Les chiffres ont quelque chose de définitif, d'irrévocable : ils vous mettent face à la vérité sans contestation possible. Une source du ministère du Commerce nous a affirmé : « comparé à Ramadhan 2010, l'inflation tourne autour de 20 à 30% selon les secteurs. » Une opinion largement partagée par bon nombre de citoyens-consommateurs, résumée à juste titre dans cette formule d'un quadragénaire aux revenus modestes : « ce n'est pas une hausse des prix, c'est une explosion ! » Pourtant le ministère du Commerce a pris ses précautions en approvisionnant le marché avec des stocks de 40 mille tonnes de pommes de terre. La production de fruits ayant enregistré une augmentation de 10 à 15% par rapport à l'année dernière, plus de 120 mille tonnes de pêches sont mises sur le marché, en plus de 30 mille tonnes d'abricots, 12 mille tonnes de prunes et 60 mille tonnes d'amandes. Côté viandes rouges, la production locale de viande d'agneau étant insuffisante, on a importé 100 tonnes de viande de mouton et 500 tonnes de viande bovine. Pour le poulet et la dinde, la production de poulet de chair atteint actuellement 8200 tonnes, contre 7500 au cours du mois de juillet. En ce qui concerne les œufs, 195 millions œufs sont mis sur le marché, ce qui est largement suffisant en principe… Quant au lait et dérivés, les quantités stockées étaient d'environ 36 millions de litres début juillet 2011 et il a été décidé d'arrêter l'exportation de ce produit vers le marché libyen pour ne pas créer de pénurie… Mais certains trafiquants dans l'âme, qui ne respectent ni foi, ni loi, se permettent d'exporter vers la Libye des produits de première nécessité, qui sont en outre subventionnés par vous et moi. Le ministère du Commerce a d'ailleurs rappelé récemment que l'exportation des produits subventionnés destinés au marché intérieur, notamment le pain, le sucre, le café ou le thé était interdite et que la contrebande constitue une infraction économique et douanière. Il faut dire que ces exportations de produits alimentaires vers la Libye ont quadruplé cette année, passant de 53 millions de Dinars à plus de 190 millions de Dinars selon les chiffres officiels. Les conflits sociaux, nombreux depuis la révolution, ont aussi contribué au déséquilibre de l'offre et de la demande à cause de la baisse de l'offre dans certains secteurs. Détail important : un responsable du ministère du Commerce nous a confié : « ceux qui mettent en cause l'exportation des produits de première nécessité à la Libye ou la présence de dizaines de milliers de réfugiés libyens en Tunisie semblent oublier que normalement en cette saison, il y a des centaines de milliers de touristes qui viennent d'Europe et des pays limitrophes, consommant le double et le triple de ce qui est actuellement servi aux Libyens. » Et puis il y a les produits manquants, qui vont de l'eau minérale au sucre, en passant par les huiles végétales, les céréales, la farine et le lait. On a même constaté samedi dernier qu'il n'y avait plus de café dans une grande surface généralement bien approvisionnée ! Tout cela contribue à l'envol des prix et à l'augmentation du stress… Une femme au foyer qui n'en peut plus, s'insurge : « les inspecteurs du contrôle des prix sont en grève ou quoi ? Ne sont-ils pas au courant de cette situation ? Et dans ce cas, qu'attendent-ils pour intervenir et faire leur travail ? Ils sont payés pour ça, non ? Et pourquoi on n'arrête pas les trafiquants ? Il y a des contrôles aux frontières, non?». Malgré les belles paroles et les discours de transparence, il y aura toujours dans ce pays des questions sans réponse…