Monétique: Plus de 7 millions de cartes bancaires en circulation au premier trimestre    Economie tunisienne : divergences entre le FMI et la Banque mondiale    Tunisie – Energie renouvelable: Voltalia remporte un projet de 130 mégawatts près de Gafsa    Honteux !    Météo de ce vendredi    Nouvelles restrictions commerciales américaines contre des entreprises chinoises    Poutine renomme Mikhaïl Michoustine comme Premier ministre après les élections    Mahamat Idriss Déby Itno réélu à la présidence du Tchad avec 61% des voix    Pressions croissantes sur les approvisionnements mondiaux de blé : les enjeux et les défis    Sonia Dahmani convoquée par la justice    Tunisie – Enfidha : Arrestation d'un dealer de Cannabis    Tunisie – Rahoui : L'ARP et le gouvernement travaillent contre les choix et politiques de Saïed    Tunisie – Migration clandestine : Nabil Ammar s'entretient avec son homologue libyen    Hausse de 18% des investissements étrangers au premier trimestre 2024    Programme des huitièmes de finale de la Coupe de Tunisie    376 morts sur les routes et 2204 blessés en à peine 4 mois    Féminicides: 25 femmes tuées en 2023    La Mechouia et Omek Houria dans le TOP 10 des meilleures salades au Monde    Le Commandant Ahlem Douzi reçoit le prix "Trailblazer" de l'ONU (vidéo)    « La Tunisie de jadis et de naguère » nouvel ouvrage de Mohamed El Aziz Ben Achour, retrace l'histoire riche et complexe de la Tunisie    City Cars Kia renouvelle son partenariat avec le Tennis Club De Tunis et présente la 18ème édition du « Kia Tunis Open »    Un séminaire sur la Philosophie et monde arabe : quelles perspectives face aux crises et à la révolution technologique ?    Fermeture temporaire de l'église Saint-Louis à Carthage    Suite au déploiement des chars de l'armée sioniste dans la ville de Rafah : La Tunisie appelle les peuples libres du monde à se tenir debout contre les massacres commis à l'encontre des Palestiniens    Transition énergétique : Le gouvernement accélère la cadence    La Nasa finance le projet d'un système ferroviaire sur la lune !    2ème édition du manifestation « un monument... et des enfants... » au Palais Abdellia    Tournoi de Rome : Ons Jabeur connaît son adversaire    Avis de grève des agents de la SNCFT    Union européenne –Tunisie : Aux jeunes qui donnent le cap !    Les recettes des exportations d'huile d'olive en hausse de 91%    La répression contre les universités françaises s'intensifie : à quand la fin du scandale ?    Exposition personnelle de Rym Hajjem à la Galerie Saladin : Des œuvres picturales pleines de vie et de fraîcheur    Ce vendredi, au Rio, Projection et débat : «Bye Bye Tibériade» et la Nakba en toile de fond    Chokri Hamda : nous devrions recevoir la réponse de l'Agence antidopage dans un délai de quinze jours    EXPATRIES : L'EST veut récupérer Montassar Talbi    Rallye Tanit : Plus de cent motards au rendez-vous!    Qui peut le plus, peut le moins… : A table avec le Stade Tunisien    Hommage à un héros méconnu, le Dr Fadhel Samir Ftériche, "le chirurgien des pauvres"    Grève générale des avocats à Kasserine    Sourires, chantages et quelques marchandages    Météo : Temps partiellement nuageux avec des pluies éparses    Chaima Issa condamnée à un an de prison    Manifestations étudiantes et soutien académique à la cause palestinienne : la ministre allemande de l'Education sous le choc !    Tunisie : appel à la solidarité mondiale contre les crimes sionistes    La troupe "Mâlouf Tunisien Paris" en concert le 11 mai à Paris    Jabir Ibn Hayyan: Le «père de la chimie expérimentale»    Retour sur «Danse pour tous» au Théâtre de l'Opéra de Tunis à l'occasion de la Journée internationale de la Danse : 10 heures de danse non-stop    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Qui a vu le jour avant : l'Espérance de Tunis ou le Club Africain ?
