De Hechmi GHACHEM - Je devais-chose qui ne m est pas arrivée depuis longtemps-traverser l'avenue Bourguiba vers une heure passablement tardive (autour de 23H) , en compagnie d'un copain animateur star d' une chaine de télévision privée. Malgré la présence des forces de l ordre veillant à la sécurité des citoyens l'on se rend rapidement compte qu' une nouvelle faune avait élu domicile dans ce centre de Tunis qui était peuplé par ce que le pays comptait de mieux comme forces vives : des intellectuels, des artistes, des fonctionnaires et pratiquement aucune trace de ces nouveaux énergumènes qui surgissaient d' on ne sait où comme des gros matous des poubelles. Il y en a que pour eux ! Ils se tiennent par le bras te coupent la route, te demandent de leur offrir de quoi boire un pot ou manger un sandwich… Il y en a qui râlent tels des cochons qu'on égorge, d autres qui se roulent par terre, gueule bras et jambes ouvertes alors que d autres énergumènes qui leur ressemblent, leur versent dessus un liquide qui est censé être de l' eau pour les réveiller. J'eus une pensée pour tous ces hommes de culture et propriétaires d'espace artistique qui rêvent de ramener la clientèle d'avant vers le centre-ville. Cette pensée fut suivie par un rire sarcastique profondément enfoui dans mes entrailles. Autant rêver d'un Sahara climatisé ! Pourtant, j ai toujours été quelqu'un du centre de Tunis. J ai trainé des nuits entières jusqu' à la chute de l' aube en compagnie des bandes d' artistes et des clochards célestes allant d un café à l'autre d' un restaurant à un autre cabaret chantant, où l on retrouverait nos amis musiciens ou hommes de théâtre . La ville avait alors un cœur et il était si gros que tous venaient s'y ressourcer ou se réchauffer l' âme. Ce cœur battait aux rythmes de ceux qu'il avait élus comme témoin de sa santé et de ses espoirs. Il avait le pouvoir- comme dans toute capitale qui évolue- de préserver ses artistes sans nulle nostalgie parce que la nostalgie est la faiblesse devant la marche vers la vieille dame à la faucille ; je me dois d'exprimer un doute quant au retour de l'éclat fantasmagorique de ce cœur qui fut le centre-ville, cet espace chargé de rêves, de joies et de déceptions de tant de poètes. Ce n'est nullement une question de sécurité mais de culture ! Ce qui différencie un peuple de la plèbe c'est le taux de culture que charrient ses fleuves et ses petites rivières de sang car la culture fait partie de ce qui compose le corps humain comme les os, les organes et les multiples mécanismes et astuces qui le font bouger. Le cœur de Tunis semble être en grande partie envahi par d'énormes cellules rabougries qui ne laissent rien pousser sous leurs lourdes pattes. Faudrait-il le placer ailleurs ? la cité de la culture va- t –elle résoudre cette grave dégradation de la face qu'on ne peut cacher de notre capitale ? Le public familial daignera t-il revenir ou reconnaitre-enfin- le centre-ville ? Pour cela, Il faudrait qu' il y ait une vie autour de la cité de la culture. Une vie douce et qui prête aux jolies rêves . Rêver encore une fois ? Pourquoi pas ? C' est ce qu' on a fait jusque-là. Nous n' avons fait que rêver, alors continuons s' il nous faut continuer. PS : ce texte écrit début janvier 2011 n a pu être publié pour des raisons évidentes.