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«Attention un virage hallucinant»
La classe politique en émoi
Publié dans Le Temps le 07 - 02 - 2013

La Tunisie est en émoi. La violence politique a atteint hier son paroxysme avec l'assassinat à bout portant de Me Chokri Belaïd, secrétaire général du Parti des Patriotes Démocrates Unifié et un des dirigeants du Front Populaire. C'est un assassinat politique rappelle celui de Farhat Hached.
Ce passage survient suite à un week-end houleux où une série d'agressions avait ciblé des réunions de partis politiques de l'opposition ainsi que des locaux de Nida Tounès. En matière de violence politique, après l'assassinat de Lotfi Naguedh à Tataouine, c'est le premier assassinat d'un chef de parti d'opposition. Est-ce prévisible ? Quitte à choquer c'était dans l'air. Est-ce le prélude d'une tentative de libanisation de la vie politique en Tunisie ? Est-ce le modèle algérien qui émigre et rampe dangereusement vers notre pays ? Comment arrêter ce fléau dévastateur ? Réactions d'hommes politiques et membres de la société civile. Ennahdha a réagi, entre autres, par un communiqué, où elle dénonce l'assassinat de Chokri Belaïd qui porte atteinte à la sécurité du pays et sa stabilité.
Abderrazak Hammami (secrétaire général du Parti du Travail Patriotique et Démocratique) : « Il y a une tendance à utiliser la violence pour liquider les concurrents »
« Je suis encore sous le choc de l'assassinat du frère Chokri Belaïd. Je suis solidaire avec sa famille et ses camarades. Nous considérons que le pays est entré dans un virage grave. C'est un crime odieux, à tous point de vue. La gravité du crime réside dans le fait que s'est probablement le début d'un virage catastrophique pour le pays. Auparavant, les différends politiques étaient encadrés selon les règles des débats et de la polémique. Il semble qu'il y a une tendance à utiliser la violence pour liquider les concurrents politiques. La violence n'épargnera personne. C'est un grave tournant. Nous faisons assumer au Gouvernement et au ministère de l'Intérieur la responsabilité de dévoiler les assassins. Personne ne peut justifier la violence, ni l'assassinat politique. J'espère que la Tunisie sortira saine de cette crise. Le peuple tunisien paie le tribut de la Démocratie et de la transition démocratique. Aucun pays arabe ne connaît la transition démocratique de la Tunisie. Le chemin de la Démocratie n'est pas semé de roses ».
Mohamed Bennour (porte-parole d'Ettakatol) : « la Révolution n'a pas besoin de comités pour sa protection »
« C'est un acte lâche et terroriste. C'est un coup dans le dos de la Révolution et de la liberté. Nous faisons porter la responsabilité de cet acte à ceux qui ont planifié et exécuté ce crime visant à attiser le feu dans le pays pour détruire tout ce que les forces démocratiques ont voulu bâtir. Ceux qui ont planifié ce crime ont pour objectif de mettre en échec le processus de transition démocratique. Chokri Belaïd comme tous les Tunisiens y a pris part avant le 14 janvier. Je fais porter la responsabilité de cet acte à ceux qui dernièrement, ne faisaient que jeter de l'huile sur le feu. Ils pensent à tort qu'avec la violence tout peut aboutir. Je vise fondamentalement et principalement les Ligues de protection de la Révolution et ceux qui les soutiennent. J'ai dit à plusieurs reprises que la Révolution n'a pas besoin de comités pour sa protection. Le peuple est appelé à s'unir et à être solidaire pour défendre la liberté et la démocratie ».
Ridha Belhaj (Directeur exécutif de Nida Tounès) : « La responsabilité politique revient au gouvernement et à Ennahdha »
« C'est un assassinat politique et un virage qui nous rappelle le glissement du Liban dans une guerre civile. Au pays du cèdre, l'évolution vers la guerre civile a commencé par les assassinats politiques devant le laxisme de l'Etat et l'encouragement des crimes par d'autres partis politiques. Indépendamment de ceux qui ont exécuté l'assassinat, la responsabilité politique revient au gouvernement et à Ennahdha avec ses déclarations encourageant la division entre Tunisiens. Chokri Belaïd a combattu la dictature depuis longtemps et milité contre le despotisme religieux. Son assassinat nous fera redoubler de confiance et d'efforts pour défendre la Tunisie devenue un terrain fertile pour les terroristes ».
Maher Hanin (dirigeant à Al-Joumhouri) : «Il n'est pas question que l'actuel ministre de l'Intérieur demeure en poste »
« Comme tous les Tunisiens, nous sommes choqués et étonnés par le passage de la violence politique à l'assassinat par balles. Al-Joumhouri n'a cessé d'attirer l'attention sur les appels à la violence proférés dans les mosquées. Chokri Belaïd a déjà déclaré qu'il était la cible de menaces. Le ministère de l'Intérieur n'avait pris aucune mesure préventive. Il n'est pas question que l'actuel ministre de l'Intérieur garde son poste. Il n'est pas possible d'avoir un procès équitable avec l'actuel ministre de la Justice. Il n'est pas non plus possible d »'organiser des élections dans ce climat ».
