Des jeunes Tunisiens qui partent au Jihad en Syrie, il y en a de plus en plus dans notre pays. Le sujet suscite le débat ces derniers jours et fait couler beaucoup d'encre, d'autant plus que le phénomène ne cesse de prendre de l'ampleur. Souvent manipulés par des groupes de salafistes, les jeunes qui périssent sur le sol syrien sont recrutés par des sectes, lesquelles ont recours à des techniques spécifiques, où les jeunes ne vivent plus dans l'histoire objective linéaire, mais plutôt dans l'histoire mythique circulaire. Mais qui sont ces jeunes ? Comment sont-ils manipulés par les groupes de salafistes ? Comment ces sectes fonctionnent-elles ? Ce sujet toujours d'actualité brûlante a été débattu lors du Forum Social Mondial. Plusieurs conférences ont été données dans ce sens, où l'on a parlé du « salafisme au Maghreb Arabe ». D'ailleurs, une rencontre débat a été assurée par Karem Editions, pour donner des éclairages sur la question dans notre région. Animée par des spécialistes dans le domaine, dont Mohamed Haj Salem, chercheur en anthropologie politique spécialisé en la pensée religieuse, la rencontre était une occasion propice pour avoir une idée sur le fonctionnement de ces groupes, dit également « sectes » ou « Nihla » en arabe. Le spécialiste ne s'est pas contenté de faire une lecture dans le concept et le phénomène. Il a également, dessiné le profil des jeunes « recrutés dans ces groupes. Promis pour le paradis, les recrutés s'isolent du monde réel. Ils subissent un conditionnement physique et psychologique pour renoncer même à leurs facultés sensorielles. Tout change chez ces jeunes qui ne trouvent de solutions à leurs problèmes psychosociologiques qu'auprès des prédicateurs qui manipulent très bien les techniques de recrutement. Ayant une culture religieuse limitée, les recrutés par les groupes salafistes sont une proie facile pour ces « sectes » ou « Nihla ». Ils sont en effet, « faciles à manipuler, à manier », explique Mohamed Haj Salem, spécialiste en la pensée religieuse, dans son intervention donnée dans le cadre du Forum Social Mondial. Souvent, les prédicateurs jouent bien leur rôle pour attirer leurs sympathisants voire leurs alliés. Ils mènent en fait, « un discours très particulier qui se distingue par une concentration idéologique et une référence textuelle riche », ajoute le spécialiste tout en précisant que les prédicateurs se caractérise par une pensée mythique. Ils ont par conséquent un grand impact sur les recrutés qui ne lésinent pas sur les moyens pour s'intégrer dans le groupe et renoncer ainsi à leur rythme de vie ordinaire. Ils s'isolent de la vie commune, de tout ce qui est sensoriel. Tout vire chez ces jeunes recrutés qui rompent leurs relations avec leur environnement, avec leur corps voire leur identité. Leurs noms et prénoms s'effacent pour laisser place à des allias, communément connus « Abou Djihad, Abou Iadh... ». Rupture Ce n'est pas tout. Les recrutés rompent aussi avec les moyens de communication classique, dont la télé, les journaux...Ils s'habituent également, à un rythme de vie ardu pour jeûner le plus souvent et veiller le soir en faisant la prière. Leur horloge biologique se transforme pour s'adapter ainsi à une nouvelle notion du temps. En fait, les heures de prières deviennent les repères pour se donner des rendez-vous. Idem pour les espaces de rencontre classiques qui sont remplacés par les mosquées. Manipulés, nos jeunes subissent par ailleurs un conditionnement physique. Ils s'entraînent aux sports de combat, à l'utilisation des armes même, les plus simples, dont, les armes blanches. Mieux encore, ils s'adaptent à un rythme de vie pénible en se consacrant aux actions de volontariat. En fait, « ils abandonnent l'histoire objective linéaire pour vivre dans l'histoire mythique circulaire ». Ces groupes ou ces sectes imposent dès lors, un rythme bien déterminé à nos jeunes. Elles se basent d'ailleurs, sur trois principes fondamentaux à savoir ; la distinction, l'autosuffisance dans tous les domaines et la rupture avec l'autre, avec son environnement. Des signes très visibles que les parents seraient certes, capables de détecter à temps pour sauver leur progéniture de ces dérives qui leur coutent la vie.