je suis même convaincus du contraire, certains partis se cherchent encore, n'ayant pas beaucoup d'expérience dans le domaine. C'est la raison pour laquelle je rejoins le professeur Sadok Belaid qui affirme qu'il faut une sommation de toutes les tendances dans deux ou trois partis. Ce sera l'issue logique permettant l'exercice d'une démocratie participative qui ne fera que servir l'intérêt général.