Nouveau musée à l'IMA, nouvelles salles au Louvre, expos à Beaubourg... La capitale française à la pointe de la redécouverte des cultures arabes. Des arts de l'islam aux créateurs d'aujourd'hui. Une vague orientale déferle sur Paris. En février 2012, l'Institut du monde arabe (IMA) dévoilera, à l'occasion de son 25e anniversaire et après deux années de travaux, son nouveau musée. Sur quatre étages, quelque 600 pièces raconteront la "civilisation arabo- musulmane" à travers ses dimensions culturelle, religieuse et sociale. En octobre, le Louvre inaugurera un département, le huitième, dédié aux "arts de l'islam". La richesse de cette collection, longtemps perdue au milieu des antiquités orientales, méritait son écrin. Justice lui a été rendue. Quelque 2000 pièces seront déployées cour Visconti, sous une résille de verre et d'acier... Ces deux institutions ne sont pas les seules à tourner leurs regards vers cette partie de la planète. Le Centre Pompidou a lancé une recherche visant à approfondir les connaissances en matière d'art arabe, moderne et contemporain. On assiste surtout à la multiplication des expositions dans lesquelles les plasticiens d'aujourd'hui, tunisiens ou égyptiens, libanais ou palestiniens, tiennent la vedette. Comme à l'Institut des cultures d'islam (ICI), qui, installé depuis six ans à la Goutte-d'Or, propose une programmation de plus en plus ambitieuse. L'IMA, qui entend développer les invitations à l'adresse des artistes contemporains, amorcera dès janvier sa nouvelle stratégie par une exposition célébrant le premier anniversaire de la révolution tunisienne. Car l'"islamania" qui souffle sur la France tient au "contexte politique", analyse Véronique Rieffel, directrice de l'ICI et auteur d'un ouvrage sur le phénomène. De l'effondrement des Twin Towers jusqu'aux révoltes du printemps dernier, l'actualité a placé ces contrées sous le feu des projecteurs et simultanément entraîné un mouvement de découverte ou de redécouverte de leur culture. "Face au choc du 11 Septembre, explique Badr-Eddine Arodaky, directeur général adjoint de l'IMA, les spécialistes se sont sentis investis d'une mission : affirmer que le monde arabe ou arabo-islamique ne se réduisait pas à un Oussama ben Laden, mais reposait sur une civilisation extraordinaire qu'il fallait faire connaître." Henri Loyrette, président-directeur du Louvre, rejoint cette opinion. "Montrer la face lumineuse de cette civilisation est l'ambition du nouveau département, affirme-t-il. Et c'est d'autant plus important dans une période qui développe fantasmes et incompréhensions." Delacroix, Matisse, des artistes inspirés... Cette "islamania" permettra sans doute de réexaminer l'Histoire. Car "les arts de l'Islam ont été négligés, reconnaît Henri Loyrette, alors qu'ils n'ont cessé d'influencer l'Occident et ont été une source d'inspiration de nombreux artistes tels Delacroix et Matisse". Le travail mené par le Centre Pompidou, sous la houlette de Catherine Grenier, directrice adjointe chargée de la mondialisation, balaiera aussi des idées reçues. "L'histoire de l'art moderne a été écrite sous le prisme de l'Occident, constate la conservatrice. La recherche entreprise contribuera à sa relecture." Quant à l'IMA, il prépare pour septembre 2012 une exposition mettant en lumière vingt-cinq ans de création contemporaine. Une profusion d'initiatives, tandis que le destin du monde arabe, lui, continue de s'écrire dans la douleur.