Les vacances d'hiver sont finies et les élèves ont repris le chemin de l'école depuis lundi. Certains sont satisfaits de leurs résultats du premier trimestre, d'autres en revanche manifestent un certain mécontentement, voire un regret d'avoir raté cette première période de l'année, pour une raison ou une autre. En attendant les bulletins trimestriels qui seront bientôt envoyés aux parents, la plupart des élèves n'arrivent pas à se concentrer sur les cours durant la semaine qui suit immédiatement les vacances, marquée par une attente anxieuse de leurs moyennes générales. C'est qu'ils ne peuvent les obtenir qu'après la tenue des conseils des classes qui se déroulent pendant cette semaine. Mais pourquoi un bon nombre d'élèves n'ont pas eu une moyenne satisfaisante en ce premier trimestre ? Entre-temps, une virée dans quelques collèges et lycées de la banlieue sud nous a permis de dresser les constats suivants et ce, à partir des témoignages recueillis parmi des enseignants, des élèves et des parents. Toutes les personnes abordées étaient unanimes de remarquer que ce sont surtout les élèves de 7ème année de base (ou 1ère année du second cycle de l'enseignement de base) et ceux de 1ère année secondaire qui sont les plus désappointés. C'est dans ces deux niveaux scolaires que les résultats obtenus au 1er trimestre sont les plus médiocres, sinon les plus faibles. Ce constat est devenu quasi général d'une année à l'autre, notamment en fin du premier trimestre et il faut attendre la fin du 2è trimestre pour noter une certaine amélioration dans les résultats des élèves concernant ces deux niveaux scolaires. Histoire d'inadaptation au nouveau cadre, sachant que les premiers viennent d'écoles primaires pour débarquer dans un collège où tout est différent pour eux, de même les autres se trouvent pour la première fois dans un lycée où souvent il leur paraît difficile de s'adapter à ce nouveau milieu, du moins pendant les premiers mois. C'est que le passage de l'école primaire au collège et du collège au lycée ne s'opère pas toujours sans dégâts ! Les conditions de travail au sein du primaire sont très différentes de celles du collège, de même l'ambiance générale et le contexte scolaire dans le collège ne sont pas ceux qu'un élève retrouver au lycée, une fois passé au secondaire. Heureusement que la majorité des élèves de 7ème année de base et de 1ère année secondaire s'adaptent progressivement, nous a-t-on affirmé, et voient leurs moyennes s'améliorer dès le 2ème trimestre ; cela n'exclut pas le fait que certains élèves continuent souvent à connaître des difficultés d'adaptation même dans les classes supérieures. A vrai dire, ce passage d'un cycle à un autre cause d'énormes problèmes à un nombre non négligeable d'élèves pour des raisons diverses. La plus importante réside dans le fait qu'il existe un hiatus transitoire énorme lors du passage du primaire au collège et du collège au lycée à tous les points de vue (programmes officiels, système disciplinaire, emplois de temps, nombre de disciplines et d'enseignants, effectif d'élèves et de surveillants…) Difficultés d'adaptation D'après les témoignages qu'on a recueillis parmi les élèves de 1ère année secondaire, on voit que parfois il est difficile pour certains de passer le cap de l'entrée au lycée où ils rencontrent des changements qui peuvent provoquer des perturbations au niveau de l'intégration et des apprentissages, notamment les matières scientifiques qui sont enseignées en langue française au lycée alors qu'elles l'étaient en langue arabe dans le collège, il faut imaginer les difficultés rencontrées par ces élèves lors de l'apprentissage de ces matières, sachant que la majorité rencontrent d'énormes problèmes avec la langue de Molière. Tout cela peut déteindre sur leurs résultats scolaires, surtout au cours du 1er trimestre. Il en est presque de même pour les élèves entrés pour la première fois au collège ; c'est avant tout un problème d'adaptation qui est derrière les mauvais résultats obtenus au 1er trimestre, sauf que pas mal d'élèves arrivent de l'école primaire avec des capacités très faibles quant aux apprentissages de base, à savoir la lecture, le calcul et l'écriture, trois activités principales supposées être acquises à