Et si on interpellait les SalafistesQuel avenir pour la chose religieuse en Tunisie ? La question a été l'objet d'une rencontre entre Noureddine Al Khademi, ministre des Affaires religieuses et des représentants de partis politiques, mercredi en fin d'après-midi, qui a servi, un tant soit peu, de catalyseur pour mesurer le degré de religiosité de la Tunisie, un an après l'avènement de la Révolution. Il faut dire qu'on n'a pas à trop se triturer les méninges pour avoir des réponses à cette question tant les signes ostentatoires d'une société qui s'enfonce de plus en plus dans l'hypocrisie sociale se font de plus en plus sentir. Il suffit d'observer un peu ceux qui nous entourent pour dresser le bilan d'une situation arrivée actuellement à son summum. Notre relation avec le religieux se limite-t-elle à l'habit qui désormais fera des Musulmans et ceux qui le sont moins ? Notre relation à la divinité se mesure-t-elle à nos allers-retours aux mosquées et à dans cette espèce d'empressement à montrer son repentir. Ces questions nous hantent tant les ‘'fous d'Allah'', qui une année auparavant étaient peu visibles dans une société qui n'affichait pas sa religiosité, veulent, aujourd'hui et à tout prix imposer leurs dictats. Ceux de l'apparence, bien entendu, car ces derniers ne sont d'aucune force de persuasion pour guider notre spiritualité ou pour nous amener vers le repentir.
Le ministre à l'écoute des doléances de l'assistance
Ce qui mérite d'être retenu lors de cette rencontre première en son genre depuis les élections est que le premier responsable du ministère des Affaires religieuses était à l'écoute des doléances des uns et des autres. « Les temps ne sont pas propices aux discussions avant même que les esprits ne se calment et que l'ordre des choses ne soit rétabli. » dit-il avant d'inviter les représentants des partis à s'exprimer sur notre relation au religieux, aujourd'hui. Il va sans dire que des convergences sourdes entourent la question religieuse et que l'on n'arrive plus à démêler le vrai du faux surtout que ceux qui s'improvisent connaisseurs de la chose religieuse font légion. Cette idée a été largement déclinée par le ministre qui a parlé de la Fatwa et ses critères en Islam. Noureddine Al Khademi s'est montré rassurant, par ailleurs, en rappelant que l'acceptation de l'Autre, quel que soit son appartenance religieuse, est une valeur irréfutable en Islam. En invoquant des versets du Coran, il a montré également que nos différences nous enrichissent, et devraient nous rapprocher plutôt que nous séparer. Les représentants des partis étaient assez disparates dans leurs prises de position pour comprendre que le conflit religieux qui se profile sous nos cieux et qui date de seulement quelques mois aura encore du temps avant même de les voir se désamorcer. L'irruption du fait religieux en politique en est bien la cause primordiale. Et c'est à nos politiques de rappeler « à ceux qui veulent changer le mode de vie des Tunisiens selon des schémas sociaux qui nous sont étrangers, que la loi qui régit notre vie, ne peut en aucun cas être bafouée. L'Etat, en effet, doit exercer le rôle qui lui échoit pour mettre de l'ordre dans la société.» avance Mustapha Masmoudi, le Secrétaire général du mouvement de « la Tunisie nouvelle ». Plus grave encore est la loi du silence que le gouvernement n'a pas encore brisé et qui selon Abdelkader Zitouni, le Secrétaire général de « La Tunisie verte », « ne le fait pas démarquer des salafistes », « Qui ne dit mot consent », dit l'adage dans ce sens. Bon nombre parmi les représentants des partis politiques ont évoqué, dans la foulée, un phénomène qui prend de l'ampleur ces derniers temps et qui consiste en la constitution de « comités salafistes ».
Ces derniers et selon les témoignages, des uns et des autres, prennent d'assaut la direction des mosquées en faisant régner la loi du plus fort. On a cité l'exemple des « comités salafistes » qui sont au nombre de trois du côté de l'Ariana. Toujours dans les mosquées et notamment en ce qui concerne les prêches du vendredi, Mohamed Goumani, le Secrétaire général du parti de la « Réforme et du développement » a appelé ceux qui nous gouvernement à hisser le niveau du discours religieux en faisant appel à des connaisseurs en la matière pour en parler. Il a évoqué également le dénominateur commun religieux qui caractérise les Tunisiens et qui ne devrait pas dévier de la ligne de la modération. Le radicalisme religieux était le principal sujet de débat ayant amené Ahmed Khaskhoussi du parti MDS à rappeler que la religion ne doit pas être instrumentalisée à des fins politiques et Habib Ziadi du PCOT à s'indigner de voir que toute l'attention de l'opinion publique a été orientée vers des débats vains sur l'identité arabo-musulmane, alors que la question est résolue d'avance. « Des fauteurs de troubles renchérissent sur la question de l'identité alors que la Tunisie est arabo-musulmane du fait de son appartenance depuis l'ère du temps au monde arabo-musulman. D'autres questions plus urgentes attendent les Tunisiens.» dit-il.