«Je ne suis pas le coach de Hamadi Jebali. Car autrement beaucoup de choses n'auraient pas eu lieu» L'ex-premier ministre de Ben Ali ne dit pas trop de mal de ce dernier. Cela se comprend, car s'il l'avait fait il se serait renié lui-même et avec les années passées à la tête du gouvernement. Des années au cours desquelles selon ses dires la Tunisie a connu un taux de croissance économique de 5%, grâce en grande partie à l'équipe compétente qu'il dirigeait.
Pour Hamed Karoui le 7 Novembre avait sauvé le pays, mais il passe sous silence les dérives qui ont conduit à la corruption, aux inégalités sociales, à l'injustice dont furent victimes les militants des droits de l'homme et les opposants de tout bord.
Il dit même qu'il n'était pas très au courant de la torture qui sévissait dans le pays.
L'ancien premier-ministre affirme qu'il est destourien qui aime Bourguiba. De l'œuvre de ce dernier il n'a parlé que du statut du code personnel mais en deux mots. Mais le plus important en parlant de Bourguiba est l'affirmation de H. Karoui que la dictature avait commencé avec lui. Ben Ali si on comprend bien n'a fait que continuer l'œuvre. Mais cette dictature de Bourguiba était aussi l'œuvre de l'U.G.T.T dont les dirigeants ont accepté de se mettre sous l'aile du partir de Bouguiba.
Voilà qui est dit de manière très subtile : Bourguiba et l'U.G.T.T sont responsables de la dictature.
Par ailleurs, l'anecdote citée sur Bourguiba dans sa prison en France atteste que Karoui ne porte pas vraiment Bourguiba dans son cœur, puisque ce dernier dans l'un de ses discours affirmait le contraire de ce qu'il avait demandé à Mohamed Masmoudi dans la communication téléphonique qui eut lieu en sa présence.
Ses rapports avec le M.T.I (future Ennahdha)
Sa relation avec le mouvement islamiste remonte à très loin (début des années 1980) du temps du gouvernement Mzali. Une relation tissée par les soins de son fils surtout avec l'actuel président du gouvernement Hamadi Jebali (un ami).
Cette relation s'est renforcée après le 7 novembre 1987, l'octroi du récépissé du journal « Al Fajr » et affirmée davantage avec la signature du « Pacte National » signé par Ennahdha dont-il affirme que les listes qu'elle avait parrainées n'auraient pas recueillie la majorité lors des élections de 1989.
L'ancien premier ministre affirme qu'il n'a jamais fait partie du gouvernement de l'ombre et n'a jamais conseillé Hamadi Jebali et s'il avait été son coach, beaucoup de choses n'auraient pu avoir lieu. Clin d'œil on ne peut plus explicite à l'adresse de « l'ami Jebali ». Ce dernier saura-t-il saisir la perche tendue ? Cela ne dépend pas en grande partie de lui. Il y a tout un parti qui est derrière lui et dont la stratégie peut ne pas tolérer cette sorte de collaboration même si, H. Karoui a fait miroiter avec maestria une très possible association dans les affaires de l'Etat des destouriens et Rchédistes qui n'avaient pas trempé dans la corruption du temps du règne de Ben Ali et n'avaient pas pris part aux dérapages sécuritaires au cours de cette même période.
Hamed Karoui dont le message est on ne peut plus clair ouvre une brèche par laquelle les destouriens et les Rcédistes pourront s'engouffrer et aller apporter leur savoir-faire et surtout leur soutien au parti Ennahdha qui dirige le pays. C'est un appel clair au gouvernement pour qu'il prenne en compte cette donne pour sortir un tant soit peu de l'état actuel de crise politique, économique et peut être aussi sociale. Une manière comme une autre pour priver « Nida Tounès » de cette réserve électorale et la mettre au service du nouveau pouvoir.
D'ailleurs on ne sait si c'était par omission ou par calcul le volet Nida Tounès n'a pas été évoqué lors de l'interview.
Pour l'ex-Premier ministre c'est de soutien qu'on doit parler pour vraiment aider le gouvernement. Il a d'ailleurs beaucoup insisté sur le terme contredisant ainsi et clairement, l'esprit de soutien critique qui suggère concertation pour un éventuel accompagnement, prôné par M. Béji Caïd Essebssi.
Au fil de l'entretien on décèle clairement que Hamed Karoui a choisi son camp, tout en demeurant quelque peu critique sur certaines questions. Un choix qui implique aussi que le pouvoir en place devra faire un geste et donner des signes rassurants aux destouriens et Rcédistes non corrompus.
Mais est-ce que ces derniers partagent cette même vision avec celui qui était directeur du P.S.D et membre du Bureau politique du R.C.D ? Peu probable qu'ils l'entendent de cette oreille et lui prêtent beaucoup d'attention après avoir été décriés et mis à l'index durant deux années et ils continuent de l'être encore.