Meherzia Laâbidi traite les opposants de « nains politiques » Un 1er juillet pas comme les autres fut la journée d'hier au sein de l'hémicycle. Les forces progressistes et celles démocrates étaient en réel face à face avec les blocs nationalistes et islamistes, hier. Le sujet du jour était critique : les premières véritables discussions en séance plénière sur le fameux texte final de la Constitution. Il était 10h du matin, heure à laquelle la séance devait en principe commencer. L'hémicycle était presque désert. Il fallait attendre 11h pour voir les élus du peuple arriver un par un. Les temps n'était pas à la paresse et la nonchalance et pourtant une grande majorité était absente alors que les enjeux sont grands. Les invités étaient, par contre, là figures emblématiques dans le paysage tunisien actuel, ils étaient venus assister au tout premier débat autour de la dernière mouture de la Constitution. Nous citerons des noms comme Rachid Sfar, Foued Mbazaâ, Ahmed Mestiri, Ahmed Ben Salah, Houssine Abbassi… Début du dialogue… de sourds Le mot du début était donné par le président de l'ANC, Mustapha Ben Jaâfar, qui a loué les mérites du peule tunisien et rendu un vibrant hommage aux martyrs de la Révolution. Après avoir cité toutes les parties qui ont participé à la fin de la dictature et l'avènement d'une nouvelle ère, il a récapitulé les diverses phases à travers lesquelles a avancé le projet de l'écriture de la nouvelle Constitution tunisienne. Il a, notamment, appelé dans son allocution à un consensus urgent entre les élus. Un consensus qui demeure la seule alternative pour dépasser les altercations et les discordes entre les différentes mouvances politiques existantes entre les élus. A la fin de son discours, Mustapha Ben Jaâfar s'est dit ouvert et prêt au dialogue et à un accord en vue d'avancer dans le processus transitoire, à savoir la finalisation de la Constitution et la préparation des prochaines élections. Un discours, en somme, conciliateur. Néanmoins, en cédant la parole au rapporteur général de la Constitution, Habib Khedher, l'ambiance n'était plus au débat mais aux règlements de compte. La Gauche armée d'un document à la main, a demandé à parler s'interposant fermement au contenu de la dernière mouture de la Constitution, qu'elle n'a cessé de critiqué et de dénoncer depuis des mois. Entre temps, faisant la sourde oreille, le rapporteur général poursuivait son allocution rappelant l'histoire des différentes constitutions qu'a connues la Tunisie. De leur côté, les élus opposés au contenu de la Constitution, allaient de plus belle, ce qui a obligé le président de l'ANC, Mustapha Ben Jaâfar à interrompre la séance plénière. De leur côté, les invités dépités, regardaient la scène de ménage à laquelle ils assistaient, désormais, bon gré mal gré. Déçus, ils se sont retirés et ont quitté l'hémicycle. Deux Constitutions au lieu d'une ! Coup de théâtre. L'on apprend avec stupéfaction, qu'il y aurait deux versions de la Constitution et non une. Lorsque le rapporteur général tenta de faire la première lecture du rapport préliminaire sur le projet de la Constitution, les députés qui s'y sont interposés, désiraient, en réalité, montrer plutôt la leur. Les présents et les médias n'étaient pas au bout de leurs surprises ! Le parti El Massar à travers son élue Nadia Chaâbane, avait préparé un tout autre projet de la Constitution qu'il a élaboré au sein d'une commission indépendante parallèle. Les autres élus opposés lisaient chacun son discours au même moment que le rapporteur général de la Constitution. D'autres élus crient à la fraude sous-entendant que cette dernière mouture est falsifiée. Bref, tout était bon pour que l'hémicycle ressemble plus à un souk à ciel couvert qu'à autre chose. Au beau milieu de cette zizanie politique qui illustre à elle seule le degré de dissidence et de clivage entre les différents acteurs politiques, le président de l'ANC leva la séance. Au beau milieu de ce galvaudage politique en temps et argent pour le peuple tunisien et la transition démocratique, la vice-présidente Mahrzia Laabidi qualifie les opposants d'adolescents politiques et de « nains » les accusant d'avoir gâché la joie des Tunisiens et de les avoir privé d'un moment historique. Quant à la seconde version de la Constitution distribuée par les élus de l'Opposition, tout comme Habib Khedher, elle l'a qualifié d'illégitime et d'illégale. Constitution Acte 3, l'intrigue se poursuit La séance plénière a repris après le tohu-bohu matinal, dans une ambiance tendue. Désappointé, le président de l'ANC a rappelé que seul un consensus entre les forces politiques sauvera la mise. Il a annoncé la création d'une commission qu'ils ont appelée «Commission des accords» qui serait composée des différents blocs et mouvances politiques présents au sein de l'ANC. Cette commission, telle que l'a annoncé Mustapha Ben Jaâfar a été créée samedi dernier et commencera son travail demain. L'objectif est de rejoindre un consensus pour pouvoir entamer réellement la discussion de la dernière mouture de la Constitution article par article. Quand les élus ont pu avoir la parole, les présents ont pu assister à une kyrielle d'accusations interminables. La vice-présidente de l'ANC était le centre de ces critiques acerbes. L'élue Senda Baccar a dénoncé l'intervention de la vice-présidente auprès du réalisateur de la télévision nationale qu'elle qualifie de manipulatrice des médias. Elle remet en question la liberté-même de la presse étant après l'intervention de Mahrzia Laabdi. Elle a noté que derrière les caméras de la télévision nationale la vice présidente de l'ANC s'est permise de donner des instructions au réalisateur de ladite chaine, quant à ses prises et angles de vues. Alors que Senda Baccar parlait, on voyait dans la caméra, la vice présidente sourire et hocher de la tête comme pour nier ce que l'élue disait. L'élue rappelle à la fin de son intervention que la vice-présidente de l'ANC aurait du encourager au respect de la liberté d'expression et non donner des ordres. Toujours autour du comportement de Mahrzia Laabidi, l'élu Mongi Rahoui a vivement dénoncé les propos de cette dernière quant à la qualification des opposants de «nains politiques» ce qui constitue selon lui une expression discriminatoire envers les nains de manière générale et des opposants. En somme, tout comme l'ambiance générale, l'on a entendu se mélanger l'hymne national d'un côté et la Fatiha de l'autre dans une sorte de zizanie interminable. Cette première journée de discussions a été entamée par un dialogue de sourds qui annoncerait le prélude d'une maïeutique difficile de la Constitution