Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.
Marzouki menace de démissionner et appelle l'Assemblée constituante à se prononcer sur un «empiètement» sur ses prérogatives» Extradition de Baghdadi Mahmoudi Comédie de la Troïka ou grande discorde?
L'extradition de l'ancien Premier ministre libyen Baghdadi Mahmoudi, dimanche, sans l'accord préalable de la présidence de la République a provoqué une crise ouverte au sein de la troïka au pouvoir. La vive réaction du porte -parole de la présidence de la République, Adnène Mancer à cette extradition laisse présager un véritable bras de fer entre le mouvement Ennahdha qui détient les portefeuilles clefs au sein du gouvernement et son allié de gauche, le Congrès pour la République (CPR), dont le fondateur a été porté à la magistrature suprême. M. Mancer a déclaré que l'extradition de Mahmoudi est illégale. «Cette décision unilatérale prise par le Chef du gouvernement n'est ni légale, ni légitime. Elle crée une grave crise politique dans le pays», a-t-il déclaré.
S'exprimant, dimanche au journal de 20 heures de la première chaîne nationale de télévision, le porte-parole de la présidence a fait savoir que le Chef de l'Etat n'a été informé de la décision par le chef du gouvernement que dimanche vers le coup de 16 heures, soit plusieurs heures après l'extradition de l'ancien Premier ministre de Kadhafi, lequel a quitté le sol tunisien à 05h00 du matin dimanche, en direction de Tripoli, selon son avocat Mabrouk Kourchid. « Le président de la république n'a pas été consulté ni n'a donné son accord. Il n'en a d'ailleurs été informé par le chef du gouvernement que dimanche vers 16 heures. «Les services de la présidence avaient appris la nouvelle par les médias», a précisé M. Mnasser. Et d'ajouter : « l'extradition de M. Mahmoudi ne pouvait s'effectuer selon les dispositions de la constitution de 59, aujourd'hui dissoute, mais selon celles du code de procédures pénales, qui stipule notamment dans son article 324 que le président de la république doit donner son accord et signer une pareille décision».
Atteinte à l'esprit consensuel
Le conseiller du Président de la République a estimé, par ailleurs, que la décision d'extrader l'ancien responsable libyen est aussi «illégitime d'un point de vue politique car elle met fin à l'esprit consensuel qui a prévalu jusque-là au sein de la troïka. Il aussi douté de l'existence d'un rapport final rédigé par de la commission dépêchée récemment en Libye pour examiner les conditions d'un procès juste et équitable à l'ancien Premier ministre libyen dans son pays. Le gouvernement avait souligné dans un communiqué qu'«un rapport d'une commission tunisienne qui s'est rendue récemment à Tripoli a conclu que les conditions d'un procès équitable étaient réunies».
M. Marzouki avait affirmé début juin son «opposition de principe» à l'extradition de M. Mahmoudi, réclamant des garanties du côté libyen sur le respect des droits de l'homme et un procès équitable. Mais le chef du gouvernement, Hamadi Jebali, avait riposté en estimant que la décision d'extradition était «irrévocable» et ne nécessitait pas la signature du président de la République.
Premier ministre jusqu'aux derniers jours du régime Kadhafi, M. Mahmoudi avait été arrêté le 21 septembre en Tunisie alors qu'il cherchait à gagner l'Algérie. Il est demeuré incarcéré depuis, Tripoli ayant à deux reprises réclamé son extradition. La justice tunisienne avait répondu favorablement à cette demande, mais l'extradition, contestée notamment par des associations de défense des droits de l'homme, était restée en suspens, et l'ancien président par intérim Fouad Mebazaâ n'avait jamais signé le décret d'extradition.
L'ANC appelée à arbitrer le conflit
Précision de taille dans ce contexte : à l'heure où s'écrivaient ces lignes, le Forum Démocratique pour le Travail et les Libertés (FDTL ou/ Ettakatol), autre allié d'Ennahdha, n'a pas réagi à la décision du chef du gouvernement d'extrader M. Mahmoudi.
Quoi qu'il en soit, la réaction risque de porter un coup dur à la survie de l'alliance nouée entre Ennahdha et ses deux alliés. Selon son porte-parole, le président de la République a menacé de démissionner, avant de décider de soumettre à l'Assemblée nationale constituante (ANC) ce qu'il a qualifié de « transgression de ses prérogatives» concernant l'extradition de Baghdadi Mahmoudi aux autorités libyennes, afin de prendre les dispositions qui s'imposent, conformément à l'article 20 de la loi portant organisation provisoire des autorités publiques.
Dans une déclaration écrite publiée hier, le porte-parole officiel de la présidence de la République a noté que la remise de Mahmoudi aux autorités libyennes «relève de la politique étrangère de la Tunisie plus que du domaine de la magistrature et que la politique étrangère relève des prérogatives de la présidence de la République », précisant qu'en cas de litige, il convient de consulter l'ANC.
Hier, le ton était, toutefois, à l'apaisement, au sein du CPR. «Il y a un malentendu qu'il ne faut pas exagérer», a déclaré le ministre de l'emploi membre du CPR Abdelwahab Maâttar. «A-t-on vraiment intérêt dans la situation actuelle du pays de déclencher une crise ? Le président a raison d'être en colère, mais il faut encaisser cette fois-ci et préserver la troïka », a-t-il ajouté. Le porte-parole d'Ennahda, Néjib Gharbi, a, lui aussi, minimisé la portée du différend, estimant que «la troïka n'est pas menacée».