Controverse
Publié dans Le Temps le 27 - 02 - 2013

Depuis que le sport existe en Tunisie, nous avons toujours entendu dire que l'Espérance Sportive de Tunis est le doyen des clubs tunisiens. Pour tous les sportifs tunisiens...ou presque, c'est une certitude. Aujourd'hui, cette thèse est contestée. En fait, elle l'est depuis quelques années, tout au plus quatre ou cinq.
Depuis, que les Clubistes ont commencé à creuser dans ce sens pour prouver le contraire... Nous avons voulu en savoir plus et éclairer la lanterne des Tunisiens. Nous avons ainsi donné la parole à Lotfi Ezzahi auteur du livre "Aux origines du Club Africain et du mouvement associatif sportif". Un ouvrage qui retrace la vie du Club Africain depuis son avènement jusqu'à nos jours. Côté espérantiste, qui mieux que Ameur Bahri pour réagir à la version clubiste ? Il est à l'Espérance depuis des décades et a même porté ses couleurs. Est-ce le plus important ? Certainement pas. Toujours est-il, il nous fallait creuser dans ce sens pour que le dossier soit définitivement clos. De notre côté, on se limitera à vous proposer les deux versions sans donner notre avis sur quoi que ce soit. A nos lecteurs de juger...

Ameur Bahri (Secrétaire Permanent de l'EST) :
«On n'écrit pas l'histoire avec des hypothèses et des déductions»
En acceptant l'invitation du quotidien « Le Temps » de revenir sur le sujet controversé relatif à la création de l'Espérance Sportive de Tunis et du Club Africain, mon intention n'est pas de prouver, une fois de plus, l'antériorité de l'Espérance en tant que premier club de football authentiquement musulman en Afrique du Nord, cela a été maintes fois démontré par des documents officiels et des témoignages unanimes, mais de rétablir dans leur vérité historique des faits qu'on s'est permis d'interpréter en toute liberté subjective.
Outre les documents officiels, ce leadership lui est reconnu par des historiens notamment français de renom dont Paul Dietschy, Maitre de conférences, spécialisé dans le domaine du sport et particulièrement du football, à travers ses nombreux ouvrages. Vous trouverez plus loin ses analyses sur l'évolution du football dans notre pays.
De toutes les investigations entreprises depuis fort longtemps, il s'avère qu'après une première tentative le 18 Janvier 1918, l'Espérance a été créée officiellement le 15 Janvier 1919 alors que le Club Africain a vu le jour le 4 octobre 1920 en vertu de deux arrêtés signés par le Premier Ministre de l'époque Mohamed Taieb Djellouli.
Cette réalité est incontestable. Elle ne souffre d'aucune ambigüité.
Tout le reste n'est que littérature.
Mais devant l'insistance de nombreux fans sang et or et à la suite de la polémique provoquée par la publication d'un ouvrage retraçant l'histoire du Club Africain, je me trouve dans l'obligation de faire quelques rétablissements, quoiqu'il me coûte de paraitre aux yeux de mes nombreux amis clubistes, faire le procès de leur histoire par endroits mal écrite.
Cependant ni le temps, ni l'espace qui m'est imparti dans ce journal ne me permettent de m'étaler encore plus sur le sujet.
Inadmissible !
Il me suffit de dire que par une gymnastique de suppositions, d'hypothèses et recoupements pour le moins fantaisistes, l'auteur du livre sur le Club Africain est arrivé à la conclusion (c'est son droit de porter un jugement) que son club est premier partout. Voici quelques échantillons.
Le Club Africain est la première Association de Football Tunisienne Musulmane qui par hypothèses et déductions (quelle précision !!!) serait (le conditionnel engendre le doute) le prolongement du Stade Africain.
Or, le Stade Africain n'a jamais été typiquement musulman. L'auteur, lui-même, le reconnaît en révélant que cette jeune société était composée de Français et d'indigènes musulmans.
