Erudit et grand réformateur de la pensée islamique, le Cheikh Mohamed Tahar Ben Achour, a œuvré durant sa longue carrière à l'université Ezzeïtouna, à combattre un certain dogmatisme menant à l'obscurantisme religieux, et la " fermeture de la porte de l'Ijtihad ", préconisant, à l'instar d'Ibn Khaldoune et du Cheikh Salem Bouhajeb, dont il était le disciple, la méthode de l'analyse scientifique de la connaissance. Tahar Ben Achour, représentait tout un courant de pensée islamique, érigé contre les fausses croyances et les interprétations erronées des préceptes de l'Islam. Le Cheikh Mohamed Abdou, en Egypte, ainsi que le non moins érudit célèbre, le zeïtounien originaire du djérid tunisien, le Cheïkh Lakhdar El houssaine, avaient appartenu à ce même courant. Cela ressort à travers les multiples œuvres du Cheikh Tahar Ben Achour, dont notamment " Attahrir wattanwir " où il préconisa une méthode rigoureusement scientifique de l'exégèse du Coran, ce qui lui valut de passer près d'une vingtaine d'années à la réalisation de cette œuvre considérable. Il essaya avec la même ferveur, à inculquer cette méthode scientifique , qui fait appel à la raison, à tous ses élèves, que ce soit à l'université Ezzeïtouna, à la khaldounia ou au collège Sadiki. Nommé une première fois, à la tête de la même université, durant l'ère coloniale, il essaya d'y entreprendre des réformes dans ce sens. Cependant confronté aux cheikhs conservateurs de l'époque , il ne put aller jusqu'au bout de son projet, et fut même limogé, pour laisser la place à ceux parmi eux qui se complaisaient dans une situation, où l'obscurantisme et la médiocrité était de mise. Il réalisa toutefois un ouvrage " A Leïssa assobho Bi Karib " dans lequel il faisait état de son programme de réforme de l'enseignement à l'université zeïtouniennne. A l'avènement de l'indépendance , il fut nommé une deuxième fois en tant que recteur de l'université zeïtounienne, et put entreprendre certaines réformes en faisant introduire des matières scientifiques et à cet effet une annexe à l'université a été érigée : La Cité zeîtounienne " Al hay Azzaïtouni ". Dans son tirage du 5 juillet 1957, le journal Assabah, avait reproduit le discours de fin d'année scolaire, qu'avait prononcé le Cheïkh Tahar Ben Achour, et dans lequel il annonçait un certain nombre de réformes, notamment en matière d'équivalence des diplômes incitait entre autres tous les étudiants zeïtouniens, à acquérir à des connaissances scientifiques et à faire intervenir la raison en évitant tout dogmatisme et toutes les idées préconçues et non vérifiées. Il faisait remarquer entre autres que " L'évolution de la pensée scientifique, est la base de toute connaissance. La réforme de l'enseignement concerne tous les étudiants de l'université zeïtounienne, qu'ils soient Tunisiens, Algériens, Libyens, ou Arabo-musulmans quelles que soient leurs origines. " Dans ce discours , Tahar Ben Achour annonçait les réformes qu'il préconisait et exposait par là même sa conception progressiste fondée sur la raison et la connaissance scientifique.