Tout l'Ouest du pays, la région d'El Kef en particulier, est en « effervescence ». L'amateur d'histoire constate que, depuis l'Antiquité, le pays avance sur deux « jambes » : celle du littoral : commerçante et celle de l'intérieur : minière et céréalière. Si l'une d'elles souffre, tout le pays « boite ». Même si les demandes des populations locales, qui ont beaucoup attendu, sont présentées avec une « acrimonie » certaine, il ne semble pas que la réponse sécuritaire soit la seule adéquate. Personne ne se souvient-il d'Ali Ben Gh'dhahom ? Questions Nous l'avons écrit : l'Ouest tunisien est principalement agricole et minier. Dans l'état de pauvreté où « l'Ancien Régime » l'a abandonné peut-il avoir envie d'attendre encore ? Pourquoi 250 mille hectares ont-ils été plantés, en céréales, dans la région d'El Kef, devant produire autour de 3 millions de quintaux, alors que les usines agroalimentaires en sont absentes ? Pourquoi le minerai de fer de Jérissa est-il transformé à Menzel Bourguiba sur les berges du Lac de Bizerte ? D'abord, les chemins de fer nationaux, transportent, avec l'argent du contribuable, 30 %, au moins, de terre qu'on pourrait laisser sur place. C'est une aberration économique de transporter des matières premières brutes. Il faut leur faire subir, sur place, une première transformation qui valorise le produit fabriqué et justifie le prix de son transport. Ensuite, n'y a-t-il vraiment rien d'autre à faire du Lac de Bizerte ? Quand on constate ce que les Scandinaves ont fait de leurs fjords en élevant des saumons et les asiatiques de leurs côtes avec l'élevage des crevettes, on reste rêveurs. Les tunisiens ne sont-ils pas capables d'en faire autant ? Les grands marchés européens consommateurs de poisson sont à moins de 2 heures d'avion ! Pourquoi les eaux du Nord sont-elles uniquement conduites vers l'Est ? Pourtant les barrages de Khroumirie sont à moins de 100 kilomètres du Haut Tell qui a de bonnes terres. On pourrait y développer davantage de cultures irriguées et fourragères dans cette région d'élevage. Pourquoi les habitants de l'Ouest seraient-ils pénalisés par les distances qui engendrent des coûts de transport empêchant leurs produits d'être compétitifs ? Alors que l'Ouest est plus riche que le littoral en sites de toutes natures : sites historiques, parcs nationaux, curiosités naturelles (la couche alluviale K/T d'El Haria, voisin d'El Kef, est une référence mondiale !), que le folklore et la gastronomie y sont originaux et bien vivants, où est la promotion touristique de la « Route de l'Ouest » bénéficiant de deux aéroports internationaux, sous employés : Tozeur et Tabarka ? Où sont les dépliants touristiques, les fascicules d'information, les panneaux d'information dans les villes et sur les sites ? Des réponses rapides bien sûr, on ne peut pas tout résoudre tout de suite, à coups de baguette magique. Mais il est des réponses qui seraient symboliques d'une volonté gouvernementale de changer radicalement. L'E.N.A. ne pourrait-elle pas aller s'installer dans l'Ouest ? Utopie ? En France, l'E.N.A., a été transférée de Paris à Strasbourg ! Oui, mais, rétorquerez-vous, elle est près de l'Allemagne, un partenaire privilégié. El Kef, ferons-nous remarquer, est voisin de l'Algérie qui devrait être un « pays frère ». Que fait l'I.N.R.A.T. enclavé dans un quartier résidentiel de Tunis ? Ne serait-il pas mieux dans une région agricole ? Est-il normal que les gens de l'Est aient les grands instituts à côté de leur maison et que les étudiants de l'Ouest doivent quitter la leur pour poursuivre leurs études ? Où sont les académies de médecine ? Y'en a-t-il une seule dans l'Ouest ? Pourquoi ne pas créer tout de suite un vrai « marché gare » au Kef ? Les produits de l'Ouest, rassemblés dans la journée, partiraient le soir et arriveraient sur le marché de gros tunisois à l'aube. En subventionnant un transport économique non polluant : le chemin de fer, le gouvernement ferait que les produits partis d'El Kef seraient à Tunis au même prix que ceux de Grombalia et ne seraient pas pénalisés par la distance. Pourquoi faut-il 3 ou 4 ans pour moderniser la route P.5 Tunis – El Kef, alors que la « route des chinois » joignant Béja à Aïn Draham et n'ayant qu'une utilité économique réduite, a été construite beaucoup plus vite dans un environnement plus difficile ? A-t-on vraiment étudié toutes les possibilités locales ? Pourquoi les Espagnols achètent-ils des zgougou qu'ils transforment en huile ? Pourquoi ne pas le faire en Tunisie ? Une étude réalisée en collaboration avec les Services Italiens, en 2008, stipulait qu'il existait, dans la région, des opportunités industrielles dans 5 ou 6 domaines tels que ceux des céréales et des dérivés, des produits laitiers, des conserves alimentaires, de l'huile d'olive etc. ... Elles n'ont certainement pas disparu. Où sont les zones industrielles, les usines et les incitations fiscales promises ? Sans attendre la mise en place de grands travaux tels que la mise en œuvre de la mine de phosphate (et des usines de transformation !) du Sra Ouertane, les usines agroalimentaires, le tourisme, local, favorisé par le chemin de fer, et l'international, irrigué par 2 aéroports internationaux, l'artisanat du bois – dans une région bien boisée – et de la laine – là où l'élevage du mouton est une tradition – en particulier, devraient permettre de fournir des réponses, même partielles, aux exigences des populations locales.