Jeudi soir, le talk-show Nessnessma News a programmé une « rencontre spéciale » avec Abdelfatteh Mourou. En fait, le contexte national ne se prêtait pas vraiment à l'invitation de ce personnage qui, naguère jouissait d'un capital sympathie considérable auprès des Tunisiens, mais qui semble l'avoir lui-même trop vite dilapidé. Curieux que nous sommes dès qu'il s'agit de l'intervention télévisée d'une personnalité nahdhaouie, nous avons patienté jusqu'à 20 heures et manqué à cause de cela le JT de la Nationale 1. En même temps, nous nous demandions toujours ce qui pouvait bien amener le deuxième homme officiel d'Ennahdha sur les plateaux de Nessma « el hamra ». La comédie d'excuse Il y avait de quoi en effet, mais pour le savoir, le téléspectateur devait attendre la fin de l'interview, pardon, de la « rencontre spéciale », pour le comprendre. Mourou était venu pour un « droit de réponse » et pour une « demande d'excuse ». Le dossier apparemment bien fourni qu'il avait posé devant lui était celui de l'affaire pour laquelle il était venu plaider in live sur Nessma TV, « el hamra » ! La « rencontre spéciale », c'est donc Mourou qui l'imposa et pas du tout l'équipe de Nessnessma News. Mais il fallait pour la chaîne maquiller le subterfuge et donner l'impression d'avoir invité le cheikh pour une toute autre raison que celle de défendre la fille de Hamadi Jebali, offensée indûment, paraît-il, dans un précédent épisode de l'émission. Meryem Belkadhi posa donc à Mourou des semblants de questions sur tout et sur rien ; celui-ci se fit une joie d'y répondre avec les lieux communs qu'on lui connaît à lui et aux « colombes » d'Ennahdha. La comédie se poursuivit ainsi pendant plus d'un quart d'heure, jusqu'aux « cinq dernières minutes » pendant lesquelles l'invité « spécial » dévoila les motifs véritables de sa « visite ». La veille, c'est-à-dire mercredi 9 octobre, un autre invité « spécial » fit également son apparition dans Nessnessma News : il s'agit d'un représentant des agents chargés de la sécurité de certaines personnalités tunisiennes cibles de menaces terroristes ; il était venu chez Nessma « el hamra » se plaindre d'une incartade de Soufiène Ben Farhat dont aurait pâti l'un de ses « gardes du corps ». Mais, le « pauvre » n'a pas eu droit à « une rencontre spéciale » et dut expliciter d'entrée de jeu la raison de sa venue à propos de quoi Meryem Belkadhi et ses collaborateurs ne pipèrent mot. Au final, l'équipe du talk show expédia courtoisement l'importun après avoir défendu davantage l'offenseur que l'offensé dans le litige objet de la plainte. Pas reluisant du tout ! En tout cas, deux soirées de suite, Nessnessma News dut « s'excuser » de deux manières détournées pour les « bévues » de ses journalistes (en considérant que Soufiène Ben Farhat est encore un « enfant » de la chaîne). Ce n'est pas très reluisant pour une émission qui récolte beaucoup de succès auprès des amateurs de la chaîne, notamment parmi les plus politisés d'entre eux. L'autre jour, sur le même plateau, Soufiène Ben Hamida reprochait gentiment à Taïeb Aguili les « erreurs » de sa conférence de presse. Le voilà lui-même qui en commet et qui encourt au moins des « excuses » in live à la cliente de Mourou. Zied El Héni gaffa également en prenant la fille de Jebali pour l'épouse de Bouchlaka. Ce qui lui valut quelques minutes après une rectification plutôt tardive. Les voilà tous deux désormais en élèves du Cheikh Mourou qui leur apprend et réapprend les rudiments de leur métier et qui leur prodigue ses leçons de morale dont ils se passeraient bien en d'autres circonstances … Le Horla ! Pour en revenir au vice-président d'Ennahdha, lequel joua avec aisance le jeu de Nessma et se prêta narquoisement aux questions de la « rencontre spéciale », il faut bien lui reconnaître ses dons (certainement divins) de travestissement et donc de versatilité. En effet, il campa une foule de « Mourou » plutôt qu'un seul devant la malheureuse Meryem Belkadhi qui ne savait à quel « saint » elle avait affaire. Interrogeait-elle le citoyen « ordinaire » ( ?) ou le responsable nahdhaoui, le cheikh islamiste ou l'avocat, la colombe déplumée ou le faucon à qui pousse un début de duvet, le moraliste sincère ou le politique futé, l'apologiste du Dialogue National ou le détracteur des parrains du « Himar el Watani » ? Ah oui ! En effet, Sidna Cheikh commit le même lapsus que M. Abdessattar Ben Moussa, mais à la différence du Président de la LTDH, Mourou nia sa bourde et défia même l'animatrice de l'émission de prouver le contraire en revoyant l'enregistrement de l'émission ! Faut le faire, et là, nous avions notre homme ! De grâce… ! Pour conclure, souhaitons que la seule émission politique (de télévision) encore digne d'intérêt dans l'actuel paysage médiatique tunisien n'en soit pas réduite aux mea culpa quotidiens. Peut-être est-il vrai que Nessnessma News doit son succès aux coups de gueule fréquents de ses journalistes et un peu aussi à l'image de rebelles irrécupérables que ces derniers font de temps en temps prévaloir. Mais de grâce, calmez vos humeurs, Zied, Soufiène et les autres. Car lorsque vous ou votre chaîne, vous vous confondez en excuses (même déguisées), vous donnez raison et argument aux ennemis de la liberté d'expression o combien nombreux autour de vous. Cela vous fait de la peine, n'est-ce pas, d'en arriver là ? Eh bien, cela nous chagrine, nous aussi qui vous soutenons ; cela nous grise toujours de voir nos héros parader, mais nous nous sentons très mal quand, tout de suite après, ceux-ci arborent des profils de pleutres !!!