Chaque jour sec ou pluvieux, est l'occasion pour des dizaines de citoyens d'aller faire une virée du côté du marché des bestiaux, histoire de tater le pouls des prix et de rêver quelques instants entre le vendeur recevant une liasse de billets et l'acquéreur du mouton. Sur la route de Tunis ou plus précisement à Oued Souhil, Maahfar, Bir Challouf et Mrazgiua des centaines de moutons toutes couleurs, tous prix sont anarchiquement exposés au ventre. Cette année, le prix d'une bête moyenne oscille, à quelques jours de ce cérémonial, entre 300 et 450 dinars La cause de ces augmentations vertigineuses est, selon les spécialistes en la matière, la spéculation tous azimuts qui marque généralement cette période et l'intérêt accordé par ces éleveurs… improvisés. Cela dit, malgré la montée des prix, on ne recule pas pour ce rituel car il ne faut pas rater les sacrifices.» A elle seule, cette phrase, qui revient ces jours-ci sur toutes les lèvres, montre à tel point les tunisiens sont attachés à leurs moutons. Le ministère du commerce a pris ses dispositions en injectant sur le marché 900 000 bêtes contre 850 000 l'année précédente .Des prix de référence ont été fixés pour la vente des moutons du sacrifice, à l'occasion de l'Aïd El Idha, suite à une réunion tenue entre les représentants des ministères du Commerce et de l'Agriculture, du Groupement interprofessionnel des viandes rouges, de l'organisation de défense du consommateur (ODC) et de l'Institut national de la consommation: Le mouton de moins de 40kg: 6,3 dinars/kg, le bélier pesant entre 41 et 65 kg :5,9 dinars/kg et le bélier de plus de 65 kg : 7,5 dinars/kg. L'évènement de l'Aid n'a laissé personne indifférent. Accompagné par leurs enfants, des parents sillonnent les souks pour trouver les bonnes occasions. « Cher, Cher le mouton de cette année » lance un jeune cadre , rasé de près, moustache fine «350 dinars, c'est à discuter ! jetez un coup d'œil !» «Cher» murmure l'acheteur qui se tourne vers un couple venu visiblement pour acheter un mouton. Pas plus loin du côté de Bir Challouf, , les gens regardent, bavardent et n'achètent pas. Les citoyens cherchent méticuleusement les endroits où l'on peut espérer une bonne affaire . « Tiens cela vaut les 320 dinars, on achète » affirme Maha , une mère de trois enfant qui a du mal à trouver un mouton à bon prix. Il est vrai que les prix montent. La Libye et le déficit pluviométrique ont fait que la nourriture du cheptel est coûteuse. Samir est très étonné de la flambée des prix. Finalement, il a acheté à un prix fort «je ne vais pas passer des heures et des heures à cherche le moins cher. L'essentiel est que c'est un bon mouton» nous dit-il Rogne et grogne chez de nombreux citoyens et pères de famille qui s'indignent face à ces tableaux de prix dont l'agressivité crève déjà le plafond. »Ce que nous voyons relève tout simplement de l'inconcevable et Dieu punira tous les auteurs de pareilles spéculations» affirme Am Hédi, un vieux qui n'ose pas croire un seul instant que le mouton est trop cher cette année « Où allons-nous à ce rythme, c'est du jamais vu ! Dans la foulée, c'est un autre citoyen qui essaie de convaincre le vendeur « Non , c'est à 400 dinars. A prendre où à laisser ! » Bref, le mouton est inaccessible pour les petites bourses. Que peut-on faire pour faire face à cette montée vertigineuse des prix ? Faudrait-il importer des moutons pour faire baisser les prix et sauver un tant soit peu un cheptel encore insuffisant ? Faut-il acheter simplement un mouton égorgé ? Est-ce moins cher. «Je ne pense pas affirme am Salah qui se contente de quelques kgs de viande pour son Aïd.