Dans «100 ans de football en Tunisie », Mustapha Zoubeidi affirme que le Stade Africain rassemblait des Français et quelques musulmans.
D'un autre coté, si le Club Africain était le prolongement naturel du Stade, pourquoi donc avoir changé de nom ?
L'autre réalité que l'auteur ignore superbement, c'est que le groupe d'hommes qui a créé l'Espérance est lui-même issu du Stade Africain et que si d'autres anciens de ce club ont eu, un an après, l'idée de créer, à leur tour, leur propre club, ce n'est certainement pas le fait d'avoir choisi le qualificatif d'Africain qui aurait fait un prolongement d'un Stade Africain dissous auparavant et dont les éléments ont d'abord constitué l'UST en 1917 (et non en 1919)
Dans sa foulée l'auteur a même voulu s'approprier la création de la Rachidia ;
La première assemblée générale de la Rachidia a eu lieu en 1934, Mustapha Sfar a choisi un certain nombre de notables pour constituer le Conseil d'Administration comprenant, il est vrai, quelques membres appartenant au Club Africain, mais également Mustapha Kaak, Président de l'Espérance (1926/1930) et le docteur Tahar Zaouch vice-président des « Sang et Or », tous deux ignorés et non cités par l'auteur, parmi les fondateurs de la Rachidia.
Pour l'auteur le Club Africain est le seul club, encore en activité, pouvant se targuer de posséder un arrêté de création signé par le Premier Ministre Taieb Djellouli.
Pour infirmer cette exclusivité il y a lieu de compulser le journal « Le MAGHREB » du 17 octobre 2012 qui a publié en fac-simile les deux arrêtés de l'Espérance et du Club Africain.
Il prétend que le Club Africain est réservé exclusivement aux musulmans.
L'Espérance, à ma connaissance, n'a fait jouer un non musulman qu'en 1992 avec l'arrivée de Malitoli alors que le Club Africain comprenait dans les années 1940/1950 un Juif Gaston Taieb, un Français Pierre Durin et un Italien Sauveur Millazzo.
S'agissant de sport et de simple chronologie dans l'histoire, nombreux seraient ceux qui n'inculperaient pas, outre mesure, un club sportif de s'être ainsi ouvert à des non musulmans, même à une époque cruciale qui exigeait l'affirmation de l'identité, si notre ami l'historien n'a pas tenu à faire de la question ethnico religieuse, le sujet central de son propos
La liste des contrevérités est encore longue, je préfère arrêter les frais.
Cependant là où le bât blesse, c'est lorsque l'auteur porte atteinte à la dignité et à l'amour propre des milliers d'Espérantistes.
Cela est inadmissible
Pour lui, l'Espérance est une association Française qui a été investie plus tard par des musulmans et qui n'a pu légalement devenir une association musulmane qu'en 1942.
Après quatre-vingt-quatorze ans d'existence, voilà que l'Espérance est «des islamisée» par un historien pour le moins douteux.
C'est le comble de l'ironie.
Cette fausse argumentation est due, semble-t-il, à la nomination d'un Français, Louis Montassier à la présidence du premier Comité Directeur de l'Espérance.
Cette désignation, nous ne la contestons pas. Elle n'est autre qu'un prête-nom exigé par le contexte politique de l'époque.
En effet comme il est mentionné dans la revue «l'AFRIQUE ET LE FOOTBALL» «que la configuration du champ sportif en Afrique du Nord dressa avant l'heure la scène sur laquelle s'exprimaient les revendications Nationalistes.
Ainsi chaque victoire d'une équipe musulmane sur un adversaire Français dépassait vite le domaine sportif.
L'Administration coloniale avait bien compris le danger puisqu'elle avait obligé les formations sportives musulmanes à engager dans leurs rangs au moins un élément européen »
MONTASSIER n'est resté que quelques mois à la tête de l'Espérance, la guerre ayant pris fin, le paysage sociopolitique a changé dans la région amenant le colonisateur à lâcher du lest envers les populations musulmanes dont les soldats ont contribué à la victoire des alliés.
