• Le gouvernement prendra-t-il la peine de les étudier ? Considérés souvent comme le léviathan médiatique, la presse écrite, électronique et audiovisuelle tunisienne postrévolutionnaire, est tiraillée entre le politiquement correct et le mea culpa avec le citoyen. Une insatisfaction orchestrée de part et d'autre. Oui, les médias ont besoin de réforme. Mais pas n'importe laquelle. Des voix s'élèvent pour «assainir» voire «décapiter» les médias surtout publics. D'autres voix aussi s'élèvent pour réclamer l'auto-réforme. Seuls les experts médiatiques sont aptes à aider à la résurrection. Le chantier est ouvert. Et pour le mener à bien, l'Instance Nationale de la Réforme de l'Information et de la Communication vient de publier son rapport et de l'émettre au gouvernement. Pourvu qu'on y trouve une oreille attentive. Lors d'une conférence de presse ayant eu lieu hier, au palais des Congrès, le président de l'INRIC, M. Kamel Laâbidi a remis au gouvernement le rapport final de l'instance. Après avoir rappelé l'état dans lequel étaient les médias tunisiens du temps de Ben Ali et la situation conflictuelle dans laquelle se trouve le secteur médiatique, le président de l'INRIC a étayé que la réforme est en cours mais doit être soutenue par les pouvoirs exécutif et législatif. Il a, notamment rappelé la suprématie d'un média pluraliste, neutre, affranchi de toute tutelle et travaillant dans la transparence. Appel à la création d'une haute instance indépendante L'instance a compté sur les rapports qui ont été rédigés par plusieurs sociétés civiles et des instances professionnelles nationales et étrangères spécialisées dans le secteur des médias et de la communication. L'écriture du rapport a été le résultat d'une kyrielle de consultations d'expériences étrangères, surtout celles des pays ayant connu un processus démocratique similaire au nôtre, à l'instar de la Pologne, la République Tchèque ou encore l'Afrique du Sud. Plusieurs échanges ont, effectivement, eu lieu avec les directeurs et responsables des institutions médiatiques publiques et des établissements académiques, tout en se focalisant sur les outils de réforme qui garantiraient l'indépendance des médias de tout pouvoir politique surtout à l'échelle de la décision politique et administrative. Un grand nombre d'émérites spécialisés dans la défense de la liberté de la presse et de l'information et d'anciens journalistes militants assujettis par le régime défunt, ont participé à la rédaction du rapport final de l'INRIC. Le souci était d'élaborer un rapport répondant aux normes internationales de la liberté de la presse et aux attentes des citoyens, à savoir un média indépendant et neutre. Réformer, former et protéger les médias Le rapport final est réparti sur dix chapitres, se rapportant à la nouvelle situation du secteur de l'information et de la communication et prenant en compte tous les genres journalistiques: presse écrite, électronique, médias audiovisuels, le journalisme d'agence et le journalisme régional. Sur le plan de la restructuration, il a été question de la communication gouvernementale, la publicité et la formation des journalistes, les établissements publics, les organisations professionnelles et l'observation des médias. Dans un 1er chapitre, intitulé «Le nouveau cadre juridique du secteur médiatique», il s'agit des trois décrets de lois préparés par l'INRIC. Tout d'abord, le décret numéro 41 de l'année 2011 (l'accès aux documents administratifs des établissements publics). Ensuite, le décret 115 de la même année qui se rapporte à la liberté de la presse et de la diffusion. En dernier lieu, le décret 116 de l'an 2011 qui s'occupe de la liberté de la presse audiovisuelle. Le point fort de ce premier chapitre c'est l'appel à la création d'une haute instance indépendante de l'audiovisuel. Le second chapitre, qui concerne la presse écrite et électronique, s'est d'abord penché sur la situation des médias depuis l'indépendance. Il a relaté les différentes contraintes qui ont chamboulé le paysage médiatique et les problèmes de diffusion et d'impression, l'absence d'un cadre juridique et la non reconnaissance des journalistes-web pour la presse électronique. Dans ce chapitre, l'INRIC propose des recommandations pour réparer les dégâts et dépasser le déficit. Quant à la situation critique des établissements médiatiques publics audiovisuels, elle a été insérée dans le chapitre 4 dudit rapport. L'instance soutient qu'il faudrait protéger ces institutions par des textes de loi afin d'assurer la transparence dans leur travail. Par ailleurs, les médias régionaux, esquivés et marginalisés, de par le passé, ont été mentionnés dans un 5ème chapitre du rapport. Les experts ont, d'abord, énuméré les diverses contraintes qui ont fait que ce secteur ait été opprimé et laissé-pour-compte. Ensuite, ils ont proposé des recommandations au gouvernement pourvu que la presse régionale soit intégrée dans le cycle médiatique et avoir les outils adéquats pour mener à bien leur travail de porte-parole régionale.