Mohamed Kilani (secrétaire général du Parti Socialiste) : « cela entre dans le cadre du projet de domination de la société »
« L'assassinat d'aujourd'hui entre dans le cadre de l'application du projet et du plan des obscurantistes qui sont passés au stade la liquidation physique. Ils iront vers la liquidation pure et simple de l'élite de la société (journalistes, artistes et intellectuels) à l'instar de ce qui s'est passé en Algérie et dans toutes les expériences de liquidation dans l'histoire. Il s'agit de pratiquer la violence pour maîtriser la société. C'est un pas franchi par une équipe qui ne peut être isolée. Son action entre dans le cadre du projet de domination de la société ».
Abdejlil Bédoui (vice-président d'Al-Massar) : « Ennahdha et ses alliés n'ont qu'un souci, garder le pouvoir »
« Le pays se dirige vers le gouffre avec les mouvements religieux. J'appréhendais ce genre de drames pour des raisons objectives. Pour la première fois, la Tunisie est devenu un marché d'armes au vu et au su de tout le monde avec des produits et des prix connus de tous. Les opérateurs dans ce marché disposent d'appuis financiers incontrôlés. En même temps, nous avons des courants politiques extrémistes qui font de la violence leur méthode de travail. La conjugaison de ces deux facteurs ne peut être qu'explosive dans un contexte d'affaiblissement de l'Etat et d'une situation sociale détériorée. Ces ingrédients ne peuvent conduire qu'à la violence, dans un contexte où Ennahdha et ses alliés ont montré une incompétence évidente. Ils n'ont qu'un souci, garder le pouvoir. La montée de nouvelles forces politiques, leur échec, incompétence et irresponsabilité, font que certains parmi eux poussent le pays vers le chaos pour prendre l'ascendant et la maîtrise de la société. J'espère que ça ne soit pas le début d'un processus qui va s'amplifier. J'espère que toute la société se dresse en un seul bloc pour sauver notre pays et nos générations futures. Nous ne devons pas leur laisser une situation lamentable ».
Jawhar Ben M'barek (coordinateur de Doustourna) : « les assassins ont eu le feu vert »
« Je suis encore sous le choc. C'est une catastrophe et un virage très grave. Aujourd'hui, nous ne pouvons pas évaluer la gravité du danger. C'est le scénario algérien au vrai sens du terme. Toutes les hypothèses sont possibles. La perte de Chokri Belaïd est très grande pour le mouvement démocratique. Je l'ai connu lycéen militant, étudiant militant et avocat militant. Les responsabilités de ce crime sont claires. Je ne sais pas s'ils vont parler de crise cardiaque. Le plus important, ce n'est pas qui a tiré les balles. Le plus important est que, politiquement le Gouvernement et Ennahdha en sont responsables. Ils ont justifié et légitimé la violence tout en mobilisant leurs troupes. Leurs alliés au pouvoir, considérés comme des Démocrates, Moncef Marzouki et Mustapha Ben Jâafar sont aussi responsables. Ils ont donné le feu vert aux assassins».
Lotfi Azzouz (directeur exécutif de la section de Tunis d'Amnesty International) : « le gouvernement est responsable de la situation actuelle »
« C'est un choc. Un assassinat politique est une opération très grave. Elle ne s'est pas produite, même sous Ben Ali. C'est une atteinte au droit international. Le Gouvernement doit assurer la sécurité des citoyens, garantir la liberté d'expression et le droit de s'organiser. Chokri Belaïd a été assassiné pour ses positions franches. Il faut faire face à la violence tout en garantissant les droits de l'Homme et les libertés. Le pays était ouvert à toutes les formes de violence à cause de la tolérance dont bénéficiaient ses auteurs. Elle se limitait à agresser des réunions. Avec la circulation des armes et l'impunité, on est arrivé là. Le gouvernement est responsable de la situation actuelle ».
Habib Marsit (militant des Droits de l'Homme) : « Il faut combattre la violence de manière pacifique et civilisée »
« Depuis des mois je disais que tous les ingrédients d'une guerre civile se mettaient en place, avec les Salafistes jihadistes, les Ligues de protection de la Révolution, les Imams extrémistes dans les mosquées, la faiblesse de l'Etat...La vague de violence était prévisible, mais pas à ce degré. Après l'assassinat de Lotfi Naguedh, on voyait des escarmouches, des attaques contre des réunions politiques, mais passer directement à l'assassinat de dirigeants avec une telle vitesse est surprenant. Des dirigeants de l'opposition ont reçu des menaces. Je suis encore sous le choc. Il faut retenir les leçons des drames qu'ont vécus le Liban et l'Algérie. Il faut combattre la violence de manière pacifique et civilisée, pour faire face aux hordes fascistes qui ne reculent devant rien de tout. Il ne faut pas tomber dans le piège des affrontements. Les Algériens ont payé un lourd tribut de 250 mille à 300 mille martyrs. Le Liban a subi 20 ans de guerre civile. L'Irak et la Somalie connaissent de grands problèmes aujourd'hui. Le peuple et les élites doivent résister de façon globale et éviter les réactions sentimentales. Il faut tirer les leçons des expériences qui nous ont précédés, à tête froide. Ce sont des hordes qui n'ont pas de scrupules ni de respect pour autrui. Ils ont attaqué l'ambassade américaine, les lieux sacrés populaires...La vie d'un être humain, pour eux, est aussi futile que celle d'une mouche. Demain, ils peuvent fabriquer des bombes. Il faut agir avant que la Révolution ne soit avortée ».


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