C'est ainsi que cette restriction a été abrogée. D'où, la porte ouverte pour les futurs candidats qui ont présenté leur dossier après la création de l'Espérance.
Il y a même ceux qui ont introduit, sans difficultés, dans leur appellation le nom qualificatif religieux de musulman.
C'est le cas de l'US MAGHREBINE qui s'appelait l'US MUSULMANE au moment de sa création en 1938 et de l'AS Marsa qui avait pour nom l'Avenir Musulman (1939).
Témoignages neutres
Pour disqualifier toutes velléités mal intentionnées il y a lieu de se référer au célèbre magazine Français « l'HISTOIRE » qui a consacré une étude sur le football à l'occasion de la Coupe du Monde 2010 en Afrique du Sud qu'il a intitulé « LA PASSION DU FOOTBALL » où l'auteur relate l'historique du football depuis sa création.
Parmi les sujets invoqués, il a réservé une partie au football Africain qu'il a sous-titré « LE FOOTBALL A-T-IL LIBERE L'AFRIQUE ? » dont voici la teneur : « Le Football a contribué à l'œuvre de civilisation, menée avant la seconde guerre mondiale par les mercenaires et les colons. Mais si les populations masculines des quartiers indigènes des villes coloniales prennent vite goût au jeu, elles l'utilisent aussi comme moyen de résistance. Ainsi en Afrique du Nord les équipes musulmanes de l'Espérance (1919), du Mouloudia d'Alger( 1921) ou du Widad Athlétique Club de Casablanca ( 1937) portent le combat culturel et nationaliste sur les terrains de jeu »
De son coté le livre « LE FOOTALL ET L'AFRIQUE » édité par le duo Paul Dietschy et David Claude Kemo Keimbou et parrainé par la FIFA donc fiable a mentionné ce qui suit : «En Tunisie, l'Espérance Sportive, fondée le 15 Janvier 1919 dans un quartier populaire de Tunis et premier club musulman du protectorat, était devenue dans l'entre–deux guerres le porte-drapeau du nationalisme, notamment lors de la confrontation avec le Stade Gaulois ou l'Union Sportive Tunisienne composée de Juifs. Alors qu'il suscitait une grande ferveur populaire, les autorités Françaises n'eurent de cesse de freiner l'activité du club pendant qu'Habib Bourguiba, leader du Parti Nationaliste du Néo Destour et père de l'indépendance Tunisienne est devenu le supporter le plus célèbre, après avoir été Vice-président en 1931 ».
Un autre témoignage sur le nationalisme de l'Espérance, œuvre de l'envoyé spécial du « FIGARO », Serge Bromberger qui était venu couvrir le retour le 22 Juin 1971 de Bourguiba de Suisse où il a été se soigner. L'envoyé spécial du « FIGARO » a pu voir un groupe portant des maillots aux couleurs de l'Espérance qui venait d'être dissoute à la suite des incidents qui ont émaillé la finale de la Coupe contre le CSS. Son intention, écrit-il, a été attiré par les cris de la foule qui scandait non seulement Yahia Bourguiba, mais Espérance Bourguiba.
Bromberger a constaté que Bourguiba portait au revers de son veston avec l'insigne de l'Ordre National, celui de l'Espérance dont il est le Président d'honneur en raison de l'activité nationaliste déployée par le club en faveur de l'indépendance.
L'Espérance la plus prestigieuse
Les cinéastes Awa Ly et Olivier Manot ont réalisé pour « TV5 Monde » en Juin 2010, un film «L'AVENTURE DU FOOTBALL AFRICAIN, NAISSANCE D'UNE PASSION», le sujet consistait à recueillir auprès d'un échantillon de personnalités dont quelques-unes appartenant aux associations les plus prestigieuses du continent, pour raconter leur histoire Africaine du football.
Ce n'est pas un hasard que le choix s'est porté sur l'Espérance à travers MM Hassen Babbou, Président du Comité des Sages de l'Espérance et Abdelaziz Belkhodja, écrivain et supporter Sang et Or.