l'école primaire ! Mais aussi les nouveaux lieux, les emplois de temps trop chargés, les nouvelles méthodes, l'accélération du rythme de travail, le grand nombre de matières et d'enseignants et souvent même le manque de continuité entre le premier et le second cycle de l'enseignement de base ; tout cela contribue certainement à la déroute de l'élève de 7ème année de base, peu habitué aux grands changements. Pour certains, il faudra attendre le 2ème trimestre pour s'adapter aux nouvelles circonstances. Pour d'autres, il faudra toute l'année scolaire. Autrement, c'est l'échec ou l'abandon ! Inquiétude des parents Ces cas de figure sont à l'origine de l'inquiétude de pas mal de parents qui s'interrogent parfois sur le rôle qu'ils doivent jouer pour faire réussir à leurs enfants ces phases transitoires école/collège et collège/lycée. Les parents sont en effet concernés par cette transition problématique dans la mesure où ils doivent être au courant des changements qui doivent avoir lieu lors du passage de leurs enfants d'un cycle à un autre. La plupart des parents ont dû vivre la même expérience par le passé. (Sauf ceux qui n'ont jamais fréquenté l'école et qui sont de plus en plus rares !). Ils peuvent dédramatiser la situation en les préparant à la nouvelle étape de leur parcours scolaire. Quand aux enseignants, ils peuvent tenir un rôle très important pour faciliter l'intégration de ces nouveaux dans le collège ou le lycée, ne serait-ce que par des conseils sur la façon de se comporter dans ce contexte nouveau, des mises en garde contre certaines déviations ou par un certain ralentissement au niveau des tout premiers cours pour les habituer peu à peu aux nouveaux règlements à suivre. Malheureusement, les programmes trop chargés et la rigidité des emplois du temps peuvent empêcher souvent les enseignants à le faire ! Encore moins les parents qui sont la plupart du temps déphasés et ne parviennent pas toujours à suivre le parcours scolaire de leur progéniture, étant peu avisés sur les différentes réformes qui sont souvent apportées sur les programmes officiels, les coefficients, les méthodes, les horaires… Des chiffres inquiétants Les réformes attendues dans le secteur de l'enseignement pourraient prendre en considération cette coupure transitoire qui cause chaque année un taux assez élevé de redoublement et de défaillance scolaire parmi les élèves qui n'arrivent pas à s'adapter facilement au sein d'un collège ou un lycée. Il n'y a pas malheureusement de chiffres nouveaux concernant ces abandons scolaires ; cependant, les dernières statistiques relatives à l'année scolaire 2002/03 montrent que 34.450 abandons ont été enregistrés au cours de cette année-là, soit 59% du total des abandons. Les plus récentes sont peut-être celles publiées juste après la révolution dans le rapport de l'Observatoire National de la Jeunesse et qui semblent plus proches de la réalité. D'après ce rapport, « durant les dix dernières années, plus de 1,3 million d'adolescents et de jeunes ont quitté l'école. Le tiers a interrompu totalement les études sans intégrer le cycle du secondaire. ». Selon des données du ministère de l'Education sur lesquelles s'est basé le rapport, « le taux d'abandon scolaire a, certes, baissé au primaire passant de 4,7% au début des années quatre-vingt-dix pour atteindre 1,7% en 2004/2005, mais, il n'a, par contre pas cessé d'augmenter dans le secondaire, atteignant respectivement 10,9% et 12,7%, alors qu'il était de 6,9% et de 13% en 1992. »On note donc selon ces chiffres qui n'ont jamais été publiés à l'époque de l'ancien régime, une tendance inquiétante à l'augmentation des taux d'abandon. Des réformes substantielles doivent s'opérer illico dans notre système éducatif qui accuse des déficiences énormes à tous les niveaux. Nous comptons sur les commissions formées récemment au sein du Ministère de l'Education en vue d'apporter les révisions nécessaires à ce secteur vital. Quand on sait que « le coût de l'abandon scolaire précoce atteint 345 millions de dinars par an, soit près de 13% du budget du ministère de l'Education et qu'à eux seuls, les redoublements coûtent près de 137 millions de dinars, il y a de quoi se pencher sur ce problème pour y apporter les solutions adéquates.