• Faut-il séparer la religion de l'Etat ? En ce moment, on « fête », avec plus ou moins d'enthousiasme et de sincérité, la République. Il semble souhaitable de préciser le sens de certains mots qui génèrent bien des querelles, ces temps-ci. La « République » – du latin « res » : la chose, « publica » : publique – semble venir de très loin puisqu'il en est question depuis … Platon, au moins, au IVème siècle avant J.C., deux millénaires et demi ! Si la république est la « chose publique », il semble bien que le régime politique convenable – celui qui gère la « cité » : « polis » en Grec – est la démocratie. Le dictionnaire établit que ce mot vient du grec : « demos » : le peuple, « kratos » : le pouvoir, c'est-à-dire que la « souveraineté » est exercée par le peuple. Nous ajouterons : « par la majorité du peuple respectueuse des minorités ». Si dans tous les cas, le mot « exercer » avait été mis en œuvre, des millions de morts auraient peut-être été évités, ne serait-ce que dans les républiques, dites « démocratiques », « staliniennes » en Europe, « polpotiste » au Cambodge, « maoïste » en Chine, etc. … jusqu'en Corée du Nord. Des démocraties plutôt « présidentielles » ont parfois débouché sur l'exercice solitaire du pouvoir : la dictature. Mais, même dans celles qui se prétendent « parlementaires », la « dérive » est souvent présente. Au nom de quel principe, un Président d'une république promulguerait-il un traité international qui modifie profondément la vie des citoyens, signé par les députés de « SA » majorité sans le soumettre à un « référendum ». Les députés de la « majorité présidentielle », d'une part, n'ont pas reçu de mandat pour signer ce traité dont leur programme ne parlait pas, d'autre part, ils sont nettement minoritaires par rapport au nombre d'électeurs, donc par rapport au « peuple qui est souverain ». Leur vote n'est donc pas légitime. Aucune « majorité », toujours relative, n'est « légitime ». Elle n'est que « légale ». La légitimité, découlant de la « souveraineté » populaire est l'apanage exclusif du peuple, du moins quand le régime politique est « républicain ». En découle, normalement, pour le peuple, le droit de sanctionner et de révoquer, les « mandataires » : députés, ministres et Président, même immédiatement, sans attendre la fin de leur mandat, dans certaines situations. Fallait-il attendre encore trois ou quatre ans pour « révoquer » le Président déchu pour que … les spoliations et les enrichissements illégaux s'amplifient et pour que davantage d'opposants soient incarcérés et torturés plus longtemps ? Il fallait attendre encore combien d'années pour mettre fin à « l'Apartheid » ? Il ne s'agit pas d'analyser certains types de démocratie, il s'agit simplement de se référer aux « principes », du latin « principium » : le commencement, c'est-à-dire aux vérités premières, à la base théorique du fonctionnement d'un état. Ces principes établissent aussi la nécessaire séparation des pouvoirs. Les législateurs, jusqu'à l'échelon « Municipal », en l'occurrence les « députés » au sens large, rédigent et votent les lois sous le contrôle du Conseil Constitutionnel. Le pouvoir exécutif, qui est formé des « gouvernants » ministres et autres, jusqu'aux présidents des Municipalités, veillent à l'application des lois et règlements. Ils ne devraient pas, sauf cas exceptionnels, proposer un texte de loi, sous peine de devenir « juge et partie ». Enfin, le pouvoir judiciaire doit juger de la bonne exécution des lois. Il doit donc être « autonome » et non « indépendant » puisqu'ils ne rédigent pas les lois selon lesquelles il juge. Mais, normalement, il devrait gérer aussi l'action des forces de police et de maintien de l'ordre puisque : « la force sans justice est tyrannique et la justice sans force est faible » ! Ce ne devrait pas être au Ministre de l'Intérieur de décider si telle manifestation est illégale. Par « principe », ce devrait être à la justice de le déclarer. Il resterait à choisir le type d'exécutif. « Normalement », c'est au « Chef du Gouvernement » de définir et de gérer la politique du pays puisqu'il représente la majorité des votants. Le Président, en tant que « Chef de l'Etat », représente tous les citoyens du pays et non ceux d'un parti ou d'une coalition de partis. Il est le « symbole » du pays. Il devrait donc être élu au suffrage universel. Le Président de la République, élu au suffrage universel, pourrait se prévaloir de ce mandat pour dissoudre le gouvernement et la chambre des députés qui pourraient le révoquer à la majorité absolue de ses membres. Mais ce serait le Ministre de la justice avec avis concordant du Président de la République et du Chef du gouvernement qui pourraient engager les forces de sécurité, et l'armée, éventuellement, à intervenir à l'intérieur du pays, lors d'« actions » menaçant la « sécurité nationale » ou à l'extérieur. Seule la justice peut établir que des actions « illégales » ont été mises en œuvre contre la République. Le Président devrait se tenir en dehors de la vie politique sinon, comme les députés et les ministres, il deviendrait discutable et révocable. Au nom de quel « principe », le Président de la République serait-il le « Chef des Armées » ou le seul « gérant » des Affaires étrangères ? Ce sont les avis concordants des ministres et du Président qui doivent gérer les « affaires courantes ». Les cas exceptionnels, tels qu'une