Ce sont là des constats qui justifient, si besoin est, la primauté de l'Espérance comme doyenne des Associations musulmanes de football en Afrique du Nord.
Le lecteur appréciera le vrai de l'imaginaire !
Cela étant, hormis son obsession (ou complexe) de vouloir, coûte que coûte, exclure l'Espérance de tout lien se rapportant à son identité Tuniso-Arabo-musulmane, donc entravant son désir de voir son club accaparer tous les lauriers, l'auteur ose fournir un document où les clubistes trouveront des pans intéressants de l'histoire de leur association...

Lotfi Ezzahi (Ancien membre du CA):
«Réhabiliter l'histoire sur une base documentée»
Traiter de L'histoire de nos associations sportives créées sous le protectorat est un sujet délicat qui a de tout temps fait naître de vives surenchères subjectives, motivées il est vrai de part et d'autre par le désir de mettre son association à l'avant-garde du mouvement associatif sportif tunisien. Cependant la quête de vérité exige une démarche objective et scientifique basée sur l'analyse des documents d'archives. Malheureusement pareille démarche n'est pas une tâche aisée du fait que ce processus de recherche peut buter sur nombre d'entraves.
D'abord, l'indigence de la mémoire documentée. L'absence de documents d'archives ou de traces écrites constitue le premier handicap.
Ensuite, le désintérêt de l'historiographie tunisienne. Il est malheureux de constater que le mouvement associatif en général, et sportif en particulier, n'a pas été considéré par l'historiographie tunisienne comme un thème de recherche digne des sciences sociales ou un sujet d'intérêt pour une étude historique. Le mouvement associatif sportif tunisien reste, dans une large mesure, le parent pauvre de l'historiographie tunisienne.
Enfin, le manque d'intérêt des associations sportives tunisiennes par rapport à leur patrimoine documentaire. Dans ce sens que la culture de la mémoire écrite n'est pas vraiment ancrée au sein des associations tunisiennes. Il a été observé que les associations sportives tunisiennes n'accordent que peu ou pas d'importance à leur propre histoire, à la reconstitution de leur propre fonds documentaire, qui est segmenté dans l'espace et fragmenté entre diverses personnes. L'effort de recherche, d'archivage et de reconstitution n'est qu'individuel, à l'initiative de quelques férus, proches de l'association mais loin de sa sphère de décision.
Par conséquent, dans pareil contexte de "sécheresse documentaire ambiante", retracer l'histoire d'une association sportive encore en activité en Tunisie, outre qu'il constitue une entreprise semée d'embuches et d'incertitudes, doit faire l'objet d'une démarche objective fondée sur une lecture approfondie des documents d'archives disponibles et non encore exploités à ce jour ainsi que sur une méthode systématique de recoupement et de vérification des informations recueillies.
À ce propos, et à titre illustratif, il est tout aussi paradoxal qu'accablant de constater que deux bastions du sport tunisien, à savoir le Club Africain et l'Espérance Sportive de Tunis, ont omis, par ignorance ou mépris, de citer dans leurs littératures des hommes de la première heure qui ont naguère présidé à leurs destinées. En effet aucune œuvre ou publication n'a mentionné pour le Club Africain, M. Hedi Ginati, deuxième président, au titre de la saison sportive 1921-1922 et pour l'Espérance Sportive de Tunis trois anciens présidents, ayant succédé au premier président M. Louis Montassier (1919-1922), à savoir M. Laroussi Turki (1922-1923), M. Slimane Ben Ali (1923-1924) et M. Habib Thabet (1924-1925). Pis encore, certaines personnes ont été citées à tort comme anciens présidents alors qu'ils ne l'ont jamais été ...
