• Les 1000 bus de Belhassen Trabelsi, dettes de 500 millions de dinars, 7000 emplois en péril et le siège où l'on attrape des pneumonies Le nouveau ministre des Transports a plein de dossiers à traiter, en un si très peu de temps. Peut être bien que sa planche de salut serait le fait qu'il est « l'enfant de la boîte », donc plus outillé que son prédécesseur Yassine Ibrahim, qui, parachuté dans un contexte tunisien dont il n'y comprend pas grand-chose, n'a fait qu'usage de sa position afin de préparer sa candidature aux prochaines élections. Parmi les questions sur lesquelles le nouveau ministre, Salem Miledi, planchera, on trouve celle de la défectuosité du transporteur historique Tunisair, et ses différentes filiales, la CTN, (compagnie Nationale de Navigation) et ses multiples problèmes, la SNCFT (Société Nationale des Chemins de fer) et ses trous budgétaires, l'OACA avec ses nominations arbitraires et beaucoup d'autres questions. Mais c'est sur la question de la TRANSTU que nous allons nous pencher cette fois. Une société en perte de vitesse et qui connaît un déficit chronique, presque sur tous les plans. La Transtu, La Société de Transport de Tunis (Nakl Touness), qui est le fruit d'une fusion entre la SNT, Société de Transport de Tunis et la SMLT, la Société de Métro Léger de Tunis, compte de nos jours quelque 7000 employés. La décision de fusion entre la société de métro qui se portait bien et la société de transport qui allait très mal, fut décidée par Abderrahim Zouari, ancien ministre des Transports. L'objectif de cette fusion « était de baliser la route devant un transport en commun moderne dans le Grand Tunis ». Mais selon certaines sources au sein de la Transtu, beaucoup de magouilles alimentaient cette décision de fusion, et voilà qu'une situation catastrophique caractérise aujourd'hui la société. Actuellement, les pertes cumulées par la TRANTU s'élèvent à 500 millions de dinars. « Les dettes de la compagnie, sont essentiellement redevables de la CNRPS (Caisse Nationale de la Retraite et de la Protection Sociale), à la SNDP (Société Nationale de Production de Pétrole), ainsi qu'aux services du FISC et à quelques banques locales », nous précise Fradj Ali, PDG de la société depuis moins de trois mois. Une période qui ne permet pas, à vrai dire, à ce responsable de dégager des déductions pertinentes des multiples magouilles dont parle un bon nombre de cadres de la Transtu. D'ailleurs, nous précise encore Ali Fradj « les demandes incessantes des personnels de la Compagnie, qui n'ont confiance qu'en ma personne, ne me permettent pas de mener à bien mon travail. Depuis les quelques mois que je suis à la tête de la Transtu, le nombre des syndicats a atteint les 24, et les demandes ne me permettent pas d'envisager l'avenir de la compagnie, que dire alors de ce qui s'était passé au cours des années précédentes ». Et ce sont justement « ces quelques années précédentes », où d'innombrables choses se sont produites. Selon certains cadres de la compagnie, qui nous ont contacté, beaucoup de dossiers doivent être rouverts afin de rectifier, un tant soit peu, le tir. L'avenir de la compagnie semble être « condamné » surtout « avec certains hauts responsables qui abusent de leur pouvoir, qui profitent de la mauvaise gestion et dont le modèle de gestion risque de mettre en péril les 7000 emplois qu'offre la compagnie » indique-t-on aussi. La liste des accusations est on ne peut plus longue. Népotisme, corruption, mauvais usage de fonds publics, abus de pouvoir etc…une situation identique à ce qui se passe exactement au sein de presque la majorité de nos entreprises publiques. Surtout dans ce secteur des Transports, durant de longues années la première cible des Trabelsi et consorts. Siège impraticable, les bus Man, les rames de métro, et autres… ! Les doléances du personnel de la Transtu sont, à l'image de nombreuses autres compagnies nationales ; illimitées. Mais les plus importantes sont celles qui sont en relation avec leur santé. Et c'est encore une fois l'affaire du siège qui émerge. « La décision du déménagement dans le siège de la compagnie (à la cité de Montplaisir) a été déconseillée par le médecin de travail et de la conseillère juridique de la Transtu. Mais sous la pression de certains cadres influents au sein de la Compagnie, cette