• Appel à traiter rapidement et dans le cadre de loi, le dossier des hommes d'affaires impliqués avec l'ancien régime L'adoption de la loi d'immunisation de la Révolution a été au centre d'un meeting populaire organisé le week-end dernier à Sfax par le Congrès pour la République (CPR). Ce parti de centre-gauche membre du triumvirat au pouvoir aux côtés du mouvement Ennahdha et du Forum Démocratique pour le Travail et les Libertés (FDTL/ ou Ettakatol) s'est, à cette occasion, attaché mordicus à l'adoption dans les plus brefs délais de cette loi stipulant l'exclusion des responsables de l'ancien régime de la vie politique pour une durée de 7 ans. Dans son allocution d'ouverture du meeting marqué par la présence d'un nombre important de sympathisants du CPR et de citoyens, le secrétaire général du parti Imed Daïmi a d'emblée donné le ton. «Rien et personne ne pourra empêcher l'adoption de la loi sur l'immunisation. Cette loi est un devoir et une revendication populaire qui ne peut aucunement être remise en cause », a-t-il souligné indiquant que la loi sera discutée et votée dans les jours à venir lors d'une séance plénière. M. Daïmi, qui s'exprimait sous des applaudissements nourris et dont les propos ont été à maintes reprises entrecoupés par une foule scandant des slogans hostiles au retour de membres du Rassemblement Constitutionnel Démocratique (RCD) au devant de la scène, a également indiqué que le CPR se porte bien malgré l'usure du pouvoir et les attaques répétées dont il fait l'objet de la part de ses adversaires. « « Les forces contre-révolutionnaires combattent notre parti et souhaitent le voir péricliter. Ces gens nous combattent parce que nous menons une guerre contre la corruption. Notre discours les dérangent car il colle aux revendications des Tunisiens», a-t-il affirmé. Une question de vie ou de mort Le secrétaire général du CPR a, d'autre part, appelé à traiter rapidement le dossier des hommes d'affaires impliqués avec l'ancien régime dans les plus brefs délais et dans le cadre de la loi. L'objectif de l'accélération des procédures relatives à ce dossier est, selon lui, nécessaire afin de bâtir une économie qui repose sur la mobilisation des capitaux nationaux et non pas sur l'endettement extérieur qui peut menacer la souveraineté nationale. De son côté, le ministre du commerce et membre du Bureau politique du CPR, Abdelwaheb Maâter, a noté que son parti pourrait même se retirer de la Troïka au cas où le mouvement islamiste Ennahdha renonce à faire passer la loi d'immunisation de la Révolution. « Si la loi d'immunisation de la Révolution ne sera pas adoptée, nous allons reconsidérer notre alliance avec Ennahdha et Ettkatol. C'est pour nous une question de vie ou de mort pour le processus révolutionnaire qui est menacé par d'énormes dangers », a-t-il déclaré. Même son de cloche chez Tarek Kahlaoui, le directeur de l'Institut des études stratégiques rattaché à la présidence de la République « Ils nous accusent d'être des partisans de l'exclusion. Oui nous sommes favorables à l'exclusion de ceux qui ont empêché l'instauration d'une démocratie en Tunisie. Nous n'en avons pas honte», a-t-il fait savoir, rappelant que le CPR a été l'initiateur du projet de loi relatif à l'immunisation de la révolution. Une sanction collective A noter que le projet de loi sur l'immunisation de la Révolution ne fait pas l'unanimité au sein de la Troïka. Ettakatol s'est, en effet, aligné sur la position de l'opposition qui estime que la justice transitionnelle est capable d'empêcher le retour des symboles de l'ancien régime impliqués dans la corruption. Certains dirigeants se sont aussi opposés à l'adoption de cette loi. C'est notamment le cas du conseiller politique du Président de la république, Aziz Krichène qui a indiqué récemment sur le plateau de France 24 que la loi sur l'immunisation de la révolution ne sera pas votée par l'Assemblée nationale constituante. «Cette loi ne passera pas. Ennahdha ne la présentera pas. La politique c'est toujours de la rhétorique et du réalisme. On ne s'amuse pas à quelques mois des élections à jouer avec la loi pour gêner tel ou tel adversaire politique”, a-t-il déclaré. A Ennahdha, certains ministres ou cadres du parti ne sont pas favorables au vote de la loi sur l'immunisation de la révolution. Ainsi, le secrétaire général du parti islamiste et l'ex Chef du gouvernement, Hamadi Jebali, a estimé que ce projet n'a aucun sens en présence d'un projet de la loi sur la justice transitionnelle. Pour sa part, le ministre de la justice transitionnelle et des droits de l'Homme Samir Dilou estime que «la loi d'immunisation de la Révolution renvoie au fascisme ou au stalinisme» tout en notant que « la loi organique relative à la justice transitionnelle est en mesure d'assurer la mise à l'écart des corrompus et des symboles de l'ancien régime». Lotfi Zitoun , membre du Conseil de la Choura d'Ennahdha, a déclaré, quant à lui, que«l'immunisation de la révolution se fait à travers la réalisation de ses objectifs et non pas via des lois qui risquent de constituer des punitions collectives».