• Egalité dans l'héritage entre frères et sœurs Devant une assistance nombreuse, formée d'amis, de partenaires, d'intellectuels, de juristes, d'artistes comme Mouna Noureddine et Kaouther Bardi et de militants, le Pôle Démocratique Moderniste, a présenté, hier au palais des congrès à Tunis, ses candidats pour les élections de la Constituante du 23 octobre prochain et les grandes lignes de son programme résumée en 55 points. Riadh Ben Fadhel a rappelé le laborieux parcours du Pôle constitué le 31 mai dernier entre neuf partenaires dont 4 partis et 5 groupes indépendants. C'est un pôle né suite à des appels de plusieurs forces politiques pour la création d'un front large défendant un projet de société démocratique, moderniste jetant les bases d'une Tunisie nouvelle imbue de ses acquis et des valeurs d'une civilisation trois fois millénaire. Après plusieurs tentatives en 2004 et 2009, autour d'Ettajdid, cette initiative a abouti à la rédaction d'un document historique le 31 mai qui a servi de base à l'élaboration de listes communes pour la Constituante du 23 octobre. Les partis politiques ont fait des sacrifices pour que l'intérêt supérieur du pays prime sur les intérêts partisans. Seize femmes sont tête de liste. Jounaïdi Abdeljaoued, dont la notoriété dans la circonscription de Monastir n'est pas à démontrer, a été le premier à proposer d'être placé deuxième dans la liste, au profit d'une femme, plus jeune. D'ailleurs, la moyenne d'âge des candidats du pôle est de 42 ans. Un coup de jeune et de féminisation bien marqué. La Tunisie s'était bien distinguée dans le printemps arabe par la présence des jeunes et de la femme. Amel Nasr, 24 ans, tête de liste en Allemagne en est un symbole. Le pôle est resté fidèle à ses engagements. Riadh Ben Fadhl rappellera qu'aucun slogan religieux n'a émergé lors de la Révolution du 14 janvier. C'est une Révolution de la dignité et de la modernité. " Nous ne permettrons pas à des forces obscurantistes de la récupérer ", dira-t-il, en ajoutant que le pôle " ne participera à aucun gouvernement associé à des obscurantistes ". Il a essayé de démolir l'appel au vote utile en affirmant que " le seul vote utile est pour le pôle ". Il pense que la présence d'un groupe fort du Pôle au sein de la Constituante est une garantie pour tous les démocrates. La course pour la Constituante est déterminante pour l'avenir du pays, qui va au de-là des intérêts partisans. Heyfa, jeune militante, affirmera qu'il n'y a pas de leader au sein du pôle. " Le seul leader, et la seule référence est la Tunisie ". Sana Ben Achour s'étalera sur la présentation des grandes lignes du programme, en commençant par rappeler que les indépendants dirigent 15 listes de candidats sur les 33 présentées. Elle fait partie des indépendants qui veulent renforcer les partis, sans prétention démesurée. Le projet du pôle ne se veut pas une liste de promesses vides et électoralistes qui n'engagent que ceux qui les écoutent. Il a l'ambition d'être un programme clair, présentant l'identité du pôle et sa différence par rapport aux autres, sans culpabilité. La rédaction de la Constitution n'est pas seulement une technique. C'est une action qui a une charge politique. C'est un document prospectif. Le pôle s'engage, en premier lieu, à réhabiliter la citoyenneté. On commence par les citoyens et puis on passe aux institutions. La liberté et la justice sont des fondamentaux placés à la base de la citoyenneté. L'égalité n'est pas un slogan. Elle doit figurer dans la Constitution. Pour accélérer l'égalité, le Pôle propose d'introduire la discrimination positive, entre citoyens, régions et générations. En plus le Pôle défend la liberté de culte et de conscience. Le caractère sacré des lieux de culte doit être consacré. En même temps, il faut que ces lieux de culte soient en dehors de l'action politique. D'ailleurs, le Pôle appelle à la séparation entre le religieux et le politique. A côté des libertés politiques, d'autres droits économiques et sociaux sont à satisfaire comme le droit au logement décent, au travail, la protection de la vie privée, l'intégrité physique en incluant la violence contre les femmes dans la rubrique de la torture… Par ailleurs la justice transitionnelle doit être instituée avec des procès justes et équitables. Quant à la nature du régime politique le pôle propose qu'il soit un régime mixte faisant la synthèse entre les avantages des deux régimes présidentiel et parlementaire, tout en garantissant l'alternance et consacrant la séparation des pouvoirs et l'indépendance de la justice. Le pôle propose la création d'une Cours Constitutionnelle qui contrôle la constitutionnalité des lois avec la création d'instances supérieures comme celles du contrôle du marché financier, de la lutte contre la corruption, de la protection des données personnelles et du contrôle de l'effectivité de l'exercice des libertés. Dans la hiérarchie des lois, on propose de placer la constitution en premier lieu suivie par les conventions internationales. Concernant l'article premier de la Constitution 1959, on tient à ce que le caractère musulman du pays ne soit pas un alibi pour confondre religion et politique et établir des discriminations entre les citoyens et les citoyennes. D'ailleurs, l'appel est lancé pour la consolidation des acquis du Code de Statut Personnel sur la base de l'égalité totale entre les membres d'une même famille y compris en matière d'héritage. En résumé, le Pôle ambitionne de défendre une société réconciliée avec elle-même, moderne, démocratique et solidaire. Le Pôle n'a pas été le premier à présenter son programme. Aura-t-il le temps de le défendre devant les électeurs tunisiens d'ici le 23 octobre, malgré toutes les pesanteurs et les contraintes ?