Devant cette sécheresse documentaire j'ai engagé un travail de recherche depuis 2009 avec l'aide d'un groupe de personnes composé de MM. Jalel Snoussi, Karim Msellati et Sadri Sioud, travail de recherche qui a duré 3 ans, fondé essentiellement sur les documents et périodiques de la période coloniale, encore disponibles entre les Archives Nationales de Tunisie (ANT), la Bibliothèque Nationale de Tunisie (BNT), le Centre de Documentation Nationale (CDN) et l'Institut Supérieur d'Histoire du Mouvement National (ISHMN) d'une part, ainsi que sur ceux du Centre des Archives Diplomatiques Françaises de Nantes (CADN) d'autre part.
Ce travail de recherche m'a permis de tirer les constatations suivantes :
Que le mouvement associatif tunisien de manière générale et sportif plus particulièrement, s'articulait sur un système communautariste autour de trois catégories d'associations, à savoir : Les associations françaises, les associations étrangères (notamment italiennes), et les associations musulmanes.
Cette classification était animée, dans une large mesure, par le souci de séparer les musulmans des autres communautés, dans l'objectif de pouvoir les contrôler. Ainsi des textes législatifs différents et spécifiques étaient appliqués pour chaque catégorie d'association. Ces textes sont :
La loi française du 1er juillet 1901, relative au contrat d'association, qui était applicable aux associations françaises, aux associations étrangères autres qu'italiennes ainsi qu'aux associations juives.
Le décret du 1er février 1897, promulguant la convention consulaire et d'établissement et le protocole conclue le 28 septembre 1896 entre les Gouvernements français et italiens, qui était applicable aux associations italiennes.
Le décret du 15 septembre 1888, puis celui du 6 août 1936 relatifs aux associations, qui étaient applicables aux associations tunisiennes musulmanes.
Que les associations sportives créées entre les deux guerres et encore en activité en Tunisie étaient classées de ce fait en deux groupes :
Les associations sportives créées en tant qu'association musulmanes dans le cadre du décret beylical du 15 septembre 1888 et dont les membres adhérents, actifs et honoraires sont tous des tunisiens musulmans. Tel est le cas (voir annexe1 : Liste des associations sportives musulmanes à la date du 18-12-1938. ANT- Carton E 509 - dossier 3 – pièce 14 - liste des associations musulmanes à la date du 18 décembre 1937).
Les associations sportives créées en tant qu'association musulmanes dans le cadre du décret beylical du 15 septembre 1888 et dont les membres adhérents, actifs et honoraires sont tous des tunisiens musulmans. Tel est le cas : du Club Africain: du Club Africain en 1920, de l'Etoile Sportive du Sahel en 1925, du Club Tunisien (CSS) en 1928, de la Saidia en 1933, du Sporting Club de Moknine en 1936, d'El Makarem de Mahdia en 1937 et de la Zitouna Sport en 1938.
Les associations sportives créées par des français en tant qu'associations françaises dans le cadre de la loi française du 1er juillet 1901. Parmi ces associations nous avons noté : Le Patriote de Sousse, l'UST, l'Espérance Sportive, le Sfax Railway Sport, le Club Athlétique Bizertin, l'Olympique de Béja, le Club Sportif des Cheminots, etc.
Cependant Les associations sportives créées au départ comme associations françaises, ont été tunisifiées plus tard, sur deux étapes différentes :
La première étape eu lieu entre les deux guerres et a concerné les associations françaises qui ont été investies par les musulmans et sont devenues des associations musulmanes de fait. Tel fut le cas de : l'Espérance Sportive, du Club Athlétique Bizertin et de L'Olympique de Béja. La tunisification de ces associations nativement françaises s'était opérée sur le plan juridique à la faveur du décret du 3 mars 1942 portant sur l'organisation sportive en Tunisie et agrément de 50 associations sportives dont 10 étaient musulmanes (Club Africain, Club, Athlétique Bizertin, Club Tunisien, El-Makarem de Mahdia, Espérance Sportive, Etoile Sportive du Sahel, Jeunesse Sportive Musulmane, La Musulmane, Progrès Sportif Ksour Essef, Zitouna Sport).