dernière paie 700 mille dinars en loyer par an, alors que le projet de la construction d'un siège digne de ce nom près de la Gare de la TGM, est mis en veilleuse ». Et c'est au grand dam de la majorité du personnel, dont certains ont même contracté des maladies pneumologiques à cause de l'humidité et du manque d'entretien de ce même siège. Allez donc chercher à qui profite cette affaire du siège. Expliquant les raisons des pertes cumulées de la Transtu, le PDG de la société indique « que le coût du transport est supérieur aux recettes et aux subventions de l'Etat ». Ceci explique-t-il l'état désastreux dans lequel se trouve le transport en commun non seulement sur le Grand Tunis, mais en Tunisie en général ? La réponse ne tarde pas à venir. En effet, et sous la houlette de l'ancien ministre des Transports, Abderrahim Zaouri, les sociétés de transport en Tunisie ont été obligées de signer des contrats pour l'achat de 1000 bus. Un appel d'offres international a été lancé, qui a concerné toutes les compagnies de transports et un cahier des charges a même été préparé. Ce ne serait pas difficile de deviner qui allait remporter cet appel d'offres. Et 1000 bus de la marque MAN sont octroyés par la TRANSTU ainsi que par les sociétés de transport dans différentes régions de la Tunisie, telle que Sfax et Sousse. Tout cela, semble être normal. Mais dés que les noms de Belhassen Trabelsi et de Hamadi Touil, qui dirigeait la concession de la marque FORD apparaissent, on n'a pas tardé à découvrir l'arnaque. Les bus en question souffraient de maux chroniques « leur traction arrière, ainsi que les défauts de leur système de freinage avaient causé beaucoup d'accidents » nous précise encore le PDG de la TRANSTU, qui ne nous dévoile pas le montant exact de cette affaire, mais à cause du fait que « le cahier des charges n'exigeait pas certaines conditions dans ce sens » beaucoup de vies de citoyens tunisiens ont été, et sont toujours, mises en péril. Une autre question non moins importante, c'est celle des rames de métro. On n'avancerait pas encore plus dans les détails de cette affaire puisque « les rames sont livrées selon un time-table précis. Nous avons acquis une grande partie des 55 rames. 16 autres sont en cours d'acquisition à partir de 2012 », nous précise encore le premier responsable de la compagnie. Mal vivre La vie de la Transtu, la vie de son personnel ainsi que la vie de ses clients sont toutes en péril. Qui est le/ les responsables de cette attendue faillite de l'une des plus importantes compagnies nationales ? Certainement pas Ali Fradj, le PDG actuel de la compagnie, qui nie même avoir connaissance du vol de deux ordinateurs qui contiendraient des « informations classées » concernant « des bilans financiers » de la compagnie. Un doigt accusateur est cependant pointé vers un Directeur Central au sein de la société. Mais ce qui est sûr, c'est que le ministre actuel des Transports devra faire avec un lourd héritage, non seulement laissé par Abderrahim Zaouri, dont l'inculpation dans des affaires de malversation suit son cours, mais aussi celui de Yassine Ibrahim, ministre nommé au mois de janvier dernier. Un ministre, bien qu'étant une compétence nationale, mais qui sort avec un bilan nul. Pire encore, Yassine Ibrahim aurait même profité de sa position pour entamer sa campagne de promotion de son parti né après le 14 janvier. Selon des sources proches de l'ancien ministre, Yassine Ibrahim n'aurait même pas « utilisé 12% du budget du ministère », ce qui a handicapé la création de nouveaux emplois, mais en contre partie, son chef de cabinet, lui aussi de retour de l'étranger, percevait un salaire de 6400 dinars, et deux billets d'avion Tunis-Paris par mois, bien sûr payés par l'argent du contribuable. Selon d'autres sources, l'organisation de la conférence sur la logistique, l'une des uniques initiatives de cet ancien ministre, outre bien évidemment sa baignade dans la plage de Sfax, aurait été confiée à la même agence de communication chargée de la communication et des relations publiques du parti auquel Yassine Ibrahim appartient. In fine, le passage de ces « responsables » ne fait qu'aggraver les choses et les rendre de mal en pire. Et c'est l'ensemble de la communauté qui se trouve, encore et toujours, obligé de payer les valses des uns et des autres.