De nombreux tunisiens sont absolument convaincus que l'on fait de juteuses affaires dans les grandes surfaces et autres centres commerciaux. Mais une analyse minutieuse montre qu'on s'y fait rouler dans la farine, sans vergogne, sans aucune gêne. Ces grandes surfaces ont en effet pris le chemin tortueux des Européens et des Américains où l'on monte des combines juteuses, voire vicieuses, pour vous arnaquer, pour vous arracher vos pauvres Dinars par paquets... Le prix du kilo de poulet est fixé à 4D900 ? Ils inventent le poulet découpé et vous font payer ce découpage, poussant le prix au kilo à 5D200 ! Puis ils débitent le pauvre poulet en diverses parties, toutes plus chères les unes que les autres. Les hauts de cuisse de poulet sont à 7D500, les pilons à 8D200 et les filets qui atteignent des sommets à 9D500 le kilo. Comment les clients se laissent-t-ils leurrer ? C'est grâce à l'emballage ! On vous propose de petites quantités dans des barquettes blanches, protégées par du papier cellophane. Le prix affiché ne dépasse généralement pas deux ou trois Dinars, pour quelques centaines de grammes. Certes le prix du kilo est inscrit sur ces barquettes, mais il est affiché en caractères microscopiques, qu'on n'a pas le temps de lire dans cet espace, où l'œil est sollicité en permanence par mille images, mille messages publicitaires. Toujours au rayon boucherie, la viande hachée bovine est présentée dans des barquettes de trois cent grammes pour quatre Dinars en moyenne. En fait le kilo de cette viande mélangée avec toutes les parties médiocres du veau revient à onze Dinars, ce qui est en réalité le prix d'un morceau de bonne qualité. Autre aberration : alors qu'au marché on peut acheter un kilo de maquereaux autour de cinq Dinars, ici on vous vend des boîtes de 170 g, soit 500 grammes, de filets de maquereaux baignant dans un peu d'huile d'olive à plus de 8 Dinars. Le gag, c'est qu'il s'agit d'une promotion où on vous affirme que vous faites une bonne affaire, car le prix d'origine de ces 500 grammes s'élève à près de 13Dinars, soit environ 25 Dinars le kilo ! Même chose pour le thon à l'huile d'olive vendu à 2D490 les 180 grammes, alors qu'au marché ce poisson ne dépasse pas les six Dinars. Et on ose à peine parler du scandale des sardines en boîte, qui ne contiennent jamais plus de cinq pièces, vendues près d'un Dinar alors que le kilo tourne autour de 1D600. Un scandale ! Autre arnaque : les petites boîtes de maïs coûtent très cher par rapport à la matière première. Le lot de trois boîtes vaut pratiquement cinq Dinars pour un poids global de 450 grammes. C'est près de dix fois le prix des grains de maïs vendus en vrac. On est très loin de ces épis de maïs grillés que l'on achetait à trois cent Millimes sur les routes de Tunisie. Au rayon fruits et légumes, on vous offre l'avantage de choisir vous-mêmes les produits et les quantités que vous désirez. En contrepartie, on fait flamber les prix. Interrogé à ce propos, un agent nous a déclaré : « près du tiers des fruits et des légumes sont tellement malaxé par les mains des clients, qu'ils finissent à la poubelle et il faut bien que quelqu'un paye ces déchets… » Le pire dans cette histoire c'est que les clients sont des victimes consentantes, qui sont en plus convaincus qu'ils font de bonnes affaires ! Aveuglés par les lumières, le bruit, les affichettes qui leur promettent monts et merveilles, ils ne voient pas les pièges sournois tendus par la grande distribution. Des pièges sournoisement tendus dans des bureaux feutrés par des spécialistes en gestion et même en psychologie. On est loin du folklore des marchés populaires ici les arnaqueurs sont des pro !