La deuxième étape eu lieu en 1956 et a concerné les associations françaises qui ont fait le choix de continuer à exercer en Tunisie après l'indépendance du pays. Cette tunisification s'est faite à la faveur du décret du 25 juin 1956 portant création du Comité Supérieur Tunisien des Sports, dont l'article 4 avait rendu obligatoire « la tunisification » des organes et des structures sportives existantes en Tunisie. Tel était le cas : du Patriote de Sousse, du Club Sportif des Cheminots (CSC), du Sfax Railway Sport, de l'Union Sportive Tunisienne, etc.
De toutes les associations sportives tunisiennes, encore en activité, le Club Africain est la seule association à posséder un tel "acte de naissance". Il est le prolongement naturel du "Stade Africain", association créée en 1915 par de jeunes tunisiens et dissoute en 1919 par le pouvoir colonial. En effet, cet acte est considéré comme un acte de renaissance du Club Africain plutôt que de naissance, le Club Africain étant ainsi "recrée" le 4 octobre 1920 et non "crée".
Tout compte fait, il avait fallu environ une année, après la date de dépôt de la première demande d'agrément, pour obtenir l'autorisation administrative, signée, le 4 Octobre 1920, par le premier ministre de l'époque, Taieb Jellouli, acte par lequel le Stade Africain avait été reconstitué de facto en Club Africain, première association sportive tunisienne musulmane de football reconnue.
Compte tenu de tout ce qui précède, il ressort que le Club Africain est bel et bien le doyen des associations sportives musulmanes créées sous le protectorat encore en activité, et qu'il est même le doyen des associations sportives musulmanes du Maghreb Arabe.
Club Africain Tunisie 04-10-1920
Mouloudia Club d'Alger Algérie 07-07-1921
Wydad Athlétic Club Maroc 08-05-1937
Ettihad Tripoli Libye 29-09-1944
Que l'ordre de création des associations françaises devenus tunisiennes et encore en activité s'établit comme suit :
Patriote de Sousse 26-12-1898
Union Sportive Tunisienne 25-04-1909
Espérance Sportive 22-01-1918 ()
Club Sportif des Cheminots 28-10-1921
Sfax Railway Sport 08-03-1922
Club Athlétique Bizertin 07-07-1928
Olympique de Béja 13-03-1929
Ce ne sont ici que quelques vérités établies sur l'histoire de nos associations sportives créées sous le protectorat. Une lecture de notre ouvrage : « Aux Origine du Club Africain et du Mouvement Associatif Sportif Tunisien » aux Editions Karem Sharif, permettra à tous ceux qui sont intéressés par ce sujet de prendre une meilleure connaissance du cadre régissant le mouvement associatif, notamment sportif, et de disposer d'une manne d'informations et de révélations documentées, jusqu'ici inédites, sur la création et l'évolution du Club Africain.
En résumé, le projet de création du Club Africain n'était pas uniquement sportif mais également culturel, inscrit dans une stratégie visant à valoriser et à ancrer davantage l'identité arabo-musulmane de la population tunisienne et à faire front aux risques d'assimilation encourus suite à l'invasion culturelle française. En effet, en plus de la section sportive réservée au départ à la pratique du football, deux autres sections à vocations culturelles ont été mises en place dès la constitution de l'association, la première réservée à la musique la seconde au théâtre, comme signalé sur l'entête des cartes de membre du Club Africain (voir annexe 2 : Carte d'adhérent du Club Africain).
Cette vocation culturelle n'était pas le fruit du hasard mais bien un choix stratégique. Les fondateurs et les dirigeants du Club Africain ont cru dur comme fer en la synergie entre le sport et la culture et ont enraciné cette idée dans la pratique quotidienne. Ce choix était d'autant plus logique que la majorité des grandes figures du Club Africain a été constituée par des hommes de culture, de lettres et d'art, ayant marqué le paysage culturel tunisien. Parallèlement au rectangle vert, le Club Africain a bataillé sur d'autres terrains, et non des moindres, et a conquis des trophées autres que sportifs, et a puisé dans le creuset national et dans le patrimoine populaire pour naître, mûrir et grandir.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.