Les Tunisiens sont devenus des adeptes inconditionnels des grandes surfaces et autres centres commerciaux modernes, qu'ils visitent en famille et où ils achètent tout et n'importe quoi. Les affichettes colorées et autres prospectus publicitaires, en plus de la profusion des produits, contribuent à rendre fous tous les membres de la famille et à ruiner le plus équilibré des consommateurs.
Hier, c'est le rayon des fruits de l'un de ces centres commerciaux que nous avons visité et là les prix nous ont laissé ahuris, interloqués, pantois. D'abord il n'y a aucun fruit au dessous de un Dinar le kilo. Puis leur qualité laissait vraiment à désirer, puisque la chaleur a vite fait des les flétrir, de les gâter, malgré la climatisation.
Bien sûr dans ces espaces vous avez la possibilité de choisir un par un les fruits désirés et vous pouvez acheter le poids que vous voulez. Mais en contrepartie, on vous propose des pommes vertes, mais apparemment bien mûres à 3D680. Les poires Williams, pas très grosses sont à 2D300. Les pêches rondes sont à 1D785, tandis que les pêches plates culminent à 5D750.
Les nectarines, ce mixage de prune et de pêche, sont à 1D495. Les raisins de table sont ici à 3D990, alors que leur gabarit ne semble pas particulièrement développé. Les prunes rouges, plutôt fatiguées, sont à 2D180. Les pastèques, vendues en tranches enveloppées dans du papier cellophane, varient de un à deux Dinars la tranche.
Le pire dans toute cette histoire, c'est que ces fruits sont tous produits chez nous et non importés de contrées lointaines. Leur prix élevé ne peut donc être justifié par des frais de transport ou par des taxes douanières. Les fruits importés, eux, sont si coûteux qu'on vous les propose à la pièce, comme c'est le cas de l'avocat à 650 Millimes ou de l'ananas à plus de cinq Dinars l'unité.
L'avantage de choisir vous-mêmes les produits et les quantités que vous désirez ne justifie en rien de tels prix. Les commerciaux de ces grandes surfaces expliquent cette situation en assurant que les pertes sont énormes, pouvant atteindre plus du tiers des fruits exposés. En effet, les consommateurs ont tendance à malaxer plusieurs fruits avant d'en choisir un qui puisse satisfaire leurs exigences...
Mais ces mains des clients qui palpent, qui tâtent, qui examinent chaque fruit, au point d'en envoyer un grand nombre à la poubelle, ne peut justifier ces prix élevés. Les grandes surfaces devraient trouver une solution qui puisse satisfaire les deux parties, afin que nul ne soit lésé.
Nous voyant noter les prix de chaque fruit, de nombreux clients se sont plaints à nous de cette situation. La plupart d'entre eux ont d'ailleurs quitté ce rayon sans rien acheter, préférant aller faire un tour du côté des marchands de fruits. Ils ont estimé que quels que soient les trafics auxquels ceux-ci se livrent, ils restent plus rentables que les grandes surfaces.
C'est là qu'un commercial est intervenu pour tenter une explication aussi complexe que peu crédible. Ce à quoi une dame a répondu vertement en résumant la situation grâce à un proverbe tunisien bien connu : « si le commerçant te propose de faire une bonne affaire, dis-toi bien que le bénéfice principal sera pour lui ! »