La télé passée à la moulinette de l'art du mime voilà qui est aux antipodes des attentes du public très nombreux qui a suivi la vingtaine de représentations de « Stand-by » création de MoezGdiri, interprétée par le duo BassemHamraoui et FaiçalLahdhiri. C'est d'autant plus inattendu qu'aussi bien le metteur en scène que les comédiens doivent leur notoriété à la télévision. MoezGdiri, lancé au cinéma par Khaled Barsaoui dans son long-métrage « Bin el Widyene » a été propulsé en tant que comédien au rang de star de la télévision à la faveur du feuilleton « Njoumellil » où il incarne le rôle du méchant Docteur Zac. BassemHamraoui et FaiçalLahdhiri ont été consacrés par l'émission Labés avec leur duo Mbarka et Mabrouka. Le défi pour MoezGdiri a été de prendre à contrepied le public venu dans son immense majorité voir Mbarka et Mabrouka sur scène et de le garder une fois l'effet de surprise passé en lui offrant un spectacle qui sollicite son intelligence sans populisme ni démagogie. Une scène nue, deux comédiens dans le rôle de spectateurs qui réagissent au débit d'une télé totalement folle. Un changement de lumière et voilà nos deux spectateurs se transformant en interprètes du contenu d'une télé débitant d'une manière totalement débridée son lot quotidien d'insanités. Des saynètes au cours desquelles, tous les travers des télévisions, publicité, feuilletons à toutes les sauces égyptienne, syrienne, turque et tunisienne sont allègrement croqués par la gestuelle et les mimiques de deux comédiens utilisés dans « Stand by » en tant que mimes. La parole est confisquée au profit d'un excellent travail sur les corps dont les circonvolutions sont synchronisées à la bande-son riche et diversifiée conçue par Mich. Nous sommes confrontés à un vrai duo dont la complémentarité des performances respectives enrichit le spectacle. BassemHamraoui, élastique, aérien et très à l'aise dans le registre dansé constitue le pendant au registre plus massif, plus arrimé à la scène déployé par son acolyte FaiçalLaadhari. Deux moments forts dans le spectacle, la scène de l'auto-école totalement mimée avec un basculement de registres ( comique-tragique) et un crescendo dramatique qui renvoie à certains petits films de Chaplin ( ses films du temps de la Keystone). Cette référence n'a pas de quoi étonner, tant la proximité avec le cinéma burlesque d'avant l'avènement du son est évidente. Stand-by est un spectacle avant tout visuel et sonore, les sons lorsqu'ils fusent relèvent de borborygmes et d'onomatopées. Point de révolution (finalement) ni de drame, le ton est à la légèreté dans ce spectacle au cours duquel notre propre statut de télévore ou de téléphage nous est donné à voir sans culpabilisation ni acrimonie pour en rire et oublier peut être l'espace d'un sourire le drame qui se joue dans la vraie vie. La relève au théâtre des quatre cinq grands noms est bien là. C'est dans sa propension à prendre des risques à s'aventurer hors de sentiers battus qu'elle est finira par arracher sa place au soleil.