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Les sit-inners de l'hôpital Kheïreddine demandent la libération immédiate du Dr Mourad Ben Mansour Incarcéré pour avoir délivré, sous la menace physique, un certificat de “décès naturel” pour un jeune tué par balles
• Un tollé du corps médical et paramédical est provoqué suite à l'incarcération du Dr Mourad Ben Mansour, lequel a été par la suite rayé du Conseil de l'Ordre des médecins. • Les sit-inners devant l'hôpital régional de Kheireddine haussent le ton : notre collègue ne doit en aucun cas être traité comme un malfrat ou un criminel. D'autres actions syndicales suivront si le collègue en question ne sera pas rétabli dans ses droits. • Bien avant, le Dr Mourad Ben Mansour a été obligé de signer un acte de décès naturel sous la menace de la famille d'un homme tué par balles, le soir du 13 janvier. Après la Révolution, la famille a porté plainte contre le médecin en question pour bénéficier des donations de l'Etat. C'était un soir du 13 janvier 2011. Pas une âme qui vive dans les rues et les ruelles du tout Tunis, traumatisé après de longues nuits d'angoisse. C'était encore la confusion et le chaos. Le risque de débordement inquiétait déjà une population encline à se ranger et à se taire. Le Dr Mourad Ben Mansour, médecin généraliste père de deux bébés et par-dessus tout, un homme de devoir s'est rendu ce soir-là à l'hôpital régional de Kheireddine où il devait assurer sa garde. Le Dr Ben Mansour étant au chômage, il était obligé de faire des gardes pour subvenir aux besoins de sa famille. Le soir même, le médecin a reçu un cadavre tué par balles. Sous la menace de la famille du défunt usant d'armes blanches et proférant des insultes et des injures à l'encontre du « système de Ben Ali et de son Etat gendarme». Le médecin fut obligé de signer un acte de « décès naturel » (arrêt cardiaque) pour que la famille puisse enterrer la dépouille sans pour autant faire le passage obligé de l'autopsie. Avec l'avènement de la Révolution et la décision de l'Etat à faire un don de 20 000 dinars aux familles des victimes, la famille en question a porté plainte contre le médecin l'accusant à tort d'avoir occulté la vérité. Le verdict de culpabilité du médecin a été prononcé par le Tribunal de première instance de Carthage. Le verdict tombe Le Dr Mourad Ben Mansour encourt six mois de prison ferme et excusez le peu, il est interdit, de surcroît, d'exercer ses fonctions de médecin, son nom étant rayé du tableau du Conseil de l'ordre des médecins et est obligé de dédommager les héritiers à raison de 1500 DT chacun. « C'en est une fois de plus : notre système judiciaire rate le coche de la Révolution pour qu'un médecin soit traité comme un malfrat et paye les pots cassés alors que les vrais assassins circulent en toute impunité sous nos cieux, voire même ailleurs. » nous dit l'une des collègues du médecin complètement affolée de voir le Dr Mourad Ben Mansour en prison obligé de purger sa peine alors qu'un appel a été opposé contre l'ordonnance du juge d'instruction. Et c'est sans appel. La grogne du syndicat En signe de contestation, le personnel du corps médical et paramédical de l'hôpital régional de Kheireddine a organisé un sit-in hier matin durant une heure pour réclamer la libération immédiate de leur collègue. Selon le Dr Med Hédi Souissi, le Secrétaire général du syndicat des médecins pharmaciens et des médecins dentistes de la santé publique de Tunis, «Il n'y a pas lieu de se taire car la situation est intenable, surtout que la famille du défunt a déjà reçu les 20 000 dinars de l'Etat. » D'autres actions suivront, laissent entendre les sit-iners, si jamais leur collègue victime des agissements de l'ancienne dictature, n'est pas rétabli dans ses droits. L'histoire n'est pas encore finie Ali Khachlouf le beau-père du Dr Ben Mansour n'en revient pas « Ce qui s'est passé avec le Dr Mourad est invraisemblable. Le tueur de la personne en question est aujourd'hui en liberté alors que mon beau-fils est en prison. Le soir du 13 janvier ils étaient presque 200 personnes armées qui ont pris d'assaut l'hôpital et ont menacé de tuer mon beau-fils et d'incendier les lieux si jamais il refusait de signer l'acte de décès comme ils l'entendent. J'ai les preuves de ces dires. C'est vraiment malheureux ce qui vient d'advenir dans une Tunisie postrévolutionnaire. J'ai de la peine car mon beau-fils vient tout juste de décrocher un poste du côté de Tajerouine après de longues années d'attente… Maintenant j'attends son retour.» dit-il, la gorge nouée. Mais il n'est pas le seul. Car Intissar (sept ans) la fille aînée du Dr Ben Mansour et le petit cadet Khalil (deux ans) attendent aussi le retour de leur père. Ainsi que toutes les âmes libres ayant battu le bitume le jour du 14 janvier pour une vie digne et juste. ‘'La raison du plus fort n'était-elle pas toujours la meilleure ?'', nous dit La Fontaine. C'est la morale de l'histoire qui n'est pas encore fini. Elle ne doit pas se terminer en faisant triompher l'injustice. Car le peuple tunisien qui a décidé de prendre son destin en main finira par dire son dernier mot.