déclaration de guerre, devraient être soumis au référendum. Il faudrait encore revenir aux « principes » pour rétablir que les députés et les ministres – et même le Président de la République – ne sont que les mandataires du peuple souverain qui les a élus, chargés donc d'un mandat et non d'un « chèque en blanc ». Ce sont des gestionnaires, éminemment temporaires, d'un programme politique populaire. Comme tous les citoyens, même s'ils bénéficient de certains avantages, matériels ou autres, qui n'existent que pour leur faciliter la tâche, ils ont soumis, aux lois du pays. Ils sont là « pour servir et non pour se servir ! » Ils n'y sont, espérons-le, que pour un certain temps, assez court, afin que la « politique » ne devienne pas un métier … lucratif. Normalement, dans une démocratie, l'exercice du référendum « d'initiative populaire » devrait être d'un usage facile. Bien sûr qu'un référendum coûte cher mais une mauvaise gestion du pays ou une révolution coûte bien plus cher ! On peut aussi rétorquer que parfois le sujet est trop « délicat », trop technique, en oubliant qu'il est de très nombreux citoyens qui sont bien plus compétents que beaucoup de députés, qui seront les seuls à fournir leur avis, en particulier sur le contenu d'un traité international ou sur la modification de la constitution. Etre démocrate, c'est à notre avis, être persuadé que ce sont les idées du peuple et non celles des mandataires, qui doivent être mises en œuvre. C'est aussi avoir conscience que la minorité a des droits imprescriptibles et que l'alternance, dictée par la volonté du peuple, est une règle fondamentale qu'il ne faut pas fausser par l'art de la propagande, la puissance des médias, la distribution d'argent ou d'avantages divers, etc. … Un faux problème Récemment, un journal a publié un article intitulé « Faut-il séparer la religion de l'Etat ? ». A notre avis, c'est un faux problème puisqu'un des rôles d'un gouvernement démocratique est de garantir, de protéger la liberté des cultes. Une grande partie des lois, dans nos pays, ont des racines « religieuses ». L'organisation du travail hebdomadaire, l'établissement de la plupart des « congés » légaux suivent les préceptes religieux. En France, qui s'affirme un pays laïc, ce sont les municipalités qui entretiennent la plupart des édifices religieux. Dans certaines régions, non seulement l'instruction religieuse est dispensée dans les établissements « d'enseignement public » mais c'est le gouvernement « laïc » qui rémunère les membres du clergé. La reine d'Angleterre est le Chef de l'Eglise anglicane mais personne ne doute que ce pays soit laïc. La laïcité n'est absolument pas ni l'athéisme ni la « séparation », le divorce entre l'Etat et la (ou les) religion. C'est le respect par l'Etat des croyances de tous les citoyens, exceptées les sectes. D'ailleurs, par « principe » ou par « définition », aristotélicienne, si une personne laïque est quelqu'un qui n'appartient pas, comme un « clerc », à un clergé, c'est-à-dire à un organisme religieux, tels qu'un ordre monastique ou une congrégation religieuse, tous les musulmans, à notre connaissance, sont laïcs puisqu'il n'existe pas d'organisme religieux ni de hiérarchie religieuse dans la religion musulmane. La « politique » : la gestion de la cité et la croyance en Dieu appartiennent à deux domaines différents. La croyance relève de l'irrationnel : « Je crois » alors que la gestion de la cité, les lois sont du domaine du raisonnement du rationnel où les actes et les pensées s'enchaînent par des liens de cause à effet. Les mêler conduit à des « monstruosités » telles que la survivance d'une église orthodoxe soumise et silencieuse mais : « indéracinable » dans le peuple en U.R.S.S. stalinienne, sous le règne d'un marxisme qui se voulait athée parce que la « religion est l'opinion du peuple » disait-il. Soumettre la « gestion de la cité », la politique à la religion peut aboutir à une aberration : sous l'injonction du Pape, Chef suprême des Chrétiens catholiques, le roi de France décide en 1209, d'écraser les hérétiques cathares et va leur faire la guerre dans le Sud de la France. Il assiège la ville de Béziers où de « bons » catholiques sont mêlés aux « hérétiques ». Les soldats demandent à leur chef : « Que devons-nous faire ? Nous ne pouvons distinguer les bons des mauvais ! ». Il répondit : « Massacrez les tous car Dieu connaît les siens ! ». Où est la rationalité d'un tel acte « politique » ? La laïcité est le respect de toutes les croyances. A la libération de Paris en 1944, le Général de Gaulle rétablit la république laïque et, aussitôt, organise une cérémonie religieuse pour remercier Dieu à laquelle assistent les combattants communistes athées qui avaient participé à la libération ! Dans une véritable démocratie, ce n'est pas la loi qui institutionnalise la règle religieuse. Cette dernière lui est antérieure et souvent plus « vivace », sinon la loi perd son caractère « principal » : elle ne s'applique plus à la totalité des citoyens dont certains peuvent avoir d'autres croyances tout aussi respectables. Cela établit qu'un régime démocratique est obligatoirement laïc. En ce moment, bien des querelles ne sont fondées que sur des méconnaissances ou des affirmations irréfléchies. Nous pensons qu'une « bonne » démocratie ne peut que satisfaire les exigences manifestées majoritairement par la « Révolution des Jeunes ».